Financée par RTE, qui gère les lignes électriques à haute tension, une étude en montre un aspect positif : la préservation des terres qu’elles surplombent. Menées pendant 3 ans par le Muséum d’histoire naturelle en Île-de-France, les observations révèlent une flore insoupçonnée. L'étude conduit aussi à quelques recommandations.

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    Les lignes à haute tensionhaute tension alimentent régulièrement l'inquiétude de riverains et sont stigmatisées pour leur impact sur les paysages, voire sur la santé. Elles peuvent aussi avoir du bon pour la nature en permettant à des plantes ou fleurs rares de s'épanouir sous les câbles électriques. « On se rend compte que ces milieux, même s'ils ne sont pas attractifs au premier abord, peuvent abriter une flore très intéressante », explique à l'AFP Clémence Salvaudon, botanistebotaniste qui a arpenté pendant 3 ans quelque 330 km de lignes en Île-de-France.

    Pour le Conservatoire botanique national du Bassin parisien, service scientifique du Muséum national d'histoire naturelleMuséum national d'histoire naturelle, elle a recensé 716 espèces végétales, soit près de la moitié de la biodiversité connue dans la région. L'inventaire, fait à la demande de RTE, la filiale d'EDF qui gère le réseau haute et très haute tensiontrès haute tension, a répertorié 270 espèces rares, dont 18 protégées régionalement ou nationalement. Parmi ces plantes ou fleurs remarquables : le polygala chevelu, espèce qui n'avait pas été observée en Île-de-France depuis 1960, ou encore l'œillet superbe, découvert dans la vallée de la Seine dans le sud de la Seine-et-Marne.

    La présence inattendue d'une flore variée et riche sous les câbles électriques s'explique, pour Clémence Salvaudon, par les coupes d'arbres régulières, tous les 4 ans environ, faites sur le tracé des lignes en forêt pour éviter que les arbres ne viennent provoquer des courts circuits. Ces coupes « permettent l'arrivée de la lumièrelumière dans un milieu fermé et, du coup, permettent à une flore de s'exprimer », note-t-elle. 

    « Certains types de prairies ou de pelouses peuvent s'installer et, vu que ce sont des milieux en raréfaction, des espèces vont y trouver un milieu refuge », explique la botaniste, estimant que ces lignes sont ainsi moins « fragmentantes » que des autoroutes ou des lignes TGV.

    L'ophrys bourdon (<em>Ophrys fuciflora</em>), une orchidée commune en Europe, mais qui a besoin d'espaces protégés pour s'épanouir à loisir. © MNHN/Clémence Salvaudon

    L'ophrys bourdon (Ophrys fuciflora), une orchidée commune en Europe, mais qui a besoin d'espaces protégés pour s'épanouir à loisir. © MNHN/Clémence Salvaudon

    L'impact des lignes électriques sur les oiseaux doit être minimisé

    Au-delà de l'inventaire, des recommandations ont été formulées. À certains endroits sont ainsi préconisées des coupes au mois d'août pour respecter le cycle biologique d'espèces données. Dans d'autres, de faire des entretiens plus fréquents pour laisser l'espace très ouvert. Ailleurs, la botaniste conseille d'enlever les déchets verts (branches, herbes) qui, en se décomposant, font un engrais favorisant la prolifération des espèces banales aux dépens de plantes plus rares et plus fragiles.

    À l'échelle du réseau de RTE - 80.000 km de couloirs de lignes dont 20 % en zones forestières -, environ 80.000 hectares pourraient ainsi devenir de véritables réservoirs de biodiversité végétale, calcule Jean-François Lesigne, responsable de l'environnement chez RTE. 

    En parallèle, souligne le responsable, l'entreprise agit aussi pour limiter l'impact de ses lignes sur les oiseaux, en équipant notamment ses installations de balises, et combat l'effet de coupure en forêt en étageant les bordures des couloirs de lignes avec différentes hauteurs de tailles des arbres.

    Des efforts certains pour « verdir » son activité alors que les lignes suscitent des inquiétudes régulières touchant à son impact sur les paysages mais aussi sur la santé : en Normandie, par exemple, des éleveurs ont saisi la justice en accusant l'opérateur de rendre leurs vachesvaches malades avec une ligne à très haute tension. « Il y a des impacts qu'on ne nie pas sur le paysage ou sur les oiseaux, mais on veut montrer que ces lignes, si on s'en occupe comme il faut, peuvent aussi présenter un intérêt pour la biodiversitébiodiversité, souligne M. Lesigne. Du coup, cela aide à l'acceptation de ces ouvrages, tant par les associations avec lesquelles on travaille que par la population, qui retrouvent un intérêt dans ces terrains qui étaient considérés comme perdus. »