Des sources d’énergie se cachent partout autour de nous, dans l’air ambiant, sous forme de fluctuations de température. Des chercheurs du MIT proposent de les exploiter grâce à leur toute nouvelle invention, qui vit au rythme de l’alternance jour-nuit pour convertir de telles variations de température en électricité.


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    Tirer de l'énergieénergie des différences ou des fluctuations de température n'est pas nouveau, mais les concepts existants ont des inconvénients. Ainsi, les appareils thermoélectriques dépendent d'un gradientgradient de température statique : ils convertissent en électricité les écarts de température existant simultanément entre deux points de l'appareil. Ce principe permet par exemple de recharger des montres connectées grâce à la chaleurchaleur de la peau.

    Plus efficaces que les systèmes thermoélectriques, les capteurscapteurs pyroélectriques génèrent pour leur part de l'électricité à partir de variations fréquentes de température, comme celles dues au passage d'un individu. Ils sont utilisés notamment comme détecteurs infrarougeinfrarouge pour les systèmes d'alarme ou d'allumage automatique.

    Dans ce contexte, une équipe du MIT présente un dispositif novateur consistant à exploiter les cycles de fluctuations de températures de l'airair ambiant, par exemple entre le jour et le nuit. Anton Cottrill, Michael Strano et leur équipe au Département de génie chimique du MIT ont appelé leur invention thermal resonator (traduit littéralement par résonateur thermique). Ils décrivent ce nouvel appareil dans une publication parue dans Nature Communications.

    Le saviez-vous ?

    Des outils sont également développés pour produire de l’énergie à partir du bruit ambiant.

    « Nous avons inventé ce concept de toutes pièces. Nous avons fabriqué le premier résonateur thermique », déclare le professeur Michael Strano dans un communiqué du MIT. L'appareil est portatif et fonctionne en toute indépendance. Il peut être « simplement posé sur une table et générer de l'énergie, comme à partir de rien. » Avec une variation de 10 °C entre le jour et la nuit, le dispositif produit jusqu'à 350 mV et 1,3 mW de puissance, de quoi faire fonctionner des appareils électroniques et de communication miniatures, ainsi que des capteurs.

    Cela paraît bien peu, mais à ce stade l'appareil produit déjà trois fois plus d'énergie que les appareils pyroélectriques de taille équivalente disponibles actuellement dans le commerce. En outre, il fonctionne sur le long terme, sans batterie, quels que soient l'environnement et les conditions météorologiques, contrairement aux énergies renouvelablesénergies renouvelables comme le solaire et l'éolien, dont la production d'énergie s'interrompt par mauvais temps ou en absence de ventvent.

    Le dispositif, que les chercheurs ont nommé « résonateur thermique », transforme les fluctuations de température de l’air ambiant en énergie. Il a été élaboré pour exploiter le cycle jour-nuit, ce qui a gouverné le choix des matériaux. © Melanie Gonick, MIT
    Le dispositif, que les chercheurs ont nommé « résonateur thermique », transforme les fluctuations de température de l’air ambiant en énergie. Il a été élaboré pour exploiter le cycle jour-nuit, ce qui a gouverné le choix des matériaux. © Melanie Gonick, MIT

    L’appareil exploite le cycle jour-nuit

    Dans les entrailles du mystérieux appareil se cache un agencement de différents matériaux. La structure de base est une moussemousse métallique (donc une structure poreuse) faite de cuivrecuivre ou de nickelnickel, recouverte d'une couche de graphènegraphène. Les chercheurs ont empli la mousse avec une cire d'octadécane, un matériaumatériau qui oscille entre l'état solideétat solide et l'état liquideétat liquide selon la température« Ce matériau à changement de phase emmagasine la chaleur et le graphène assure une conductivité thermiqueconductivité thermique très rapide », précise Anton Cottrill, premier auteur de la publication, ce qui permet de produire l'électricité.

    Le choix et l'arrangement des matériaux n'est pas anodin. L'invention repose en effet sur l'effusivité thermique. Cette propriété des matériaux à absorber ou communiquer de la chaleur à leur environnement dépend de la conductivité thermique (la diffusiondiffusion de la chaleur à travers le matériau) et de la capacité thermique (la capacité du matériau à stocker de la chaleur). C'est dans le but d'optimiser cette propriété que les chercheurs ont conçu l'appareil.

    Le prototype a été installé sur le toit du MIT, où il a été testé plusieurs mois sur des périodes d’environ 15 jours. On peut l’entrevoir, en noir à droite de l’image, derrière une station météorologique en blanc, et à côté d’un appareil de mesure, en noir à gauche. © Justin Raymond, MIT
    Le prototype a été installé sur le toit du MIT, où il a été testé plusieurs mois sur des périodes d’environ 15 jours. On peut l’entrevoir, en noir à droite de l’image, derrière une station météorologique en blanc, et à côté d’un appareil de mesure, en noir à gauche. © Justin Raymond, MIT

    Le résonateur thermique, pour compléter d'autres sources d'énergie

    D'autre part, le résonateur thermique peut théoriquement s'adapter à différents cycles de changements de température, plus ou moins importants, comme ceux induits par l'alternance jour-nuit, ou encore par l'allumage et l'extinction réguliers des moteurs de réfrigérateur ou des machines-outils. Cependant, les chercheurs ont décidé de tester le concept sur les variations de température dues à l'alternance jour-nuit. Tout cela a gouverné le choix et l'agencement des matériaux lors de la constructionconstruction du prototype, mais avec quelques ajustements, le résonateur thermique pourra exploiter à l'avenir d'autres cycles de température.

    Pour les chercheurs, le dispositif a avant tout vocation à être utilisé en parallèle avec d'autres technologies productrices d’énergie. Le système hybridehybride ainsi formé continuerait à fonctionner même en cas de panne d'un des composants. Par exemple, l'appareil installé sous un panneau solaire convertirait les pertes de chaleur en énergie et augmenterait le rendement du panneau.

    L'invention pourrait aussi trouver son utilité ailleurs dans le système solairesystème solaire, pour l'exploration des planètes et des luneslunes, car elle pourrait fournir durablement de l'énergie aux roversrovers et aux atterrisseurs. Il serait même possible de fabriquer le système sur place, à partir des éléments présents sur la planète, au lieu de le faire sur Terre, d'après Volodymyr Koman, un des co-auteurs de la publication.