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Ce soir, à Fort-de-France, en Martinique, un catamaran de 18 mètres, quittera le port du Marin. Le voilier mettra cap au nord pour entrer dans la mer des Sargasses. Pour la seconde fois, l'expédition 7e continent, dirigée par l'explorateur Patrick Deixonne, part à l'assaut de ces massesmasses de matière plastiquematière plastique de toutes tailles, du gros déchet flottant aux microscopiques particules réparties au sein d'une profonde couche d'eau. En 2013, l'expédition avait exploré le « gyre » central de l'océan Pacifique, où cette accumulation prend des proportions énormes. Patrick Deixonne avait commenté pour Futura-Sciences les résultats de cette étude menée à bord du bateau.
Cette fois, le travail, étalé sur trois semaines, porteporte sur l'Atlantique nord, touché lui aussi par cette pollution insidieuse et mal connue, et sera conduit dans le gyre de la mer des Sargasses, entourée par le Gulf Stream. Sous la direction de Claire Pusineri, biologiste, l'équipe scientifique du bord mettra en œuvre plusieurs expériences, mises au point au Cnes, à l'Esa et à l'Icam de Toulouse. Mise à l'eau une heure par jour, une bouée plongeante mesurera la quantité de particules de plastique jusqu'à 30 m, en même temps que des paramètres physiquesphysiques (température, salinitésalinité et luminositéluminosité) et biologiques (quantité de phytoplancton). Réalisée par des ingénieurs de l'Icam de Toulouse en collaboration avec le Cnes, cette bouée baptisée Gyroplastique servira non seulement à ces mesures directes, mais aussi à améliorer les méthodes de détection des matières plastiques dérivantes par les satellites. Des bouées dérivantes seront larguées pour un suivi à long terme.
La route du navire durant les trois semaines de l'expédition. Les puces de couleur indiquent les endroits où seront prises des images par satellite, dans le domaine visible avec Pléiades (balises roses) et par radar avec TerraSAR-X (en vert), ou les deux (en violet). © Expédition 7e continent, 2014
Une cartographie mondiale des déchets de plastique
Le filet Manta, déjà utilisé dans l'océan Pacifique, effectuera des collectes de plancton et des petites particules de plastique qui seront analysées après le retour à terreterre. Des capteurscapteurs de polluants, constitués d'un gelgel concentrant les composés chimiques, ont été mis au point pour cette expédition par le laboratoire IMRCP (interactions moléculaires et réactivité chimique et photochimique) de Toulouse. Ils permettront de caractériser les polluants organiques, comme les hydrocarbureshydrocarbures, les phtalatesphtalates et le bisphénol Abisphénol A. Ces moléculesmolécules seront également recherchées dans la chair des poissonspoissons prélevés par un fil de pêchepêche que traînera le navire.
Toutes ces mesures seront géolocalisées et même imagées grâce à des images Spot et Jason, ce qui permettra une cartographie de ce « continent de plastique », selon l'expression imagée souvent employée. Cette expédition scientifique est aussi médiatique. Car, comme nous l'expliquait Patrick Deixonne, cette pollution, reste relativement ignorée. L'explorateur, qui l'a découverte en traversant l'Atlantique à la rame en 2009, veut la faire connaître et faire prendre conscience de son ampleur. En effet, il n'est pas anodin que des organismes marins, du plancton au poisson, ingèrent et concentrent ces polluants, sous forme de molécules ou de microdéchets. L'équipe entend bien ne pas s'arrêter là. Après l'expédition dans le Pacifique en 2013 et cette nouvelle étude dans l'Atlantique, l'explorateur prévoit en 2015 un voyage dans l'Atlantique sud.
Parce qu'il s'agit de sensibiliser, l'équipe a organisé en parallèle l'opération « De la Seine jusqu'au 7e continent », entre Châtillon-sur-Seine et Le Havre, en passant par Paris. Grâce au programme scolaire Argonautica, du Cnes, et aux établissements d'enseignement agricole, collèges et lycées seront successivement mobilisés pour des actions pédagogiques en lien avec l'expédition. Les classes suivront le journal de bord et pourront même avoir des liaisons radio avec l'équipage. Encore plus que les autres, les jeunes générations doivent être sensibilisées à l'impact de nos gestes quotidiens sur l'océan. Jeter un sac en plastique dans la nature, c'est l'envoyer dans l'estomacestomac d'organismes marins...