Un petit os de corbeau finement gravé il y a environ 40.000 ans a été étudié dans tous ses détails par une équipe franco-ukrainienne. L'analyse nous montre l'intimité des gestes de l'Homme de Néandertal et son souci de la géométrie…

au sommaire


    En Crimée, une équipe franco-ukrainienne d'archéologues a étudié de près un os découvert dans la grotte Zaskalnaya VI, qui a connu une longue occupation humaine durant le Paléolithique. Les fouilles y ont mis au jour des restes d'Hommes de Néandertal dans la couche stratigraphique 3, laquelle conservait aussi un os fin gravé d'encoches, daté de 38.000 à 43.000 ans.

    Dans ce fossilefossile, les archéologues ont reconnu un radius de Grand corbeau (Corvus corax), donc un os de l'aile. Une fois les concrétionsconcrétions retirées sont apparues sept entailles perpendiculaires à l'axe de l'os. Surtout, elles sont bien parallèles et ne peuvent correspondre à des marques de boucherie.

    ©

    ©

    Un souci esthétique chez les Néandertaliens

    Leur analyse montre qu'elles ont été réalisées à l'aide d'un outil en pierre, dans un mouvement de va-et-vient. Mieux, comme ils l'expliquent dans l'article publié dans la revue Plos One, les auteurs concluent que deux entailles ont été ajoutées après les précédentes, avec un angle très légèrement différent, dans des espaces plus grands, comme pour parfaire la régularité.

    Comme ils le font remarquer, ce n'est pas la première fois que des traces attribuées à NéandertalNéandertal sont retrouvées sur des restes d'oiseaux. Des marques nettes ont été repérées sur des serres de rapaces et la collection d'objets décorés retrouvée dans la grotte d'Arcy-sur-Cure (-36.000 à -45.000 ans) est bien de la main d'Homo neanderthalensis.

    Voir aussi

    L'Homme de Néandertal était aussi bijoutier

    ©

    ©

    Quel symbolisme chez Néandertal ?

    Les auteurs ont comparé avec 17 réalisations de ce genre (gravure sur structure tubulaire) provenant de sept sites magdaléniens. Dans la plupart des cas, l'objet gravé était un os d'oiseauoiseau et les encoches étaient similaires, parallèles entre elles et perpendiculaires à l'axe, avec un espacement semblable.

    Comment doit-on s'y prendre pour produire ces marques ? Les scientifiques du laboratoire Pacea (lire leur communiqué), de l'université de Bordeaux, coauteurs de l'étude, ont demandé à des expérimentateurs bénévoles de tailler des encoches régulièrement espacées dans des os de pintade. Curieusement, la distance entre les marques était très proche de celle de l'os de corbeau gravé il y a 40.000 ans...

    Les auteurs concluent de leur étude que cette gravure est bien intentionnelle, et donc assurément pas liée au dépeçage, et réalisée dans un but esthétique plutôt que pratique. L'équipe considère que ces entailles ne font pas de cet os un outil. Des analyses de ce genre sur des objets gravés avec des motifs réguliers ou non, expliquent-ils, pourraient dégager des informations sur l'apparition de signes symboliques chez Néandertal.