Les composants électroniques pourraient un jour se dégrader dans l'environnement ou, pour des applications médicales, dans le corps humain. Trois semaines après sa mise en fonction dans une souris, un implant fait de magnésium, de silicium et de soie s’est dissout sans laisser de trace. Découvrez la recette de cette prouesse technologique…

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    Cet appareil électronique biocompatible, intégré dans de la soie, se dissout en présence d’eau. Il se compose entre autres d’une diode, de transistors et de condensateurs. © Tufts University et University of Illinois

    Cet appareil électronique biocompatible, intégré dans de la soie, se dissout en présence d’eau. Il se compose entre autres d’une diode, de transistors et de condensateurs. © Tufts University et University of Illinois

    Cartes bancaires, téléphones, voituresvoitures ou implants médicaux... les circuits intégrés sont partout ! Bien souvent faits de siliciumsilicium, de cuivrecuivre et d'argentargent, ils ont la particularité d'être durables, c'est-à-dire non biodégradablesbiodégradables. Ce qui est problématique pour la gestion des déchetsdéchets abandonnés dans l'environnement, mais aussi pour diverses applicationsapplications médicales. Par exemple, il faut souvent réaliser une opération chirurgicale pour extraire des implants électroniques, comme des injecteurs de médicament sous-cutanéssous-cutanés, ce qui augmente les risques d'infections. 

    Deux scientifiques ont donc décidé d'unir leur expertise en 2009 pour développer des appareils électroniques solubles dans l'eau. John Rogers, de l'University of Illinois, est un spécialiste des matériaux tandis que Fiorenzo Omenetto, de la Tufts University, maîtrise la production de soie par le bombyx du mûrier. Après quelques essais infructueux, le défi a été relevé par ce duo improbable et la vingtaine de chercheurs qu'ils encadraient. 

    Lors du test final, une souris a reçu, à l'intérieur d'une plaie, des doses de bactéricides à intervalles réguliers grâce à un implantimplant électronique. Cet appareil a ensuite intégralement disparu au bout de 3 semaines. Cette avancée technologique majeure a été présentée dans la revue Science.


    L’électronique dégradable existe… la preuve en vidéo. © Suk-Won Hwang et al. 2012, Science

    Du magnésium pour remplacer le cuivre et l'argent

    Quelques adaptations ont été requises pour rendre tous les composants électroniques dégradables. Le cuivre et l'argent, des métauxmétaux stables, ont été bannis et remplacés par du magnésiummagnésium, bien accepté par l'organisme et particulièrement réactifréactif en présence d'eau. Une antenne, pour un contrôle à distance, et des fils reliés à une source d'alimentation électrique externe ont également été produits dans ce matériaumatériau

    Pas question en revanche de bannir le silicium, mais comment le faire disparaître ? La solution trouvée est simple, il faut l'amincir ! En effet,  en présence d'eau, cet élément perd environ 4,5 nm d'épaisseur par jour. Des circuits imprimés épais de 100 nm ont donc été développés. Ils se dégradent approximativement en 22 jours, contre 1.000 ans pour un circuit classique !

    Les constituants électroniques doivent être disposés sur un support et protégés, si possible par une matièrematière biocompatible ne provoquant pas de réaction immunitaire. Bien évidemment, ces éléments devraient également être solubles. La solution a été apportée par Fiorenzo Omenetto : les circuits électroniques ont été fixés sur de la soie puis enrobés par cette même matière ! Car ce matériau se dissout en présence d'eau ou d'enzymesenzymes spécifiques. 

    Une maîtrise parfaite de la dégradation de l’électronique

    Voici donc les secrets de l'électronique biodégradable ! Dernier détail, les temps de désintégration sont bien maîtrisables. Pour les modifier, il suffit de faire varier l'épaisseur des constituants métalliques ou l'agencement des moléculesmolécules de fibroïne, la protéineprotéine constituant la soie. 

    Des plans ont déjà été établis pour créer un système d'imagerie optique sous-cutané, un patch thermique devant prévenir toute infection après une opération chirurgicale, des cellules photovoltaïques ou des capteurs de températurecapteurs de température, le tout bien sûr en plus de l'injecteur déjà testé sur la souris.  

    Les chercheurs travaillent maintenant sur la fabrication à grande échelle de la soie et des films de silicium. Les premiers objets produits auront une vocation médicale, mais le projet pourrait ensuite s'étendre à d'autres ustensiles de notre quotidien, par exemple aux puces de nos téléphones portables.