Un objet faible repéré près du Soleil le 5 août s’est avéré être un cortège inhabituel de trois corps qui appartiendraient à une comète inconnue.


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    Les astronomesastronomes ont l'habitude de découvrir des comètes dans l'environnement du Soleil via le satellite SohoSoho qui ne le quitte pas des yeux depuis 25 ans. Il n'y a pas longtemps, le 21 juin, les chercheurs fêtaient la 4.000e comète furetant près de notre étoile.

    Le 4.049e objet découvert se montre très surprenant et inhabituel. On peut voir deux gros morceaux accompagné d'un troisième, beaucoup plus petit, sur les images du coronographe Lasco C2 prises le 7 août. Certains y ont bien sûr vu un vaisseau spatial d'origine extraterrestre se frayant un chemin près de notre Soleil mais pour les spécialistes, coutumier des comètes rasant le Soleil, ce ne sont pas du tout des aliens. Mais bien une comète, de par son apparence.

    Cortège de comètes dans le champ du coronographe Lasco C2 de Soho, le 7 août 2020. © ESA, Nasa, Soho, Karl Battams
    Cortège de comètes dans le champ du coronographe Lasco C2 de Soho, le 7 août 2020. © ESA, Nasa, Soho, Karl Battams

    L'astre a été vu pour la première fois deux jours plus tôt, le 5 août, par l'astronome amateur Worachate Boonplod. Ce n'était encore qu'une petite tache pâle, raconte Karl Battams, du Naval Research Lab à Washington DC, qui supervise le programme de science citoyenne sur les comètes rasantes du Soleil (sungrazer comet). Visiblement, son passage dans cette région chaude l'a disloqué. C'est quand il est entré dans le champ de Lasco C2 dont « la résolutionrésolution améliorée a confirmé que c'était plus qu'une comète et qu'il s'agissait en fait de TROIS comètes ! » explique le chercheur dans son article pour la Picture of the week, « l'image de la semaine » du site Soho.

    Détails des trois comètes : deux gros morceaux et un troisième beaucoup plus petit. En bas, à gauche, le Soleil masqué par le disque noir, le coronographe Lasco C2, a été ajouté au centre. © ESA, Nasa, Soho, Karl Battams
    Détails des trois comètes : deux gros morceaux et un troisième beaucoup plus petit. En bas, à gauche, le Soleil masqué par le disque noir, le coronographe Lasco C2, a été ajouté au centre. © ESA, Nasa, Soho, Karl Battams

    Son premier et dernier passage près du Soleil

    Karl Battams souligne que contrairement à l'immense majorité des comètes découvertes par Soho, celle-ci n'est pas un membre de la famille Kreutz, lesquelles sont au nombre de 3.000 sur les 4.000 débusquées en 25 ans. Cette illustre famille, rappelons-le, serait les restes dispersés d'une seule et même comète géante qui se serait brisée il y a plus de 1.000 ans. Pour ce grand spécialiste, « [...] c'est extrêmement rare que nous voyions une comète qui ne fasse pas partie de ce groupe ».

    La comète a traversé le champ de la caméra HI-1 d'un autre observatoire solaire, Stereo, entre le 5 et le 9 août. On peut voir sa queue perturbée par le vent solaire. En haut, à droite, on reconnaît la grappe d'étoiles des Pléiades. © Nasa, Stereo

    Pour lui, la triple comète fait sans doute son premier passage près du Soleil et le dernier. Il note qu'en s'éloignant de notre étoile, sa luminositéluminosité a rapidement diminué, suggérant qu'elle n'est déjà plus qu'un fantôme d'elle-même. On ne verra rien depuis la Terre. Ce qui est, somme toute, un sort assez fréquent pour ces astres glacés venus des confins du Sytème solaire. En effet, combien de comètes prometteuses, telle Ison il y a sept ans, ou tout récemment Atlas et Swan, n'ont pas survécu au « feufeu » du Soleil. Cette belle inconnue -- qui recevra bientôt un nom -- nous le montre une fois de plus. Ce ne sera pas la comète de l'année. Neowise est toujours la tenante du titre.


