Après une journée de débats sur les directives dites du Paquet Télécom, les eurodéputés ont entériné certaines propositions, qui visent à donner aux FAI le pouvoir et le devoir de surveiller leurs clients. Mais la décision finale sera prise en septembre.

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    La Toile est surveillée... Klipang Torok/ Flickr - Licence Creative Common (by-nc-sa 2.0)

    La Toile est surveillée... Klipang Torok/ Flickr - Licence Creative Common (by-nc-sa 2.0)

    Ensemble de directives destinées à adapter le marché des télécommunications à l'extension d'Internet, le Paquet Télécom était débattu hier lundi par le Parlement européen. Il s'agissait d'étudier une série d'amendements destinés à finaliser cette réglementation qui sera mise en place en 2010. Mais les discussions, laborieuses, n'ont pas encore complètement abouti et le texte final sera adopté à la rentrée parlementaire, le 2 septembre.

    Les enjeux sont énormes, à la fois politiques, financiers mais aussi démocratiques. Les acteurs en sont les fournisseurs d'accès à Internet (FAI), les gouvernements, les organismes de régulation des télécommunications, les industriels d'Internet (comme les maisons de disques), les auteurs d'œuvres  et les internautes...

    Ces derniers s'étaient fortement mobilisés ces jours derniers et, à l'appel d'associations, ont bombardé les eurodéputés de mails leur demandant de refuser certains amendements. Les motifs de la discorde sont la « riposte graduée », la surveillance des échanges par les FAI et plus généralement le contrôle du contenu à l'échelon européen. Ces idées récentes vont au-delà des principes de départ de ce paquet télécom qui entendait surtout empêcher le piratage et réguler la jungle d'Internet.

    Contre le piratage, l'idée de la riposte graduée est défendue par la France et les mauvaises langues accusent Paris de tenter de profiter de la présidence française de l'Europe pour faire passer ce procédé qui a les faveurs du gouvernement actuel. L'idée consiste à confier au FAI le rôle d'une sorte de police municipale qui devrait organiser la surveillance de leurs clients, constater les infractions, signaler au contrevenant qu'il est repéré, puis à lui couper l'accès à certains sites ou à des réseaux de peer-to-peer.

    Bientôt des euromouchards ?

    L'idée fait bondir Monica Horten, ancienne journaliste spécialiste des télécommunications et qui prépare une thèse sur ce thème à l'université de Westminster. Dans un extrait de son travail (disponible en PDF sur le site de La quadrature du Net), elle détaille une analogieanalogie avec les sociétés d'autoroutes, qui, comme les FAI, gèrent un réseau servant au transport. Ces entreprises « devraient alors comptabiliser les couleurscouleurs des véhicules roulant sur leurs routes, arrêter les voituresvoitures au hasard et vérifier qu'il ne s'y trouve pas de contenu sous copyright ». Guy Bono, un député français (PSPS), estime que l'on « est en train de créer les conditions d'une dérive sécuritaire de l'Internet. Certains amendements visent à faire des intermédiaires techniques de véritables auxiliaires de police privée ».

    Les ayant-droit, eux, veulent mieux protéger leurs œuvres et les distributeurs de musique et de films entendent bien faire entendre leur voix. Quant aux politiques, certains eurodéputés dénoncent l'alignement des organismes de régulation des télécommunications sur les désirs des industriels du Web. D'autres, qui peuvent être les mêmes, demandent un niveau de contrôle supplémentaire effectuée par la Commission européenne (c'est le sujet de l'amendement proposé par Malcolm Harbour, britannique du Parti conservateur).

    Pour donner à ces contrôleurs un moyen d'action, l'utilisation de logiciels espionslogiciels espions (ou spywares) ciblés vers les contrevenants est clairement évoquée. Un autre amendement, déposé par Syed Kamall (lui aussi du British Conservative Party), vise à autoriser, dans certains cas, le contrôle des données échangées, à l'insu des internautes surveillés.

    Le détail de ces amendements est encore en discussion et les décisions définitives seront arrêtées lors de la séance plénière du parlement européen à la rentrée.