Les microalgues constituent une source très prometteuse d'alternative au pétrole. Pour la première fois, elles ont été utilisées pour faire... du bitume ! Dans le cadre du projet Algoroute, des chercheurs du CNRS, en collaboration avec l'entreprise AlgoSource Technologies, ont apporté la preuve de concept de ce « bio-bitume », un écomatériau dont les caractéristiques sont très proches du bitume courant de nos routes.

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    Les microalgues sont connues depuis longtemps pour leurs applications comme colorants en cosmétique ou comme compléments alimentaires. Leur raffinage pour produire, par exemple, des biocarburantsbiocarburants, est une idée qui a émergé ces dernières années. Aujourd'hui, les microalgues font partie des alternatives au pétrole qui semblent prometteuses. Avec le développement de procédés efficaces et rentables, de nombreux produits issus de l'industrie du raffinage deviendraient accessibles.

    Dans le cadre du programme Algoroute, financé par la région Pays de la Loire, des chercheurs de laboratoires nantais et orléanais ont ainsi produit du « bio-bitumebitume » en valorisant des résidus de microalgues, issus, par exemple, de l'extraction de protéinesprotéines hydrosolubles des algues pour l'industrie cosmétique. Ils ont utilisé un procédé de liquéfaction hydrothermale (plus simplement de l'eau sous pression à l'état sous-critique). Celui-ci transforme ces déchetsdéchets de microalgues en une phase visqueuse noire hydrophobehydrophobe (ce « bio-bitume ») ayant un aspect proche de celui d'un bitume pétrolier. Ce procédé est réalisé avec un rendement de conversion actuel de 55 %.


    Le « bio-bitume » du projet Algoroute a été obtenu par liquéfaction hydrothermale de microalgues. © Les films du Cercle Rouge, YouTube

    Des « bio-bitumes » indépendants de la nutrition humaine

    Alors que la composition chimique de ce nouvel écomatériau est complètement différente de celle du bitume issu du pétrole, les deux matières présentent des similarités : la couleurcouleur noire et les propriétés rhéologiques. LiquideLiquide au-dessus de 100 °C, ce « bio-bitume » permet d'enrober les agrégats minérauxminéraux. Viscoélastique de -20 °C à 60 °C, il assure la cohésion de la structure granulairegranulaire, supporte les charges et relaxe les contraintes mécaniques. Des analyses de tenue dans le temps ont débuté ainsi que des études pour évaluer la rentabilité du procédé dans la perspective d'une production à grande échelle.

    Cette innovation apporte une nouvelle option potentielle pour l'industrie routière, actuellement entièrement dépendante du pétrolepétrole. Jusqu'à présent, les « bio-bitumes » développés intégraient des huiles d'origine agricole (avec l'inconvénient d'entrer en compétition avec la nutrition humaine) ou issues de l'industrie papetière, mélangées à des résines pour améliorer leurs propriétés viscoélastiques. Utiliser des microalgues, dont la culture ne nécessite pas la mobilisation de terres arablesterres arables, présente donc une solution attractive.

    Les travaux des chercheur des laboratoires ChimieChimie et interdisciplinaritéinterdisciplinarité : synthèse analyse modélisationmodélisation (CNRS/Université de Nantes), Génie des procédés − environnement − agroalimentaire (CNRS/Université de Nantes/Oniris/École des Mines de Nantes), Matériaux pour infrastructures de transports (Ifsttar), Conditions extrêmes et matériaux : haute température et irradiationirradiation (CNRS), sont publiés dans le numéro d'avril de la revue ACS Sustainable Chemistry & Engineering.