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    Une révolution technologique

    Une révolution technologique

    La question de l'existence éventuelle des ordinateurs quantiques émergea naturellement de la miniaturisation grandissante des composants électroniques. Dès les années 1970, il avait été compris que si elle continuait telle quelle, cette évolution allait mener à des composants de tailles atomiques, lesquels seraient entièrement sujets aux lois de la physique quantique. En 1982, le prix Nobel de physique Richard FeynmanRichard Feynman dynamisa cette réflexion restée auparavant assez abstraite et peu approfondie lorsqu'il imagina un modèle théorique illustrant comment un système quantique pourrait être utilisé pour faire des calculs. Rapidement, en 1985, David Deutsch de l'Université de Oxford, montra que de manière plus générale, les idées de Feynman pouvaient mener à un ordinateur quantique, un ordinateur qui effectuerait n'importe quelle tâche, mais serait capable de tirer avantage des propriétés quantiques de la matière, principalement du principe de superposition des états. Plus important pour la recherche en physique, Deutsch démontra qu'en principe un ordinateur quantique serait capable de modéliser parfaitement n'importe quel processus physique, ce qui est impossible avec un ordinateur usuel reposant sur la physique classique. Dans un premier temps les gens commencèrent donc à se mettre en quête de problèmes simples mais que seul un ordinateur quantique pourrait résoudre.

    Chercheurs australiens développant la nouvelle génération d'ordinateur quantique. Imbrication quantique et qubit font à présent partie de leur nouveau langage informatique. <br />&copy; ANU/RSPhysSE - Tous droits de reproduction interdit

    Chercheurs australiens développant la nouvelle génération d'ordinateur quantique. Imbrication quantique et qubit font à présent partie de leur nouveau langage informatique.
    © ANU/RSPhysSE - Tous droits de reproduction interdit

    Cette recherche s'avéra plus difficile que prévu, et il fallut attendre le milieu des années 90 pour qu'un chercheur des laboratoires Bell - l'institut qui rassemble le plus de prix Nobel au mètre carré -, Peter Shor, invente des opérations mathématiques élémentaires propres aux ordinateurs quantiques et les applique pour créer un algorithme quantique de factorisation.

    Exemple de factorisation : 120 = 5x4x3x2.

    Quel est le rapport entre la factorisation et l'ordinateur quantique, demanderez-vous ? La cryptographiecryptographie ! Grâce à cet algorithme, un ordinateur quantique est en mesure de casser les codes d'encryption les plus complexes en quelques secondes !

    Rappelons brièvement l'utilité des clés dans le processus de cryptage/décryptage. Généralement un message secret est envoyé sous forme codée, une clé de conversion permettant de traduire le message codé en clair. Cette clé évite de devoir chiffrer et déchiffrer le message car l'émetteur et le destinataire disposent chacun d'une clé générant son propre système d'encryptage. Cette protection empêche même les concepteurs du programme d'encryptage de déchiffrer le message codé.

    La sécurité d'un message codé dépend du nombre de clés. Un système à clé unique par exemple permet de "casser" un système, mais en général il va essayer systématiquement toutes les clés possibles sur le message à déchiffer jusqu'à pouvoir le lire.

    Certains systèmes telle la substitution monoalphabétique simple, dispose d'un nombre de clés gigantesque : 26! permutations possibles des lettres de l'alphabet, soit environ 4x1026 possibilités. Le succès est donc loin d'être garanti dans un temps relativement court. Pour remédier à ce problème on peut utiliser des variations de fréquencefréquence des lettres dans les différentes langues naturelles, ce qui permet d'aboutir à des systèmes de cryptage disposant d'un nombre de clés réduit mais qui s'avèrent souvent beaucoup plus sûrs.

    Devant ce défi qui intéresse autant les majors de l'informatique que les services d'espionnage ou l'armée, des centaines de chercheurs aux quatre coins du monde se sont donnés pour objectif de construire le premier ordinateur quantique d'ici quelques années.

    Certains très optimistes avancèrent même la date de 2008 voire 2020. Il est toutefois peu probable que nous verrons des ordinateurs quantiques au quotidien avant plusieurs décennies... Quoiqu'il en soit, la compétition est ouverte, avis aux chercheurs !