La théorie du Big Bang ne va pas en être remise en question pour autant mais un groupe de cosmologistes n'hésite pas à parler de crise après la découverte qu'ils pensent avoir faite : des sources de rayonnement ultraviolet inconnues auraient fortement récemment ionisé l'hydrogène intergalactique. Et si la matière noire jouait un rôle ?

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    Les premiers atomes se sont formés environ 380.000 ans après le Big BangBig Bang. À la fin de cette période, appelée la recombinaison, l'univers observable contenait donc un gaz de matière baryonique composé essentiellement d'atomes d'hydrogènehydrogène et d'héliumhélium neutres, plongé dans le rayonnement fossilerayonnement fossile et la matière noirematière noire. Quelques centaines de millions d'années plus tard, à la fin des Âges sombres, ce gaz était partiellement ionisé à nouveau sous l'influence des radiations ultraviolettes émises par les toutes premières étoilesétoiles et par les trous noirstrous noirs massifs débutant leur croissance dans les jeunes galaxiesgalaxies. Cette période est qualifiée de « renaissance cosmique » car nulle étoile n'illuminait encore le cosmoscosmos.

    Les cosmologistes tentent de reconstituer l'histoire passée de la structuration de la matière à grandes échelles depuis cette période jusqu'à nos jours. Ils utilisent notamment pour cela des simulations numériques. Comme la matière noire domine largement la matière baryonique à ces échelles, beaucoup de ces simulations se contentent d'étudier, sur plusieurs milliards d'années, la formation des galaxies, des amas de galaxiesamas de galaxies et la manière dont ils s'assemblent en filaments à partir de ses fluctuations de densité initiales dans l'univers primordial.


    La Simulation du Millénaire a nécessité de puissants ordinateurs. Mais comme l'explique cette vidéo, vous pouvez faire une simulation simple de la formation des galaxies avec votre propre ordinateur portable. © MinutePhysics, YouTube

    Des simulations avec matière noire et baryonique

    Mais d'autres sont plus ambitieuses. Le comportement de la matière baryonique dans le champ de gravitationgravitation de la matière noire est aussi pris en compte, ainsi que l'effet du rayonnement des étoiles ou des trous noirs géants accrètant de la matière. En utilisant ce dernier type de simulation et en comparant les résultats des calculs numériquesnumériques aux observations faites à l'aide du télescopetélescope HubbleHubble une équipe d'astrophysiciensastrophysiciens vient de faire une découverte troublante.

    Comme les chercheurs l'expliquent dans l'article qu'ils ont déposé sur arxiv, ils ont utilisé une version améliorée du célèbre programme Gadget-2, un code de calcul hydrodynamique (SPH, pour Smoothed particle hydrodynamics), d'un usage fréquent en cosmologiecosmologie et qui a permis la fameuse Simulation du Millénaire. La partie observationnelle de leur travail faisait intervenir les données collectées avec le COS (Cosmic Origins Spectrograph), un instrument installé sur Hubble depuis 2009. Il permet des observations dans l'ultravioletultraviolet.

    400 % des photons UV manquent à l'appel

    Les chercheurs ont découvert que l'hydrogène formant des filaments de gaz entre les galaxies est beaucoup plus ionisé qu'on ne s'y attendait dans des régions de l'univers âgées de plus d'une dizaine de milliards d'années. Or cela pose problème. Les simulations permettent de calculer la quantité de rayonnement ultraviolet (UV) produite par les étoiles dans les galaxies. Une bonne part de ce rayonnement est bloquée par le gaz interstellaire mais une partie peut atteindre le gaz intergalactique et le ioniser. Les quasars sont aussi des sources de rayonnement UV et ils étaient plus nombreux il y a des milliards d'années. La simulation conduite par les cosmologistes rend bien compte de la structure de l'univers observable et de son état d'ionisationionisation quand il était plus jeune mais elle ne réussit pour les périodes plus récentes que si l'on ajoute des sources de rayonnement UV supplémentaires.

    L'écart entre la théorie et les observations n'est pas mince puisqu'il faudrait multiplier par 5 la quantité de rayonnement UV émise. Il ne semble pas y avoir d'erreurs dans les calculs qui reposent sur le comportement des massesmasses d'hydrogène dont la physiquephysique est particulièrement bien comprise. Il n'y a pas non plus assez de quasarsquasars dans l'univers récent pour fournir les UV manquants. Reste une dernière hypothèse dont les conséquences sont fascinantes. On peut imaginer que les particules de matière noire sont instables et qu'elles sont en train de se désintégrer en produisant des photonsphotons ultraviolets.