298 Baptistina, tel est le nom de l’astéroïde identifié voici 7 ans comme étant le probable corps parent de celui qui est à l’origine de l’impact du Yucatan, il y a environ 65 millions d’années. De nouvelles analyses portant sur les fragments de la météorite de Tcheliabinsk rendent néanmoins moins crédible cette identification du célèbre tueur de dinosaures.

au sommaire


    Voici 7 ans, William Bottke et David Nesvorny du Southwest Research Institute (SwRI) à l'Université de Boulder dans le Colorado et leur collègue tchèque David Vokrouhlicky de l'Université Charles de Prague avaient publié dans Nature, un article retentissant. Les trois astronomesastronomes pensaient, en effet, avoir identifié la famille d'astéroïdes d'où provenait celui qui a créé le fameux cratère d'impact du Yucatan qui a mis, comme on le sait, un point final à l'ère des dinosaures. Quatre ans plus tard cependant, un autre groupe de chercheurs qui a utilisé les observations fournies par le Wide-field Infrared Survey Explorer (Wise)), a fortement mis en doute l'hypothèse des premiers.

    Le scénario qu'ils ont proposé pour expliquer l'origine du corps céleste responsable de la crise K-Tcrise K-T (l'extinction du CrétacéCrétacé-Tertiaire) faisait intervenir un astéroïde mesurant approximativement 60 km de diamètre. Celui-ci serait entré en collision, voici environ 160 millions d'années, avec un plus gros de quelque 170 km de diamètre. Le choc aurait alors généré de nombreux fragments qui sont tous constitutifs de la famille d'astéroïdes nommée Baptistina. Enfin, suite à des perturbations gravitationnelles, l'un d'entre eux aurait donc fini par entrer en collision avec la Terre.

    Toutefois, en étudiant de plus près les 1.056 membres connus de cette famille, les chercheurs conclurent que la collision ne s'était produite, en réalité, qu'il y a 80 millions d'années. Selon eux, les 15 millions d'années qui ont séparé cet événement de celui du Yucatan ne sont pas suffisantes pour qu'un petit corps céleste de 5 à 10 km de diamètre ait le temps de rejoindre la Terre.


    Une reconstitution en image de synthèse de l'impact du corps céleste associé à la crise KT. Les dinosaures ainsi que d'autres espèces comme des reptiles volants et marins n'y ont pas survécu. © DiscoveryDinosaurs, YouTube

    Après l'impact, un astéroïde peut être pris pour un autre

    Une autre équipe d'astronomes et de spécialistes des météorites vient récemment d'enfoncer un second clou dans le cercueil de la théorie de leurs collègues en publiant un nouvel article sur le sujet dans le journal Icarus (en accès libre sur arXiv). Cette fois, les contre-arguments proviennent de l'analyse des fragments de la célèbre météorite russe de Tcheliabinsk qui s'est désintégrée au-dessus de l'Oural, le 15 février 2013. La nature de ce corps céleste tombé sur Terre est connue depuis quelque temps. Le matériau qui le compose est identique à celui d'une chondrite ordinaire de type LL et diffère donc de celui qui constituait l'astéroïde à l'origine de l'astroblème du Yucatan (cratère de Chicxulubcratère de Chicxulub) lequel était vraisemblablement du type des chondriteschondrites carbonées.

    Or, comme l'ont montré les fragments de la météorite de Tcheliabinsk, les ondes de choc produites lors d'impacts peuvent modifier significativement la signature spectrale d'un matériau de type chondrite LL et lui donner celle d'un de type chondrite carboné. Mieux, la signature spectrale observée est très similaire à celles des astéroïdes de la famille des Baptistina. Son lien avec la disparition des dinosauresdinosaures apparaît donc encore plus contestable.

    L'autre conséquence de cette découverte est que les collisions entre petits corps célestes peuvent en changer l'aspect au point que l'on peut se méprendre sur leurs compositions chimiques et minéralogiques. Un facteur dont il faudra désormais tenir compte, que ce soit pour l'exploitation des astéroïdes ou pour élaborer une stratégie d'évitement vis-à-vis de géocroiseurs qui menacent notre planète. Un corps censé être riche en carbonecarbone et très primitif pourrait être, en fait, plus jeune et pierreux.