La fraude scientifique, heureusement rare, est d’ordinaire assez rapidement détectée. Cela n’a pas été le cas avec plus de 40 publications acceptées dans des journaux prestigieux avec comités de lecture. Un groupe d’étudiants de l’Université d’Ankara en Turquie a en effet réussi à tromper la vigilance des experts pendant plus de 22 mois, et visiblement ils ne sont pas les seuls ! Le scandale secoue le monde raréfié de la physique théorique présent dans la blogosphère.

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    Un exemple de détection de plagiat sur arXiv avec un logiciel (Crédit : Toni Feder)

    Un exemple de détection de plagiat sur arXiv avec un logiciel (Crédit : Toni Feder)

    L'affaire a commencé lorsque, comme le relate le Dr. Ozgur Sarioglu de la Middle East Technical University, plusieurs de ses collègues se sont retrouvés chargés de faire passer une épreuve orale à plusieurs étudiants de niveau master. Parmi ceux-ci se trouvaient les auteurs des plagiats. Connaissant l'extraordinaire production de ces jeunes étudiants brillants, les docteurs Atalay Karasu, Ayse Karasu, et Bayram Tekin furent très surpris de constater que non seulement leurs niveaux de connaissances et de maîtrise de la physique théorique étaient peu compatibles avec leurs accomplissements, mais qu'ils ne possédaient même pas la maîtrise de la langue anglaise suffisante pour avoir écrit les articles publiés dans des revues aussi célèbre que Journal of High Energy Physics.

    Se doutant visiblement de quelque chose, ils ont décidé d'examiner de plus près les dites publications. De façon stupéfiante, ils ne tardèrent pas à réaliser que celles-ci n'étaient qu'une suite de copié-collé pris dans plusieurs articles d'auteurs sérieux, mais peu connus, et à peine améliorés par des calculs élémentaires plus détaillés que dans les publications d'origine. Quelques changements de phrases avaient alors suffi pour passer au travers du processus d'évaluation par des rapporteurs.

    Le président de l'Université lui-même a alors décidé de contacter la maison d'édition de Journal of High Energy Physics afin de demander le retrait des articles. Le célèbre site arXiv, de Paul Ginsparg de l'Université de Cornell, permettant à tout le monde de consulter sur le web les dernières publications en physique, mathématique et astrophysique, a quant à lui déjà retiré les publications des fautifs.

    Une pratique fréquente ?

    Actuellement, près de 20 auteurs coupables de plagiats ont été découverts.

    En fait, depuis l'année dernière, un logiciellogiciel spécialisé dans la détection des plagiats existe sur arXivarXiv. Heureusement, sur 280 000 publications examinées, seules 677 étaient des candidats potentiels et, sur un échantillon de 20, 3 se sont révélées de véritables plagiats. Une petite remarque au passage : le logiciel n'est pas conçu pour détecter l'autoplagiat qui est plus répandu qu'on ne le pense mais qui est, bien évidemment, moins problématique.

    On pourra trouver la liste impressionnante des journaux ayant publié les articles plagiés sur le site de Peter Woit, le critique bien connu, avec Lee Smolin, de la théorie des cordesthéorie des cordes.