Après la déclaration chinoise d'une arrivée sur la Lune à l'horizon 2029, la Nasa a dévoilé son dernier rapport sur l'analyse des données de la mission Artemis I. Si quelques problèmes mineurs ont été identifiés, ici et là, et qu'une attention particulière est à porter sur le bouclier thermique d'Orion, la Nasa est confiante pour réaliser Artemis II à la fin de l'année 2024.


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    Dans son dernier rapport sur l'analyse de la mission Artemis I, la Nasa a indiqué n'avoir « révélé aucun problème susceptible de retarder le vol habité Artemis II, dont le lancement est prévu à la fin de l'année prochaine ». Lors d'une réunion d'information organisée le 7 mars, les responsables de la Nasa ont déclaré que l'analyse des données provenant du lanceur SLS (Space Launch System), du véhicule spatial OrionOrion et des systèmes au sol n'avait révélé que des problèmes mineurs susceptibles d'être résolus avant Artemis II.

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    Le problème le plus important, qui n'avait pas été révélé auparavant, concerne le bouclier thermique d'Orion. Howard Hu, responsable du programme Orion à la Nasa, a déclaré que le « matériau du bouclier thermique s'était dégradé différemment de ce que les ingénieurs avaient prévu lors des essais au sol et des modèles informatiques ». Cette dégradation a été plus « importante que ce à quoi nous nous attendions », a-t-il ajouté. Les ingénieurs commencent tout juste à analyser en détail le bouclier thermique afin de déterminer pourquoi il s'est comporté différemment de ce qui était prévu mais, tient-il à souligner, cette « différence de performance ne pose pas de problème pour la sécurité de la capsule d'autant plus que nous disposons d'une marge importante et que les limites de performance du bouclier n'ont pas été atteintes ». Du point de vue de la marge, il est certain que « l'Avcoat a été plus endommagé que nous ne l'avions prévu ».

    Au Centre spatial Kennedy, le bouclier thermique de la capsule Orion d'Artemis I est inspecté minutieusement. © Nasa, Skip Williams
    Au Centre spatial Kennedy, le bouclier thermique de la capsule Orion d'Artemis I est inspecté minutieusement. © Nasa, Skip Williams

    Le bouclier thermique plus fortement sollicité que prévu

    Pour comprendre de quoi il est question, il faut savoir que le bouclier thermique de la capsule Orion est de type ablatif, c'est-à-dire qu'il perd de la matière à mesure qu'il brûle, s'amincissant progressivement durant la descente. Il a été préféré au bouclier radiatif (qui, lui, conserve son épaisseur) car il est possible de le surdimensionner plus facilement pour tenir compte d'une certaine marge d'erreur. Il suffit en effet d'augmenter son épaisseur pour absorber une plus grande quantité de chaleur. Un bouclier radiatif, en revanche, n'accepte aucune marge d'erreur. Quand la température maximale pour laquelle il a été conçu est atteinte, le matériau ne remplit plus son rôle de protection et c'est la catastrophe assurée. Il est construit en « Avcoat ablator », un matériau utilisé avec succès sur les capsules ApolloApollo et sur certaines parties de la navette spatiale lors de ses premiers vols. Le choix s'est fait au détriment de huit autres matériaux, dont le Pica qui a également fait ses preuves en vol.

    Concernant le module de service du véhicule Orion, fourni par Airbus, quelques problèmes mineurs ont également été listés, mais rien ne remet en cause la conception du module.

    Au sol, rien de préjudiciable est à signaler. Il y a bien quelques dommages subis lors du décollage notamment des conduites pneumatiquespneumatiques corrodées par les résidus des propulseurspropulseurs à poudre ou encore un problème avec un système d'azoteazote gazeux qui avait retardé l'arrivée de l'eau destinée à éliminer ces résidus. Les ascenseursascenseurs de la tour de lancement mobilemobile ont également été mis hors service, mais l'un d'entre eux a été remis en fonction.

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    Artemis III en 2026

    La Nasa et ses partenaires industriels, dont Airbus, sont engagés dans la préparation d'Artemis II dont le lancement est prévu vers la fin de l'année 2024, mais aura lieu plus certainement en 2025. La constructionconstruction des différents éléments du lanceur SLS est bien avancée. L'étage principal du lanceur, actuellement dans les installations du centre Michoud de la Nasa, en Louisiane, sera transféré cet été au Centre spatial Kennedy. Toujours cet été, le module de service sera intégré au véhicule Orion et d'ici le premier trimestre 2024, Orion sera installé à bord du lanceur.

    Concernant la mission Artemis III avec le retour des Américains sur la LuneLune, la Nasa la prévoit au mieux en 2026, environ un an après Artemis II. Mais, et c'est nouveau, dans sa communication, elle souligne que ce calendrier dépendra de l'avancement des différents autres programmes associés au retour des Américains sur la Lune dont l'atterrisseur lunaire Starship de SpaceXSpaceX et les combinaisons spatiales qui seront fournies par Axiom Space. Ces deux programmes sont très en retard de sorte qu'envisager Artemis III en 2026 est très, très optimiste.


    La Nasa dévoile ses premières conclusions sur la mission Artemis I

    Article de Daniel ChrétienDaniel Chrétien publié le 30/01/2023

    Bon présage pour le programme Artemis, la mégafusée lunaire SLS, Space Launch System, qui a décollé pour la première fois le 16 novembre 2022, semble avoir été à la hauteur des attentes, voire mieux selon les premières conclusions de l'analyse des données de vol.

