Dans leurs blogs respectifs, deux designers s'interrogent : a-t-on raison de toujours chercher à rendre ses produits (ou ses sites web) "simples" ? Dans UXCentric, Dave Rodgers se demande ainsi : "Et si, par nos efforts pour tout rendre facile à trouver et utiliser, nous étions sans nous en rendre compte, en train de détruire une part de la magie du web ? (...) Si les gens voulaient un web entièrement "trouvable", pourquoi la recherche n'est-elle pas devenue le seul mode de navigation sur le web ? Ma réponse : parce qu'elle manque de magie."

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    L'iPod

    L'iPod

    Andrei Herasimchuk, designer d'interfaces et de logiciels, va plus loin : "En avançant l'idée selon laquelle tout devrait apparaître évident, l'usabilité n'est-elle pas dangereuse pour l'humanité ?" A l'inverse, "ne devriez-vous pas, en tant que designer, vous sentir tenu, par une sorte de code d'éthique, de rendre votre travail plus profond, plus pensé et complexe, et à ne pas destiner votre travail au plus petit commun dénominateur de votre base d'utilisateurs ?"

    La question n'a rien de théorique. Herasimchuk l'illustre à deux niveaux : celui des interfaces logicielles, souvent conçues pour ceux qui les découvrent plutôt que ceux qui devront ensuite les utiliser chaque jour ; et plus largement, au travers d'une réflexion qui relie la simplification générale et les risques globaux : "En rendant les choses si faciles à utiliser, à faire, à digérer et à traiter, nous jouons au plus fin avec DarwinDarwin et nous trichons avec Mère Nature, en obtenant tout ce que nous voulons sans penser au coût, pour nous ou pour notre planète."

    Dans deux billets parus sur son blog, "Créer des utilisateurs passionnés", Kathy Sierra aborde la même question sous un autre angle : "Il est possible de rendre quelque chose si facile à utiliser qu'elle en perd sa valeur. Là où les gens deviennent passionnés, il y a toujours une forme de défi permanent. Quelque chose en quoi les utilisateurs peuvent s'améliorer. Une chance de s'améliorer." Cela ne signifie pas qu'il faut rendre les interfaces compliquées, mais qu'un produit doit pouvoir impliquer son utilisateur dans un processus d'apprentissage : "La clé pour inspirer la passion est de fournir quelque chose qu'il vaille le coup d'apprendre - et les moyens de l'apprendre."

    Cas pratique, encore : Kathy Sierra s'intéresse à la "traine" que certains produits laissent derrière eux, c'est à dire à leur capacité d'inspirer (et d'autoriser) d'autres innovateurs ou utilisateurs à les transformer, à leur ajouter des compléments, à les améliorer. Exemples : l'iPod, ses périphériques et les sites créés autour de ses usages ; ou encore les logiciels qui publient leurs interfaces de programmation (APIAPI) et autorisent l'ajout de plug-insplug-ins.

    Belle question que celle de la simplicité dans le design de produits numériquesnumériques !