Il aura fallu un siècle pour que l'on comprenne comment une météorite gigantesque a pu creuser le plus célèbre cratère du monde en laissant si peu de roche fusionnée.

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    Vue du cratère Barringer.

    Vue du cratère Barringer.

    En 1903, Daniel Moreau Barringer, un ingénieur des mines de Princeton fait l'acquisition d'un site remarquable situé parmi les étendues désolées de l'Arizona. Persuadé que le sous-sol contient de nombreuses ressources métallifères, il investit un capital important et entame une succession de forages. Il meurt en 1929, ruiné, faute de n'y avoir pas trouvé la météorite ferreuse qu'il convoitait.

    Pourtant, il s'agissait bien d'un cratère météoritique qui aurait pu faire la fortune du malheureux ingénieur, si la météorite en question n'avait pas été fragmentée et éparpillée par l'impact. Mais la compréhension théorique de la formation des cratères météoritiques était à l'époque encore incomplète, et Barringer, dans son malheur, a eu le mérite d'y contribuer tout en démontrant que le Meteor Crater était bel et bien le résultat d'une météorite. Le Meteor Crater, ou cratère Barringercratère Barringer, reste ainsi à ce jour le cratère météoritique le plus étudié et visité au monde. D'une profondeur de 180 mètres pour 1200 mètres de diamètre, il serait assez large pour abriter une vingtaine de terrains de football. Quarante ans après la fin de son exploitation, le site servit même de base d'entraînement aux spationautes de la mission Apollo 11Apollo 11, en raison de l'ambiance qui y règne, proche du dépouillement extrême des paysages sélénites.

    Toutefois, le Meteor Crater est également célèbre dans les milieux scientifiques pour être resté jusqu'à très récemment une sorte de mystère. Ainsi, étant donné le scénario de sa naissance et compte tenu des autres cratères météoritiques plus petits qui ont été passés au peigne fin, on s'attendait à y trouver de la roche fondue en quantité bien plus importante. Finalement, après de nombreuses années, il semblerait que ce mystère soit tombé le 10 mars, avec la publication, dans la revue Nature, des travaux de deux scientifiques, Jay Melosh (Université de l'Arizona) et Gareth Collins (Imperial College, Londres). Ceux-ci ont revisité l'histoire jusqu'alors admise du cratère et réussi à expliquer les raisons pour lesquelles si peu de roche fusionnée y est observée, mais sans faire appel aux complexes hypothèses passées.

    On pensait auparavant que l'impact qui s'était produit il y a 49 000 ans, résultait de la collision entre la Terre et une météorite ferreuse de plus de 300 000 tonnes pour 45 m de diamètre, et ce à une vitesse de 20 km/s. Or si tel avait été le cas, l'énergie dégagée lors de l'impact aurait dû entraîner une fusion mixte de la météorite et du sol impliquant une quantité plus importante de roche.

    L'amélioration principale qu'ont apportée Melosh et Collins à ce modèle est simplement la prise en compte, à l'aide de puissants logicielslogiciels de modélisationmodélisation de la NASANASA, des effets de l'atmosphèreatmosphère sur un corps en mouvementmouvement rapide. Le résultat de leur modèle est sans appel : sous l'effet de frictionsfrictions atmosphériques intenses, la météorite d'une quarantaine de mètres de diamètre s'est en fait fragmentée à plus de 5 km du sol. Le cratère est issu de l'impact du fragment principal, d'un diamètre deux fois moindre, et d'une nuée de roches plus fines. Quant à la vitesse à laquelle s'est produite la collision, elle a été réévaluée à quelques 12 km/s, ce qui explique la faible quantité de roche fondue, bien que l'énergie dégagée reste celle de 2,5 mégatonnes de TNT, soit plus de 150 bombes d'Hiroshima.