Grâce à la sonde Rosetta qui escorte le noyau de la comète Tchouri depuis août 2014, les chercheurs ont observé ses changements de couleur et de luminosité à mesure qu’elle se rapprochait du Soleil. Peu à peu, son ancienne surface disparaissait, révélant ainsi de nouveaux matériaux, plus riches en glaces. L’astre bilobé est ainsi devenu de plus en plus bleu.

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    Depuis son arrivée autour de la comète 67P/Tchouryumov-Gerasimenko alias Tchouri en août 2014 jusqu'au mois de novembre suivant, la sonde RosettaRosetta et plus particulièrement son spectromètre imageur Virtis (Visible and InfraRed Thermal Imaging Spectrometer) ont commencé à détecter des changements sur les parties les plus exposées au Soleil du noyau, soit principalement son hémisphère nordhémisphère nord et les régions équatoriales.

    Dans un nouvel article publié dans la revue Icarus, des chercheurs font le point sur les découvertes de cette première période d'investigation - jusqu'à novembre 2014 -, lorsque le vaisseau se trouvait entre 100 et 10 km du noyau cométaire. Tchouri passait alors d'environ 542 millions de kilomètres du Soleil à 438 millions sur son orbite de 6 ans et demi.

    Les trois premiers mois d’observation de Tchouri par Rosetta sont marqués en rouge. La comète était alors entre 542 et 438 millions de kilomètres du Soleil. © Esa, Rosetta, Virtis, INAF-IAPS, Observatoire de Paris-Lesia, DLR, G. Filacchione <em>et al.</em> (2016)

    Les trois premiers mois d’observation de Tchouri par Rosetta sont marqués en rouge. La comète était alors entre 542 et 438 millions de kilomètres du Soleil. © Esa, Rosetta, Virtis, INAF-IAPS, Observatoire de Paris-Lesia, DLR, G. Filacchione et al. (2016)

    Une surface de plus en plus brillante

    L'instrument Virtis a surveillé dans une large gamme de longueurs d'onde visibles et infrarouges l'évolution de la lumière réfléchielumière réfléchie par la surface de l'astreastre, de manière à indiquer les changements subtils dans la composition de sa couche la plus externe. Souvenons-nous qu'à son arrivée, Rosetta découvrait un corps bilobé aussi obscur que le charboncharbon, qui reflétait environ 6 % de la totalité de la lumière qui lui parvenait. La majorité de la surface était alors recouverte d'une couche de poussière sombre et sèche, faite d'un mélange de substances minérales et molécules organiques.

    Les régions tantôt plus claires, tantôt plus ténébreuses, trahissent les différences dans leur composition. Ainsi, la majorité de la surface est-elle légèrement rougie par des matériaux riches en substances organiques, et plus bleutée lorsque les rares matériaux sont riches en glace.

    Même lors du premier rendez-vous de Rosetta avec la comètecomète, loin du Soleil, les glaces cachées sous la surface commençaient déjà à se réchauffer doucement, à se sublimer en gazgaz et à s'échapper en soulevant une partie de la poussière, contribuant ainsi à la formation de la comacoma (chevelure) et de la queue caractéristiques de la comète.

    Virtis a alors démontré que les couches de poussière plus anciennes étaient doucement éjectées, exposant petit à petit d'autres matériaux. Cette nouvelle surface était à la fois plus réfléchissante, ce qui rendait la comète plus brillante, et plus riche en glace, donc plus bleue.

    La luminositéluminosité de la comète a ainsi augmenté en moyenne d'environ 34 %. Dans la région d'Imhotep sur le plus grand lobe, elle est passée de 6,4 à 9,7 % lors des trois premiers mois d'observation.

    Les régions plus riches en poussière sombre et sèche apparaissent davantage rouge sur les cartes créées avec le spectromètre imageur Virtis. Avec l’activité qui augmente, les glaces sont plus exposées et la surface devient de plus en plus bleutée. © Esa, Rosetta, Virtis, INAF-IAPS, Observatoire de Paris-Lesia, DLR, G. Filacchione <em>et al.</em> (2016)

    Les régions plus riches en poussière sombre et sèche apparaissent davantage rouge sur les cartes créées avec le spectromètre imageur Virtis. Avec l’activité qui augmente, les glaces sont plus exposées et la surface devient de plus en plus bleutée. © Esa, Rosetta, Virtis, INAF-IAPS, Observatoire de Paris-Lesia, DLR, G. Filacchione et al. (2016)

    Une tendance qui s’est poursuivie les mois suivants

    « La tendance globale semble être une augmentation de la glace d’eau au sein des couches de surfacecouches de surface de la comète, ce qui crée des changements dans les signatures spectrales observées, explique Gianrico Filacchione, l'auteur principal de l'étude. De ce point de vue, c'est comme si la comète changeait de couleurcouleur sous nos yeuxyeux, continue-t-il. Cette évolution est une conséquence directe de l'activité qui se produit à la surface de la comète et juste en dessous. La disparition d'une partie de la couche de poussière suite au début d'une activité gazeuse est la cause probable de l'abondance croissante de glace d'eau à la surface. »

    « Les propriétés de la surface sont très dynamiques, elles changent avec la distance par rapport au Soleil et avec le niveau d'activité de la comète, ajoute Fabrizio Capaccioni, chercheur principal de Virtis. Nous avons commencé à analyser les données obtenues par la suite, et nous pouvons déjà voir que la tendance se poursuit dans les observations effectuées après novembre 2014. »

    « L'évolution des propriétés de la surface conjointement avec l'activité n'a encore jamais été observée par une mission cométaire, et il s'agit de l'un des objectifs scientifiques majeurs de la mission Rosetta, rappelle Matt Taylor, chercheur de la mission. C'est formidable que des articles scientifiques sur ce sujet soient publiés, et nous sommes impatients de voir l'évolution sur l'ensemble de la mission. »