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C'est à l'occasion de la constructionconstruction d'une nouvelle ligne de métro que des fouilles archéologiques ont été menées dans le port antique de Naples, aujourd'hui enseveli. Les excavations ont permis d'étudier les couches de sédimentssédiments qui se sont déposés dans l'ancien port au cours des siècles, sur six mètres d'épaisseur.
Les analyses géochimiques de ces dépôts sédimentaires montrent que l'eau du port a été contaminée durant les six premiers siècles de notre ère par du plomb provenant du système d'adduction d'eauadduction d'eau de Naples et des cités voisines. Ce plomb, principal composant des canalisationscanalisations, se dissolvait au contact de l'eau et se répandait dans les différentes fontaines et points d'apport des cités, pour finalement se déverser dans le port. L'étude de la composition isotopique de cet élément, c'est-à-dire la proportion des différents isotopes du plomb contenu dans les sédiments permet de retracer aujourd'hui des évènements vieux de 2.000 ans.
Les analyses ont principalement révélé deux compositions isotopiques du plomb bien distinctes, avant et après l'éruption du Vésuve en 79. Elles prouvent que le vaste système d'alimentation en eau de la baie de Naples a été détruit lors de l'éruption volcaniqueéruption volcanique et que les réparations ont été effectuées avec un plomb extrait d'un ou plusieurs districts miniers différents. Ce changement brusque du signal du plomb, intervenu une quinzaine d'années après l'éruption volcanique, suggère que les Romains ont réparé l'aqueduc et les canalisations en un temps relativement court.
Le site des fouilles archéologiques du port antique de Naples se trouve en face de la place municipale et à quelques mètres sous le niveau marin actuel. À droite : un exemple de coupe stratigraphique échantillonnée dans le cadre de cette étude. Elle est constituée de vases portuaires dont les compositions isotopiques du plomb révèlent l’histoire romaine de la ville. © Hugo Delile
Une technique à transposer pour d’autres civilisations
Cette étude permet également de reconstituer les différentes phases du développement urbain de Naples : du 1er au 5e siècle après J.-C., le plomb est de plus en plus présent dans les sédiments, laissant envisager une expansion du réseau hydraulique ou une intensification de ce réseau dans des secteurs déjà équipés. Dès le début du 5e siècle, en revanche, les sédiments sont moins contaminés, révélant que le réseau d'adduction d'eau subit de nouvelles destructions liées aux invasions barbares (prise de l'aqueduc pour assécher la ville), aux nouvelles éruptions du VésuveVésuve en 472 et 512, aux épidémiesépidémies ou encore à l'effondrementeffondrement économique et administratif de Naples.
Cette lecture des pollutions métalliques dans les sédiments portuaires anciens, qui permet de retracer l'histoire d'un territoire, pourra être transposée à d'autres civilisations, d'autres aires géographiques. Et à l'heure des débats sur l’Anthropocène, elle pourrait offrir de nouveaux éléments de réflexion sur la dynamique de l'empreinte de l'Homme sur l'environnement.
Ces découvertes font l'objet d'une publication dans la revue Pnas le 16 mai 2016 par le laboratoire Archéorient - environnements et sociétés de l'Orient ancien (CNRS/Université Lumière Lyon 2) et le Laboratoire de géologiegéologie de Lyon : Terre, planètes et environnement (CNRS/ENS de Lyon/Université Claude BernardClaude Bernard Lyon 1), en collaboration avec des experts internationaux.