Alors que la pollution aux métaux lourds, comme le mercure, pose un vrai problème de santé publique, les procédés d’analyse de l’eau ou de la chair des poissons sont lourds et coûteux. Des scientifiques viennent de proposer un dispositif bon marché, simple, rapide et très sensible, hérissé de « nanopoils ». Il se montre de plus très sélectif et peut détecter d’autres polluants.


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    Représentation schématique des nanopoils piégeant des cations métalliques ou organométalliques, comme le méthylmercure. Ce procédé pourrait fournir une mesure instantanée de la pollution d'un échantillon par des métaux lourds, en lieu et place d'une longue et coûteuse analyse au laboratoire. © EPFL

    Représentation schématique des nanopoils piégeant des cations métalliques ou organométalliques, comme le méthylmercure. Ce procédé pourrait fournir une mesure instantanée de la pollution d'un échantillon par des métaux lourds, en lieu et place d'une longue et coûteuse analyse au laboratoire. © EPFL

    Mesurer la teneur en métaux lourds d'une rivière, d'un étang ou de la chair de poissonspoissons pourrait devenir aussi simple que déterminer le pH à l'aide d'une languette enduite d'un réactif. Le principe vient seulement d'être décrit dans la revue Nature Materials mais la réalisation de ce détecteur semble si facile et si peu coûteuse que le passage à une étape industrielle ne devrait pas se heurter à de gros problèmes.

    L'équipe, qui regroupe des scientifiques de l'EPFL (Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, en Suisse) et de la Northwestern University (États-Unis), a réalisé un premier modèle qui détecte le mercure dissous dans l'eau, sous sa forme méthylée. Ce polluant est régulièrement recherché dans l'eau potable mais aussi dans la chair des poissons carnivorescarnivores, en bout de la chaîne alimentairechaîne alimentaire, comme le thonthon par exemple. On sait que le mercure est notamment dangereux pour le développement du système nerveux chez le fœtusfœtus.

    Des nanoparticules (rondes) hérissées de filaments (rouges) sont installées sur un substrat, entre deux électrodes, à gauche et à droite sur ce schéma. En a, le courant électrique ne peut pas passer entre ces dernières. En b, des cations métalliques (points bleus) sont venus se fixer sur les nanoparticules. Un chemin conducteur (ligne bleue) se forme aussitôt par effet tunnel. Entre les deux électrodes, la résistance électrique chute, ce qui peut être mesuré. © Eun Seon Cho <em>et al.</em>/<em>Nature Materials</em>
    Des nanoparticules (rondes) hérissées de filaments (rouges) sont installées sur un substrat, entre deux électrodes, à gauche et à droite sur ce schéma. En a, le courant électrique ne peut pas passer entre ces dernières. En b, des cations métalliques (points bleus) sont venus se fixer sur les nanoparticules. Un chemin conducteur (ligne bleue) se forme aussitôt par effet tunnel. Entre les deux électrodes, la résistance électrique chute, ce qui peut être mesuré. © Eun Seon Cho et al./Nature Materials

    Un détecteur extrêmement sensible et un résultat instantané

    Repérer cette petite molécule nécessite une analyse chimique en laboratoire alors que ce détecteur ne requiert qu'un simple contact sur une languette de verre et une mesure de résistance électrique. Et il fonctionne très bien. Des essais en grandeur nature ont été réalisés dans le lac Michigan, où la teneur en mercure est très faible, et, en Floride, sur la chair d'un poisson mangeur d'alguesalgues, qui accumule donc très peu de ce métal lourd. Ces tests confirment les résultats obtenus au laboratoire : la sensibilité est très grande, l'appareil repérant des doses inférieures à la picomole par litre.

    Le dispositif n'a rien de complexe mais exploite un phénomène quantique : l'effet tunnel. Sur un substratsubstrat en verre est installé un film de nanoparticulesnanoparticules d'or recouvertes de « nanopoils » organiques. Lorsque du méthylmercure est présent dans la solution, il se fixe sur ces nanopoils parce qu'il est chargé positivement (c'est un cationcation). Des électronsélectrons peuvent alors facilement sauter d'une nanoparticule à l'autre, par effet tunnel. Entre deux électrodesélectrodes, fixées sur le support en verre, la résistance électrique chute, ce qui peut être facilement mesuré par un appareil électronique.

    Mieux : les chercheurs ont découvert de manière empirique que la spécificité de la liaison avec le cation dépend de la longueur de ces nanopoils et il devrait donc être possible de réaliser des languettes détectant d'autres métauxmétaux lourds. L'équipe présente d'ailleurs des résultats obtenus avec le cadmiumcadmium.

    Un tel capteurcapteur permettrait donc des mesures in situ et rapides, donc plus nombreuses, pour détecter ces polluants. « Le coût d'une languette est compris entre 5 et 10 euros » expliquent les chercheurs de l'EPFL. De quoi, à l'avenir, mieux chasser ces polluants dans l'eau potable ou dans l'alimentation...