Les tardigrades sont de minuscules invertébrés très répandus dans les milieux aquatiques et terrestres. Il n’en existe pourtant que trois à l’état fossile, ce qui laisse un grand vide quant à leur histoire évolutive. Un nouveau spécimen d’une espèce encore inconnue vient d’être décrite par des chercheurs.
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Les tardigrades sont surtout connus pour leur capacité à résister aux conditions extrêmes. Mais, malgré leur large répartition mondiale et leur longue lignée évolutive, les formes fossiles restent extrêmement rares. C'est donc une découverte assez exceptionnelle que décrivent des chercheurs dans une étude publiée dans la revue Proceedings of the Royal Society B. Il s'agit d'un tardigrade retrouvé dans un morceau d'ambre de République dominicaine et daté du Miocène (environ 16 millions d'années), qui représente non seulement une nouvelle espèce mais aussi le premier fossile connu du Cénozoïque, notre ère géologiqueère géologique actuelle.
“La découverte d’un fossile de tardigrade est un événement qui se produit une fois par génération”
Jusqu'ici, seuls trois fossiles de tardigrades ont été retrouvés. Les deux premiers, datés du CrétacéCrétacé supérieur, ont été retrouvés dans des morceaux d'ambre au Canada et aux États-Unis, et le troisième, le plus ancien et datant du CambrienCambrien moyen, a été découvert en Sibérie. « La découverte d'un fossile de tardigrade est un événement qui se produit une fois par génération », assure Phil Barden, coauteur de l'article et biologiste à l'Institut de technologie du New Jersey.
D'une taille microscopique (un demi millimètre pour le fossile décrit) et, en l'absence de parties du corps fortement biominéralisées, on dispose de très peu d'archives fossiles permettant de retracer la lignée évolutive de ces animaux hors du commun.
L'ambre est le matériaumatériau idéal pour conserver ces organismes aussi minuscules que fragiles, mais l’ambre fossile ne remonte qu'à 230 millions d'années en arrière, « soit moins de la moitié de l'histoire des tardigrades », atteste Phil Barden. On estime ainsi que les targigrades ont divergé des autres lignées de panarthropodes au cours du Cambrien il y a 540 millions d'années.
Le saviez-vous ?
Jusqu’ici, l’ambre dominicain, relativement récent (Miocène), avait surtout révélé des espèces de fourmis de lignées existantes. Plus de 80 espèces de fourmis ont ainsi été retrouvées dans le même gisement que celui de Paradoryphoribius chronocaribbeus. La plupart des ambres fossiles datent du Crétacé, le plus connu étant l’ambre birman, dans lequel de très nombreuses espèces ont été trouvées — plus de 1.500 au total.
De minuscules griffes 20 à 30 fois plus fines qu’un cheveu
« Le spécimen est le mieux détaillé à ce jour », se félicitent les chercheurs, qui ont nommé la nouvelle espèce Paradoryphoribius chronocaribbeus. On peut ainsi distinguer les pièces buccales et les griffes en forme d'aiguille 20 à 30 fois plus fines qu'un cheveu. « À première vue, ce fossile semble similaire aux tardigrades modernes en raison de sa morphologiemorphologie relativement simple », note pour sa part Marc Mapalo, auteur principal de l'étude et doctorant au département de biologie organique et évolutive de Harvard. Cela a permis de le rattacher à la famille des Isohypsibioidea, qui représente toujours une des quatre familles des tardigrades modernes, et caractérisée par leurs minuscules griffes.
Néanmoins, cette espèce présente aussi des caractères morphologiques uniques, « ce qui fait qu'on ne sait pas encore si Paradoryphoribius chronocaribbeus est membre d'une lignée tardive entièrement éteinte ou s'il est affilié à des espèces de tardigrades vivants et encore non découvertes », avancent les auteurs. Le nouveau fossile est désormais exposé dans la section invertébrésinvertébrés du Musée d'histoire naturelle américain, à New York.