Depuis les années 1970, les scientifiques traquaient cette étrange forme de la matière baptisée excitonium. Mais les techniques employées manquaient de précision. Et les preuves avancées n’étaient pas suffisamment convaincantes. Celles présentées aujourd’hui par des chercheurs américains semblent définitives.

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    C'est au cœur d'un dichalcogénure de métal de transition des plus banal -- le diséléniure de titane -- que des chercheurs de l'université de l’Illinois (États-Unis) affirment avoir observé, pour la toute première fois, une forme de la matière qui leur échappait jusqu'alors : l'excitonium. En tout cas, ils présentent à la communauté, des preuves expérimentales jugées suffisamment probantes de son existence.

    Rappelons que les excitons correspondent à des quasi-particules qui apparaissent en certaines circonstances, dans les semi-conducteurs notamment. Lorsqu'un électron situé en bordure d'une bande de valencebande de valence est excité, il peut sauter la bande interdite pour rejoindre la bande de conductionbande de conduction. Derrière lui, il laisse un vide dans la bande de valence que les physiciensphysiciens nomment... trou ! Ce trou se comporte alors comme une particule de charge positive. Parfois, il s'apparie avec l'électron échappé et l'ensemble forme un exciton.

    Le terme excitonium a été inventé dans les années 1960 -- par un physicien théoricien de Harvard, Bert Halperin -- pour désigner un condensat composé d'excitons. Depuis, nombre de théoriciens ont spéculé sur le fait que l'excitonium se présente comme un isolant, comme un conducteur parfait ou encore comme un superfluidesuperfluide. Et personne n'avait encore pu apporter la preuve expérimentale de son existence.

    Une vue d’artiste de l’excitonium, comme une excitation en jaune qui se propage dans un solide d’excitons en bleu. © Peter Abbamonte, <em>University of Illinois</em>, <em>Department of Physics</em> et Frederick Seitz, <em>Materials Research Laboratory</em>

    Une vue d’artiste de l’excitonium, comme une excitation en jaune qui se propage dans un solide d’excitons en bleu. © Peter Abbamonte, University of Illinois, Department of Physics et Frederick Seitz, Materials Research Laboratory

    Une découverte presque fortuite

    Comme cela arrive régulièrement en sciences -- et même si l'idée avait traversé l'esprit des chercheurs américains --, l'objectif premier des expériences menées par l'équipe de l'université de l'Illinois n'était pas de traquer l'excitonium. Simplement, dans un premier temps, de tester les capacités d'une nouvelle technique destinée à étudier les supraconducteurssupraconducteurs à haute température : la spectroscopie de perte d'énergieénergie des électrons résolue en moment (M-EELS).

    La découverte s’est faite de manière fortuite

    C'est grâce à cette nouvelle résolutionrésolution de l'EELS que les chercheurs sont aujourd'hui convaincus que ce qu'ils ont observé -- au cœur de 5 cristaux différents -- annonce bien la formation d'un excitonium. À une température proche de celle de la transition de phase -- quelque 190 kelvinskelvins --, l'énergie des électrons est tombée à zéro sans que leur moment s'annule. Une preuve du ralentissement des fluctuations du plasma et de la cristallisation des électrons de valenceélectrons de valence en un condensat d'excitons.

    Les chercheurs imaginent encore mal quelles applicationsapplications pratiques leur découverte pourrait avoir. En revanche, ils sont convaincus qu'elle les aidera à éclairer quelques-unes des manifestations étranges à nos sens de la mécanique quantique.