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Face ventrale d'un pocheteau gris. © Misjel Decleer CC by-nc-sa
Le pocheteau gris (Dipturus batis), très pêché en France, puisque 60,2% des prises de cette espèce y sont enregistrées, est la plus grande des rajidés. Cette espèce est déjà classée en danger de disparition sur la Liste Rouge de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) mais la situation pourrait être pire.
En effet, Samuel Iglésias, de la Station de Biologie marine de Concarneau, vient de révéler que le regroupement des espèces Dipturus cf. intermedia (autrement dit genre connu et espèce probable mais non identifiée avec certitude) et Dipturus cf. flossada opéré il y a 83 ans au sein de Dipturus batis était une erreur. D'après ses études des critères moléculaires et morphologiques, il s'agit bien de deux espèces distinctes. Le dindon de la farce est Dipturus cf. intermedia qui est l'espèce la plus menacée des deux.
Son statut serait donc bien plus grave que celui accordé à Dipturus batis, dont l'avenir n'était déjà pas très rose. Bien qu'autrefois abondante dans les eaux européennes, cette « espèce » a connu un fort déclin depuis des décennies.
Un pocheteau gris échoué sur une plage. Cette espèce peut atteindre 2,85 m pour 100 kg. © CEFAS/Jim Ellis, 2000 CC by-nc-sa
Le Conseil International pour l'Exploration de la Mer (en anglais International Council for the Exploration of the Sea, ICES) faisait savoir en 2008 que les stocks de la mer Celtique et de la mer du Nord, de la Manche et du Skagerrak (détroit entre Norvège, Suède et Danemark) étaient épuisés. Il recommande donc de réduire la pêchepêche de cette espèce et les prises accidentelles.
Plus de tax… onomie !
« La menace de disparition des Dipturus européens avec l'erreur d'étiquetage dans les statistiques des pêcheries souligne la nécessité d'une importante réévaluation des populations des différentes espèces de Dipturus dans les eaux européennes, conclut Samuel Iglésias. Sans révision et reconnaissance d'un statut distinct, Dipturus cf. intermedia pourrait bientôt être une espèce disparue. »
La confusion taxonomique aura donc empêché la reconnaissance du statut des ces deux espèces et par conséquent leur prise en compte dans la gestion des pêches et dans les politiques de conservation. La taxonomietaxonomie n'est pas une chose simple et à l'heure où les spécialistes de cette science se font rares, il n'est guère évident que les pêcheurs excellent dans ce domaine.
C'est l'une des raisons qui ont motivé la Convention de Washington sur le commerce des espèces à prendre aussi en compte les espèces qui pouvaient être confondues avec celles qui étaient menacées. Ce sera peut-être le cas pour ces deux espèces de raies, maintenant que la gravitégravité de leur situation a été révélée.