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    Les visiteurs venus quelques milliers d'années plus tard ont vraisemblablement perçu les mains négatives comme le témoignage d'une magie ancienne et dangereuse, car un bon nombre ont été détruites par le bris des draperiesdraperies stalagmitiques sur lesquelles elles se trouvaient, ou marquées par la surcharge de points ou de traits peints, ou de traits multiples rageusement gravés destinés à les oblitérer.

    Tête de félin - Phase 2. © Jean Clottes - Tous droits réservés
    Tête de félin - Phase 2. © Jean Clottes - Tous droits réservés

    Phase 2 : peintures et gravures animales

    C'est de la Phase 2 que datent la majorité des peintures et des gravures animales. Une centaine fut répertoriée lors de nos premiers travaux. Actuellement, nous en avons cent-soixante dix-sept. 

    Les chevaux dominent, un peu plus du tiers du total. Ils sont suivis des bouquetinsbouquetins et des chamoischamois, des bovinés et des cervidés. Une tête de félinfélin, une antilopeantilope saïgasaïga et plusieurs animaux indéterminés ou composites complètent le lot de la faunefaune terrestre.

    L'influence du milieu marin sur les parois de la grotte Cosquer

    Il s'y ajoute des animaux marins, la plus grande originalité de la Grotte Cosquer. Parmi eux, ont été reconnus neuf phoques gravés et trois pingouins peints en noir. Ces derniers, bien reconnaissables par des spécialistes, représentent le Grand Pingouin, espèceespèce massacrée par les marins et les pêcheurs jusqu'au milieu du XIXe siècle où elle disparut. Ce sont les seules figurations de cette espèce indiscutablement attestées dans l'art préhistorique. Quelques figures noires mystérieuses pourraient être des médusesméduses ou des poulpespoulpes, mais sans certitude. Quoi qu'il en soit, l'influence du milieu marin sur l'iconographie est forte. Nous avons par la suite identifié plusieurs poissonspoissons. Même si la faune figurée sur les parois ne reproduisait pas à l'identique le milieu environnant, même si elle était, ce qui est des plus vraisemblables, le support de mythes et de rites magico-religieux, la preuve est apportée que ce milieu exerçait une influence notable sur le choix des thèmes.

    Le bouquetin gravé Bq4, suivi du phoque. © Jean Clottes - Tous droits réservés 
    Le bouquetin gravé Bq4, suivi du phoque. © Jean Clottes - Tous droits réservés 

    À ce bestiaire s'ajoutaient aussi des signes géométriques, rectangles, zig-zags, signes en forme de sagaies sur les animaux, qui abondent dans la grotte Cosquer. En tout, nous avons répertorié plus de deux cents signes géométriques. L'un des plus importants, reconnu après la parution de notre premier livre, est ce que l'on appelle un signe de type PlacardPlacard, constitué par un corps horizontal fait de deux traits parallèles, surmonté par un appendice vertical en cheminéecheminée et terminé de chaque côté par un autre appendice dirigé vers le bas. Son importance vient de sa présence dans les deux cavernes du Lot citées (Cougnac, Pech-Merle), ainsi que dans la grotte du Placard, en Charente, pendant le Solutréen (plus ou moins vers 20.000 BP). Nous avons donc là la preuve de contacts à longue distance et d'influences réciproques dans le domaine symbolique et religieux.

    L'un des thèmes les plus remarquables est celui de « l'Homme tué », un humain assez schématique mais bien reconnaissable à sa silhouette et à son bras terminé par une main caractéristique, surchargé par une arme barbelée. L'homme est figuré sur le dosdos, les jambes en l'air dans la position d'un animal mort. Il a une tête de phoque avec les moustachesmoustaches caractéristiques. Il s'agit donc d'un être composite, comme on en connaît ailleurs (dans la Scène du Puits de Lascaux, par exemple). Le thème de l'homme criblé de traits existe d'ailleurs à une époque plus ou moins contemporaine de la seconde période de la Grotte Cosquer, dans deux cavernes du Lot, Pech-Merle et Cougnac.

    L'Homme tué. © Jean Clottes - Tous droits réservés
    L'Homme tué. © Jean Clottes - Tous droits réservés

    Parmi les thèmes, les représentations sexuelles occupent une place non négligeable. Nous avons découvert, entre autres, une gravure très réaliste de phallus humain avec les testiculestesticules et plusieurs creux de la paroi cernés de noir pour évoquer des vulvesvulves.

    Signe géométrique en chevron. Le chevron de droite évoque la représentation d'un sexe féminin. © Jean Clottes - Tous droits réservés 
    Signe géométrique en chevron. Le chevron de droite évoque la représentation d'un sexe féminin. © Jean Clottes - Tous droits réservés 

    L'étude des techniques stylistiques et des procédés utilisés pour la représentation des animaux permet des rapprochements avec l'art de grottes contemporaines. Les plus probants se font avec Ebbou dans l'Ardèche et le Parpalló en Espagne.