    Soho repère une intrigante comète près du Soleil

    Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman publié le 28 février 2015

    Les comètes qui s'approchent dangereusement du Soleil ne sont pas rares. Le satellite Soho en a d'ailleurs observé de nombreuses tout au long de sa carrière débutée en 1996. Beaucoup sont connues pour appartenir au groupe de Kreutz, mais la 2.875e, découverte par le satellite, intrigue les astronomes car elle ne présente aucun lien de parenté avec cette famille, ni avec aucune autre d'ailleurs. Pour l'instant, elle a bien résisté au feu solaire et à la force gravitationnelleforce gravitationnelle de notre étoile.

    Le vénérable Soho (Solar and Heliospheric Observatory), lancé fin 1995, est le plus grand découvreur et pourvoyeur de comètes de tous les temps. Au cours de ses années d'activité, le satellite de l'Esa et de la NasaNasa dédié à l'observation du Soleil a effectivement surpris, dans le champ de ses coronographes Lasco C2 et C3, plus de 2.875 astres chevelus (du latin comacoma, chevelure). La plupart d'entre eux étaient inconnus jusque-là.

    Les chercheurs en ont observé des téméraires qui s'aventurent très près de note étoile (désignés sungrazers en anglais, « brouteurs de Soleil »). Certains ne sont d'ailleurs pas revenus de leur voyage car ils ont foncé (et fondu) dans le chaudronchaudron solaire... Dans la liste, ceux aux orbitesorbites très similaires sont associés au groupe dit de Kreutz. Il s'agit vraisemblablement d'une multitude de débris qui ont été essaimés par une seule et même comète, laquelle s'est fragmentée il y a quelques siècles.

    La 2.875e comète débusquée avec les yeux du satellite et initialement nommée Soho-2875 est un cas un peu particulier pour les astronomes car elle n'appartient à aucun groupe connu. En outre, elle a survécu au « feu » de notre Soleil et à ses puissantes forces de maréeforces de marée le 20 février dernier, lorsqu'elle l'a frôlé à quelque 3,5 millions de km. À cet égard, les férus d'astronomie se souviennent sûrement avec bonheur de la comète Lovejoy qui, contre toute attente, avait brillamment résisté à son rase-mottes avec le Soleil en décembre 2011.


    La 2.875e comète découverte par Soho est passée dans le champ du coronographe Lasco C3 du satellite d’observation solaire entre le 18 et le 21 février 2015. Au milieu de cette séquence, on peut admirer une éjection de masse coronale (CME) se déployer. © Esa, Nasa

    Quelle observation pour cette nouvelle comète ?

    Baptisée depuis sa découverte C/2015 D1 (Soho), ce nouveau corps glacé devenu plus brillant depuis son passage à l'orée du Soleil laisse entrevoir, pour les astronomes amateurs, une chance d'être visible avec un instrument d'observation dans le ciel flamboyant du crépusculecrépuscule au cours des prochains jours (fin février, début mars).

    Au lendemain de son flirt avec l'astre solaire le 21 février, sa magnitudemagnitude était de 4 à 4,5. Bien entendu, en prenant le large, sa luminosité décroit et elle est à présent supérieure à 6. Cela signifie que, dans la clarté de nos débuts de soirée, en direction de la constellationconstellation des PoissonsPoissons, à l'ouest, où s'affiche en ce moment l'étincelante VénusVénus accompagnée de son amant Mars, il n'est quasiment pas possible de la traquer à l'œilœil nu.

    Toutefois, grâce à la carte du ciel développée par Bob King (alias Astrobob) -- de son propre aveu encore approximative du fait du manque d'informations précises sur sa trajectoire --, chacun peut s'amuser à la rechercher avec une paire de jumelles, une lunette ou un télescopetélescope autour des étoiles qui jalonnent la route qu'elle devrait emprunter début mars à travers les Poissons, Pégase et Andromède. Le 24 février, la comète C/2015 D1 (Soho) était à 45 millions de km du Soleil et plus de 127 millions de km de la Terre. Reste à espérer que des éléments seront visibles dans le ciel : au mieux un sursautsursaut de luminosité, au pire, un nuagenuage résiduel de glace et de poussières, comparable à celui de la comète Ison qui s'était « brûlé les ailes » en novembre 2014 lors de son survolsurvol de notre étoile. C'était alors la première et dernière fois qu'elle rendait visite au Soleil.