Une expérience sur des bourdons a montré qu'ils peuvent développer une sorte d'addiction aux pesticides néonicotinoïdes : plus les insectes en mangeaient, plus ils en redemandaient. Un phénomène particulièrement inquiétant pour la biodiversité.

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    Les abeilles sont des insectes indispensables à notre alimentation car elles jouent un rôle essentiel dans la pollinisation de nombreuses plantes. Comme d'autres insectes, celles-ci connaissent un grave déclin dans le monde, en partie à cause de l'utilisation de pesticides dans les cultures qu'elles visitent.

    Mais lorsque les abeilles vont butiner, peuvent-elles faire la différence entre des plantes traitées aux pesticides ou pas et ne pourraient-elles pas éviter instinctivement les cultures traitées ? Pour le savoir, une équipe de l'Imperial College et de l'université Queen Mary de Londres a travaillé sur des bourdons.

    Les chercheurs ont testé une classe de pesticides particulièrement controversés : les néonicotinoïdes. Très utilisés dans le monde, certains d'entre eux ont été interdits en Europe.

    Le saviez-vous ?

    Les néonicotinoïdes agissent sur le système nerveux des abeilles et affectent leurs capacités d’orientation, d’apprentissage et de mémorisation. En avril 2018, la Commission européenne a décidé d’interdire les semences traitées par trois pesticides néonicotinoïdes : l'imidaclopride, la clothianidine et le thiaméthoxame.

    L'équipe a travaillé avec dix colonies de bourdons Bombus terrestris pendant dix jours. Chaque colonie avait accès à un espace dans lequel se trouvaient des sortes de mangeoires proposant du sucrosesucrose avec ou sans thiaméthoxame. Chaque insecte était identifié par un numéro (il y en avait 381). Les bourdons pouvaient sortir manger entre 10 h et 16 h chaque jour (voir photos de l'expérience ci-dessous).

    Présentation de l'expérience. (a) Les bourdons sont dans une boîte en bois attachée à la zone de nourriture (en haut). (b) Chaque colonie a le choix entre six sources nutritives avec des concentrations différentes de produits. (c) Les bourdons vont manger. © Arce <em>et al, Proceedings of the Royal Society B </em>2018

    Présentation de l'expérience. (a) Les bourdons sont dans une boîte en bois attachée à la zone de nourriture (en haut). (b) Chaque colonie a le choix entre six sources nutritives avec des concentrations différentes de produits. (c) Les bourdons vont manger. © Arce et al, Proceedings of the Royal Society B 2018

    Les bourdons deviennent addicts aux pesticides

    Les chercheurs ont mesuré le volumevolume de sucrose consommé et le nombre de visites que les insectes faisaient à chaque source de nourriture. Au départ, les bourdons préféraient la nourriture sans pesticide. Mais au fur et à mesure, ils allaient plus souvent vers les aliments aux néonicotinoïdes et ils en consommaient de plus en plus ! Même si les sources de nourriture étaient changées de place, les insectes continuaient à aller de préférence vers celles qui contenaient des pesticides. Cela signifie que les bourdons étaient capables de détecter le thiométhoxame.

    Richard Gill, un des auteurs de cette recherche, a expliqué dans un communiqué que s'ils ont le choix, les insectes qui n'ont pas été en contact avec les néonicotinoïdes préfèrent éviter les aliments traités. Mais au fur et à mesure qu'ils en font l'expérience, ils « développent une préférence ».

    Les néonicotinoïdes ciblent des récepteurs nerveux chez les insectes qui sont similaires aux récepteurs ciblés par la nicotine

    Or, le chercheur souligne : « Fait intéressant, les néonicotinoïdes ciblent des récepteurs nerveux chez les insectes qui sont similaires aux récepteurs ciblés par la nicotinenicotine chez les mammifères. » Cette similitude entre les récepteurs ajoutée au comportement des bourdons suggère une forme d'addictionaddiction.

    Ces résultats paraissent dans la revue Proceedings of the Royal Society B.