La blogosphère continue de se remplir de rumeurs sur la conférence du Cern du 4 juillet 2012 faisant état des dernières recherches concernant le boson de Brout-Englert-Higgs. On pense savoir qu’une découverte ne sera pas encore annoncée mais il semble de plus en plus probable que Stephen Hawking perde son pari...

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    Il y a quelques années, Stephen Hawking avait fait sensation en prédisant que ni le Tevatron ni le LHC n'observeraient de traces du mythique boson de Peter HiggsPeter Higgs. Comme à son habitude, il en avait même fait un pari qui, loin d'être une lubie de sa part, reposait sur des calculs de gravitation quantiquegravitation quantique effectués en 1995. Peter Higgs ne pouvait pas rester silencieux et avait répliqué, un peu irrité : « Je suis très sceptique quant aux calculs de Stephen. Franchement, je ne pense pas qu'ils soient vraiment valables ».

    Le boson de Higgs n'a toujours pas été observé mais on sait que le suspens est en train de monter car ce mercredi 4 juillet, à partir de 9 h, une conférence se tiendra au Cern, dont le déroulement sera retransmis en direct sur InternetInternet. Elle concernera donc la chasse au boson de Higgs au LHC. Si l'on sait, depuis la mise au point du directeur du Cern, que sa découverte ne sera pas annoncée, tous les indices convergent pour laisser espérer qu'une annonce importante (mais laquelle exactement ?) va être faite !

    La preuve en est qu'au Cern seront présents : François Englert, Carl Hagen, Gerald Guralnik et bien sûr Peter Higgs.

    Le physicien colauréat du Prix Wolf, François Englert. © François Englert-Cern

    Le physicien colauréat du Prix Wolf, François Englert. © François Englert-Cern

    Les trois premiers noms ne diront probablement rien à beaucoup mais pour la majorité des physiciensphysiciens des particules élémentaires ils ne sont pas inconnus, surtout celui de François Englert qui a aussi produit d'importants travaux sur la supergravité, la théorie des cordesthéorie des cordes, les trous noirs et même la cosmologiecosmologie quantique. En effet, avec son collègue Robert Brout, hélas décédé il y a peu, ils sont les premiers à publier en 1964 un mécanisme capable d'expliquer d'où viennent les massesmasses des particules élémentaires. Ils se verront attribuer pour cette découverte le prix Wolf, souvent évoqué comme l'antichambre du prix Nobel.

    Le boson de Brout-Englert-Higgs-Guralnik-Hagen-Kibble

    L'idée est à l'époque dans l'esprit de plusieurs théoriciens, dont bien sûr Peter Higgs, mais aussi Carl Hagen, Gerald Guralnik et Tom Kibble qui vont publier indépendamment cette année-là des travaux similaires. Mais les germesgermes de ce mécanisme de Brout-Englert-Higgs sont déjà dans des publications de Philip Anderson et Yoichiro Nambu. En 1964, à part leurs auteurs, personne ne comprend l'importance de leur découverte mais les choses changent en 1967 lorsque Steven WeinbergSteven Weinberg et Abdus SalamAbdus Salam, bâtissant sur les fondations posées par Sheldon GlashowSheldon Glashow et d'autres comme Ennackal Sudarshan, proposent le modèle unifié des forces électromagnétiques et nucléaires faibles.

    Glashow, Salam et Weinberg décrocheront le prix Nobel pour cette découverte en 1979. Or, cette théorie amplement confirmée par la suite au Cern pendant les années 1980 et 1990, repose lourdement sur le mécanisme découvert en 1964. Ce mécanisme requiert l'existence d'un nouveau champ dans la nature dont les excitations sont sous forme d'une particule, le fameux boson de Brout-Englert-Higgs comme on l'appelle plus fréquemment désormais.


    Une vidéo sur le LHC et la chasse au boson de Higgs et à la nouvelle physique. © CernTV-YouTube

    Mais pourquoi le boson de Brout-Englert-Higgs est-il presque toujours appelé le boson de Higgsboson de Higgs ? Steven Weinberg a donné sa version des faits : « Dans son livre récent [...], Frank Close souligne qu'une erreur de ma part est partiellement responsable de l'expression "boson de Higgs". Dans mon papier de 1967 sur l'unification des forces faiblesforces faibles et électromagnétiques, j'ai cité le travail de 1964 de Peter Higgs et de deux autres groupes de théoriciens. [...] Quant à ma responsabilité dans le nom de "boson de Higgs", elle est due à une erreur dans ma lecture des dates de ces trois premiers papiers : j'ai cru que le plus ancien était celui de Higgs, de sorte qu'en 1967 j'ai cité Higgs en premier lieu, et j'ai continué à le faire depuis. Apparemment, d'autres physiciens m'ont suivi. Mais comme le signale Close, le premier papier des trois que je citais était en fait celui de Robert Brout et François Englert. Pour atténuer mon erreur, il faut remarquer que Higgs et Brout et Englert ont travaillé indépendamment et à peu près en même temps, ce qui fut aussi le cas du troisième groupe (Gerald Guralnik, C.-R. Hagen et Tom Kibble). Mais le nom de "boson de Higgs" semble lui être resté » (New York Review of books, mai 2012).