Des astronomes ont pu mesurer - presque - directement la vitesse de rotation d'un trou noir. Avec 83 % de la valeur limite, ce trou noir pourtant banal étonne un peu. C'est surtout la première fois que l'on approche d'aussi près les caractéristiques d'un tel astre.

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    Vue d'artiste du trou noir GRO J1655-40, de son disque d'accrétion et de son étoile compagnon. Crédits : Nasa/CXC/M. Weiss

    Vue d'artiste du trou noir GRO J1655-40, de son disque d'accrétion et de son étoile compagnon. Crédits : Nasa/CXC/M. Weiss

    A 35 000 années-lumière du système solaire dans la constellation de l'Aigle se trouve un trou noir bien connu, GRS 1915+105, associé avec une étoile classique dans un système double, les deux tournant ensemble. Du gazgaz s'échappe en permanence de l'étoile et forme autour du trou noir un large disque d'accrétiondisque d'accrétion. Ce cas de figure n'est pas rare et permet de repérer ces astresastres invisibles car plus la matièrematière en est proche et plus elle tourne vite, jusqu'à émettre un rayonnement X puissant... et très bavard pour qui sait le déchiffrer.

    Grâce au télescopetélescope RXTE (Rossi X-Ray Timing explorer), spécialement conçu pour ce genre d'observations, une équipe menée par Jeffrey McClintock et Ramesh Narayan (du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics, Cambridge, Massachusetts) a pu obtenir le spectrespectre du rayonnement X et déterminer plusieurs caractéristiques du trou noir, dont sa massemasse et sa vitesse de rotationvitesse de rotation.


    Vidéo de synthèse du trou noir GRS 1915+105 associé à son étoile
    Crédits : NASA

    Au centre de l'ouragan cosmique

    Les astronomesastronomes se sont intéressés à la région centrale de GRS 1915+105, sorte de no man's land entre le disque d'accrétion et le trou noir. Il existe en effet une limite inférieure pour la matière tournant autour de l'astre invisible : en deçà de ce qu'on appelle la dernière orbiteorbite stable, la matière est irrémédiablement attirée. Elle accélère et atteint l'horizon des événementshorizon des événements, c'est-à-dire la frontière du trou noir, à l'intérieur de laquelle rien ne peut ressortir, pas même la lumière. Il ne fait pas bon s'aventurer entre ces deux limites : la matière quittant la dernière orbite stable ne mettra qu'une milliseconde avant de disparaître derrière l'horizon des événements.

    La relativité généralerelativité générale prédit que le diamètre de la dernière orbite stable dépend de la masse du trou noir et de sa vitesse de rotation. Plus il tourne vite, plus le rayon est petit. Si on se fie aux équationséquations d'EinsteinEinstein, on peut donc estimer la vitesse de rotation du trou noir invisible en mesurant le rayon de cette orbite. On ne peut le faire que de manière indirecte car il est de l'ordre de quelques dizaines de kilomètres. Mais c'est possible ! Car plus le rayon de cette dernière orbite stable est petit et plus la matière tourne vite. Et plus cette vitesse est élevée plus puissante est l'émissionémission de rayons Xrayons X. C'est elle qu'ont mesurée précisément les astronomes à l'aide du RXTE.

    Conclusion : le trou noir de GRS 1915+105 a une masse de 14 masses solaires. Le diamètre de l'horizon des événements serait de 42 kilomètres si le trou noir avait une vitesse de rotation nulle et de 21 kilomètres à la vitesse de rotation considérée comme maximale, de 1 150 tours par seconde. Les astronomes estiment que le diamètre doit être d'environ 25 kilomètres, ce qui porteporte la vitesse de rotation à 950 tours par seconde, soit une valeur bien proche du maximum. Selon McClintock et Narayan, cette valeur élevée s'expliquerait par la vitesse de rotation de l'étoile qui s'est effondrée sur elle-même pour former ce trou noir et qui a été conservée.