Certaines observations semblent indiquer une influence de l’activité solaire sur les taux de désintégrations radioactives des noyaux sur Terre. Si l’effet est réel il devrait probablement être lié aux neutrinos émis par le Soleil. Une équipe du National Institute of Standards and Technology (NIST) américain a testé cette hypothèse... mais n’a détecté aucun effet.

au sommaire


    Depuis quelques années, un groupe de physiciensphysiciens, principalement de l'Université de Purdue, parmi lesquels se trouvent Ephraim Fischbach et Jere Jenkins, pense avoir découvert des variations des taux de désintégrations de certains radioéléments terrestres à l'occasion de fortes éruptions solaires, ou en fonction de la proximité du Soleil avec la Terre. Dans ce dernier cas, les données censées soutenir ces observations proviennent des  laboratoires situés à New York et en Allemagne.

    Si ce phénomène était confirmé, il est de nature à ébranler les datations en archéologie et en géologiegéologie. En effet, la constance dans le temps des taux de désintégration du carbone 14 est au fondement de la méthode de datation développée par Willard Libby en 1949. Elle lui vaudra le prix Nobel de physique en 1960. Toutefois, selon un autre prix Nobel, Emilio Segrè, elle lui aurait été suggérée par Enrico FermiEnrico Fermi à l'occasion d'un séminaire à l'Université de Chicago.

    Depuis les travaux des pionniers de la physique nucléaire qu'étaient Ernest RutherfordErnest Rutherford et Pierre et Marie CurieMarie Curie, les expériences montrent que ni la température ni la pression ni des champs magnétiqueschamps magnétiques ne font changer de façon mesurable les taux de désintégrations de noyaux. C'est pourquoi il est possible de dater différents objets archéologiques et géologiques en y mesurant la quantité d'un isotopeisotope connaissant celle présente à l'origine.

    Le plus connu d'entre eux est le carbone 14, dont la période radioactive est d'environ 5.730 ans. Ainsi, moins il reste de carbone 14 dans le corps momifié d'un pharaon égyptien, plus la date de son décès est ancienne. Si cette période n'était pas constante, le temps mis par les noyaux d'un échantillon de carbone 14 pour diminuer de moitié en nombre (ce qui est la définition de sa période) ne serait pas le même selon l'ancienneté de la constitution de cet échantillon. Cela rendrait incertaines et floues les datations en archéologie.

    Willard Libby dans son laboratoire. Crédit : UC Regents

    Willard Libby dans son laboratoire. Crédit : UC Regents

    Les variations observées seraient à chercher... dans les instruments

    Le problème se poserait aussi pour les isotopes à très longues périodes, nécessaires pour dater des objets plus âgées que le million d'année, comme par exemple l'uraniumuranium 238, dont la période est d'environ 4,5 milliards d'années.

    Cette question ne pouvait donc pas laisser indifférents des chercheurs du National Institute of Standards and Technology (NISTNIST), justement chargé, entre autre, d'établir des étalons de mesures précis pour la physique et la technologie.

    Pour expliquer une corrélation entre le Soleil et les désintégrations radioactives sur Terre, l'hypothèse la plus probable fait intervenir la physique des neutrinosneutrinos. Ces particules sont copieusement émises par le Soleil et on sait qu'elles interviennent dans la radioactivitéradioactivité bêtabêta. Pour tester une éventuelle influence du flux de neutrinos, les chercheurs du NIST ont considéré une sphère et une feuille d'un isotope de l'or, 198Au, contenant toutes deux la même quantité de ce métalmétal.

    Il existe alors une différence dans ces deux géométries entre la probabilité d'interaction d'un neutrino, émis par un isotope se désintégrant, avec un autre noyau d'or. Dans la sphère, les noyaux proches ont plus de chance d'interagir. Cette différence devrait se manifester par un ralentissement du taux de désintégrations radioactives.

    Les physiciens ont surveillé les expériences pendant plusieurs semaines et bien que les flux de neutrinos émis y soient plusieurs fois supérieurs à celui du Soleil sur Terre, aucun effet n'a été observé. 

    Ce résultat accrédite l'idée que les observations précédentes n'étaient dues qu'à l'influence des variations des conditions physiques extérieures sur les instruments de mesures.