Plusieurs théories physiques modifiant la théorie de la gravitation d'Einstein changent la loi d'attraction de Newton à petites distances. En utilisant un flux de neutrons ultrafroids de l'Institut Laue-Langevin (ILL), des physiciens vont peut-être pouvoir observer cette modification.

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    En 1959, le grand cosmologiste et physicienphysicien théoricien Yakov Zeldovitch a prédit que des neutrons ultrafroids devraient être facilement réfléchis par des surfaces métalliques. L'expérience a été réalisée en 1969 à Dubna. Depuis lors, on sait faire de véritables miroirs à neutrons pour diverses expériences de physique. L'une d'elles consiste à observer les niveaux d'énergie qui apparaissent parmi des neutrons en chute libre, mais rebondissant telle une balle sur un miroir à neutrons.

    Pour décrire ces niveaux, il faut appliquer la fameuse équation de Schrödinger à un flux de neutrons ultrafroids injectés entre deux miroirs. En plus de l'état de mouvementmouvement horizontal des neutrons, il apparaît l'analogue des états d'énergie d'un neutron piégé dans la cuvette de potentiel d'un noyau. Tout comme dans le modèle en couches des noyaux introduit en physique pour la première fois par Dmitri Ivanenko, il peut se produire des transitions entre les différents niveaux d'énergie, similaires à celles de l'atomeatome d'hydrogènehydrogène de Bohr.

    Or, les neutrons n'ayant pas de charge, présentant une polarisabilité 10-19 fois plus faible qu'un atome et un moment magnétiquemoment magnétique mille fois plus faible, ils sont particulièrement peu sensibles à des forces électriques de type Van der Waals ou Casimir qui se manifestent à petites distances. Cela en fait donc des outils de choix pour tester des modifications de la loi de la gravitationgravitation à petite échelle. 

    Il se trouve que des expériences de ce genre ont été remises au goût du jour depuis une bonne dizaine d'années car, dans le cadre de certaines extensions du modèle standardmodèle standard, particulièrement dans le cadre de la théorie des supercordes, on peut s'attendre à observer de telles modifications.

    De la spectroscopie de résonance gravitationnelle

    Bien sûr, avec un flux de neutrons ultrafroids en chute libre, la composante principale de la gravitation est celle de la Terre, mais à petites distances des parois constituées des miroirs à neutrons, une attraction supplémentaire générée par la matièrematière des parois est bel et bien présente. En théorie, de très légères modifications des états d'énergie des neutrons rebondissant entre les deux miroirs, du fait d'une modification de la loi de la gravitation, sont peut-être observables. Pour cela, il faut développer un dispositif capable de mesurer ces états d'énergie.

    C'est ce que font depuis quelques années des physiciens de l'Université technologique de Vienne, qui ont publié récemment dans Nature un article faisant état de la réalisation d'un tel dispositif utilisant le flux de neutrons ultrafroids disponible à l'Institut Laue-Langevin (ILL) de Grenoble. En faisant vibrer l'un des miroirs à des fréquencesfréquences particulières, les chercheurs sont capables de transférer les neutrons sur des états d'énergie plus élevés et donc de faire de la spectroscopie de résonancerésonance gravitationnelle.

    Dans un avenir proche on saura peut-être si des théories basées sur l'existence de dimensions spatiales supplémentaires, comme la version dite ADD des théories de Kaluza-Klein ou des supercordes (la même qui autorise la création éventuelle de minitrous noirs au LHCLHC), sont correctes.