    Le 16 novembre était un jour historique dans le programme spatial américain. Tout aurait pu s'arrêter là si le Space Launch System (SLS) avait failli à sa mission : décoller et mettre en orbiteorbite le vaisseau Orion. Mais, sous nos yeux ébahis, il avait décollé avec succès et la mission Artemis I s'est bien déroulée.

    Une fois le vaisseau Orion revenu sur Terre le 11 décembre, la mission Artemis I était terminée. Pour rappel, cette mission était à vide, inhabitée avec juste des mannequins porteurs de diverses expériences. La Nasa n'allait pas risquer la vie de ses astronautesastronautes à bord d'un vaisseau et d'un lanceur hors normes qui n'avaient encore jamais volé. Le but d'Artemis I était de qualifier le tout, et les données semblent aller dans la bonne direction.

    Décollage du SLS mercredi 16 novembre 2022. Le bloc central emportait avec lui plus de 1 000 capteurs ! © Nasa, Bill Ingalls
    Décollage du SLS mercredi 16 novembre 2022. Le bloc central emportait avec lui plus de 1 000 capteurs ! © Nasa, Bill Ingalls

    Un travail de fourmi pour la sécurité des astronautes

    On pourra donner le feufeu vert à la première mission habitée, Artemis II, seulement si les données de vol le permettent. En ce qui concerne le SLS, les équipes ont recueilli pas moins de 4 térabytes de données et d'images vidéo prises par différentes caméras embarquées au cours du vol et des phases de pré-lancement. À cela s'ajoutent près de 31 térabytes d'images prises depuis le sol ou les airsairs !

    Ces données de vol complètent les très nombreuses données obtenues au cours des différents tests au sol et des simulations. Même si les proportions du SLS sont plutôt uniques, les équipe savaient plutôt bien quoi en attendre. Toutefois, les données de vol étaient indispensables pour prédire le comportement du SLS au cours de certaines phases du vol, comme la séparationséparation des boostersboosters. Pour témoigner et quantifier chaque événement au cours du vol, des caméras embarquées ainsi que divers capteurscapteurs étaient stratégiquement positionnés à plusieurs endroits du lanceur.

    Les ingénieurs de la Nasa ont également analysé les températures et les sons de la mégafusée enregistrés juste après le décollage. Les données ont servi à certifier que les moteurs RS-25 (issus de différentes navettes spatiales) du bloc central fourni par Boeing fonctionnaient comme prévu. La poussée fournie était celle attendue à 0,5 % près. Les pressionspressions et températures internes collaient avec les prédictions à 2 % près.

    Quelle flamme ! La base du bloc central était recouverte d'un bouclier thermique pour le protéger de la chaleur au décollage, qui atteignait jusqu'à 1 760 °C, de quoi transformer le sable en verre ! © John Kraus
    Quelle flamme ! La base du bloc central était recouverte d'un bouclier thermique pour le protéger de la chaleur au décollage, qui atteignait jusqu'à 1 760 °C, de quoi transformer le sable en verre ! © John Kraus

    C'est positif pour Artemis II !

    Le bloc central du SLS a fonctionné correctement tout au long de son vol et la mise en orbite de l'étage supérieur ICPS et du vaisseau Orion s'est déroulée avec succès. L'orbite de transfertorbite de transfert, sur laquelle l'ICPS et Orion étaient placés, avait une petite erreur de seulement trois kilomètres, ce qui reste dans les marges acceptables. Plus tard dans le vol, l'injection en orbite translunaire était « quasiment parfaite ».

    On peut donc dire que le SLS a fonctionné comme attendu, voire mieux. Selon la Nasa, la mégafusée a été « conforme voire meilleure aux attentes de performance ». Le test semble réussi, mais on précise que ces conclusions publiées par la Nasa le 27 janvier sont préliminaires et que l'analyse des données n'est pas terminée. C'est seulement le rapport final qui statuera.

    Inspection du bouclier thermique d'Orion. Le bouclier est crucial pour la sécurité des astronautes lors de la rentrée atmosphérique. La Nasa ne tolérera aucune défaillance. © Nasa, Skip Williams
    Inspection du bouclier thermique d'Orion. Le bouclier est crucial pour la sécurité des astronautes lors de la rentrée atmosphérique. La Nasa ne tolérera aucune défaillance. © Nasa, Skip Williams

    Le feu vert pour Artemis II dépend aussi du vaisseau Orion, qui était aussi testé avec Artemis I. Depuis son amerrissage le 11 décembre dernier, la capsule habitée du vaisseau a été transportée au Kennedy Space CenterKennedy Space Center à Cap CanaveralCap Canaveral pour y être analysée.

    En attendant, la Nasa se prépare pour Artemis II. Les deux modules du vaisseau Orion sont en cours d'intégration au Kennedy Space Center, et le pas de tir mobile (crawler) est en train d’être amélioré. Dans les prochains mois, la Nasa annoncera l'équipage sélectionné. Artemis II sera la première mission habitée et se déroulera autour de notre satellite naturel à partir de 2024, Artemis III sera la mission du retour des astronautes à la surface.

    Intégration des tuyères des moteurs du module de service du vaisseau Orion d'Artemis II au <em>Kennedy Space Center</em>. © Nasa
    Intégration des tuyères des moteurs du module de service du vaisseau Orion d'Artemis II au Kennedy Space Center. © Nasa