Le télescope Hubble a suivi pendant plusieurs mois les restes de la rencontre entre deux astéroïdes. Objectif : reconstituer le scénario de cette collision spatiale, phénomène sans doute fréquent dans la ceinture d'astéroïdes, mais jamais observé auparavant.

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    Observée sur plusieurs mois par le télescope Hubble, la queue de débris de P/2010 A2 se modifie lentement sous l'action du vent solaire. © Nasa/Esa/D. Jewitt (UCLA)

    Observée sur plusieurs mois par le télescope Hubble, la queue de débris de P/2010 A2 se modifie lentement sous l'action du vent solaire. © Nasa/Esa/D. Jewitt (UCLA)

    Le 6 janvier 2010, les astronomesastronomes découvraient un objet d'apparence cométaire qui circulait entre les orbites de Mars et JupiterJupiter. Baptisé P/2010 A2, ce corps céleste, dont le noyau mesure environ 120 mètres de diamètre, était accompagné d'une queue de débris. Malgré sa ressemblance avec une comète, P/2010 A2 présentait deux singularités : d'une part d'étranges filaments en forme de X étaient observables à l'arrière du noyau, d'autre part l'analyse spectrale de sa queue ne montrait aucun des gaz que l'on rencontre habituellement dans les queues cométaires. Armés du télescope spatial Hubble, les astronomes lancèrent une campagne d'observations entre janvier et mai 2010, dont les résultats sont présentés ce mois-ci dans la revue Nature.

    Dès les premières images fournies par HubbleHubble, les scientifiques se rendirent compte que P/2010 A2 est en fait le résultat d'une collision entre deux astéroïdes, un phénomène encore jamais observé. L'équipe d'astronomes dirigée par David Jewitt, de l'université de Californie à Los Angeles (UCLA), pensa que « l'accidentaccident » venait de se produire et que les débris allaient très rapidement s'éparpiller. À leur grande surprise, les observations menées par le télescope Hubble pendant cinq mois montrèrent que la forme de la queue de débris se modifiait très lentement. Du coup, il a été nécessaire de reconsidérer la date de la collision, qui s'est sans doute produite plus tard, entre février et mars 2009.

    La première image de P/2010 A2 réalisée par le télescope Hubble en janvier 2010 montre l'étrange structure en X à l'arrière d'un noyau de 120 mètres de diamètre. © Nasa/Esa/D. Jewitt (UCLA)

    La première image de P/2010 A2 réalisée par le télescope Hubble en janvier 2010 montre l'étrange structure en X à l'arrière d'un noyau de 120 mètres de diamètre. © Nasa/Esa/D. Jewitt (UCLA)

    Portrait des deux protagonistes

    Le scénario de cette collision est désormais connu. Un gros rocher de moins de 5 mètres de long a percuté un petit astéroïde de 120 mètres à la vitesse non négligeable de 18.000 kilomètres à l'heure. Le plus petit s'est volatilisé, arrachant au passage un peu de la surface de l'astéroïdeastéroïde, ce qui a provoqué un nuagenuage de particules de poussières comprises entre 1 millimètre et 2,5 centimètres de diamètre. Agissant sur ces poussières comme il le fait sur les particules rejetées par les noyaux cométaires, le vent solairevent solaire a formé une queue de débris dans la direction opposée au SoleilSoleil. Reste à expliquer pourquoi Hubble a photographié d'étranges filaments en forme de X à l'arrière de l'astéroïde. Pour l'équipe de David Jewitt, il est probable que la réponse est à rechercher du côté de la forme des deux corps. Leur asymétrie pourrait expliquer une répartition irrégulière des débris éjectés.

    Si la collision de deux astéroïdes reste l'explication la plus plausible pour justifier l'existence de P/2010 A2, David Jewitt ne veut pas exclure d'autres hypothèses. L'une d'entre elles prévoit par exemple que l'accélération de la rotation d'un astéroïde sous l'action du vent solaire pourrait lui faire perdre une partie de sa surface qui s'étalerait derrière sous forme de queue. Avec la prochaine génération d'instruments comme le LSST (Large Synoptic Survey TelescopeLarge Synoptic Survey Telescope), les astronomes espèrent pouvoir observer d'autres rencontres entre astéroïdes.