Une équipe de physiciens dirigée par Ulrich Bockelmann, du Laboratoire Pierre Aigrain (Ecole Normale Supérieure - CNRS - Universités Paris 6 et 7), vient de démontrer qu'il était possible de réaliser une détection purement électronique de l'ADN, grâce à des réseaux de transistors en silicium. Ce mode de détection utilise la charge intrinsèque de la molécule biologique et, par conséquent, ne nécessite aucun marquage (fluorophores, isotopes radioactifs...). Les chercheurs ont ainsi réalisé un test de détection de l'une des mutations pathogènes les plus fréquentes du génome humain. Ces travaux sont publiés dans la revue Applied Physics Letters datée du 1 mars 2004.

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    Le principe de détection de molécules chargées par un transistor à effet de champ (FET : "field effect transistor") est connu depuis une trentaine d'années. Jusqu'à présent, la détection de biomolécules était étudiée avec un FET unique. La mesure différentielle introduite dans ce travail utilise un réseau de FETs (une centaine de transistors ayant chacun quelques micromètresmicromètres de surface active), ce qui permet d'améliorer sensiblement les performances de détection. Les chercheurs ont travaillé en collaboration avec l'institut Max PlanckMax Planck de biochimie de Martinsried en Allemagne (équipe de P.Fromherz) pour préparer des réseaux de FETs, utilisant une technologie standard de microélectronique du silicium. Des échantillons contenant des biomolécules sont déposés sur ces réseaux de FETs. On mesure ensuite la caractéristique électronique de chaque transistor du réseau : quand ils sont en contact avec les biomolécules, cette caractéristique se trouve décalée en fonction de la charge de la biomolécule : une molécule chargée positivement induit un décalage positif, une molécule chargée négativement, induit un décalage négatif. Dans certaines conditions, l'ADNADN, chargé négativement en milieu aqueuxaqueux, induit ainsi un décalage négatif.

    Une collaboration avec des biologistes de l'institut Pasteur (équipe de C.Petit), a permis d'appliquer cette mesure électronique à la détection d'une mutation du chromosomechromosome 13. Cette mutation, reliée à la surdité héréditaire de l'enfant, est l'une des plus fréquentes mutations pathogènespathogènes du génomegénome humain. Une réaction d'amplification enzymologique spécifique donne un produit de réaction uniquement en présence de la mutation génomiquegénomique. Ce produit est ensuite détecté par le réseau de FETs. Cette mesure peut être réalisée simultanément pour plusieurs patients.

    La détection électronique par réseau de FETs réunit plusieurs atouts pour des applications potentielles : détection des biomolécules sans marquage, miniaturisation à l'échelle du micromètre, analyse d'un très grand nombre d'échantillons en parallèle, création de dispositifs de type "laboratoire sur puce".