Ce n'est qu'une rumeur mais si elle était avérée, la première détection directe par l'instrument Ligo d'ondes gravitationnelles, prédites par Albert Einstein à partir de sa théorie de la relativité générale, ouvrirait une nouvelle ère en astronomie. Pour l'instant, une telle annonce est prématurée car les équipes en charge de cet instrument ne peuvent rien affirmer ni confirmer. Quoi qu'il en soit, la découverte concernerait l'astrophysique et pas la cosmologie relativiste, c'est-à-dire le Big Bang, comme certains l'écrivent.

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    Il y a quelques mois, le 22 octobre 2015, le porteporte-parole de la collaboration Ligo (Laser Interferometer Gravitational-wave ObservatoryLaser Interferometer Gravitational-wave Observatory), de facto son leader, la physicienne argentine Gabriela González, tempérait déjà dans une interview donnée au journal Quanta Magazine les rumeurs d'une détection directe d'un flux d'ondes gravitationnellesondes gravitationnelles (dont la nature et l'importance pour l'astronomie sont expliquées par Jean-Pierre LuminetJean-Pierre Luminet dans la vidéo ci-dessous) dès le début du premier « run » d'Advanced Ligo, aux États-Unis. La chercheuse se bornait à indiquer que son équipe en était encore à tester ce télescope à ondes gravitationnelles et qu'il était bien trop tôt pour pourvoir affirmer quoi que ce soit à propos des données collectées. On la croit d'autant plus facilement que la première campagne d'observations de la version améliorée de Ligo avait tout juste commencé, le 18 septembre 2015. Ce premier run s'achève mi-janvier 2016.

    Depuis quelques jours, ces rumeurs d'une détection d'ondes gravitationnelles refont surface. Le premier à en parler fut le théoricien des supercordes Lubos Motl, sur son blogblog. Il rapportait de façon sibylline une confidence que lui aurait faite le prix Nobel de physique David GrossDavid Gross. Plus récemment, le cosmologiste Lawrence Krauss faisait lui aussi état sur son compte TwitterTwitter d'une confirmation de la rumeur de 2015 (qu'il avait lui-même propagée le premier) par des sources crédibles, bien qu'il n'ait pas parlé en personne à un membre de la collaboration Ligo.


    Présenté par Hubert Reeves et Jean-Pierre Luminet, Du Big Bang au Vivant est un projet TV-Web-cinéma qui couvre les plus récentes découvertes dans le domaine de la cosmologie. Dans cette vidéo, Jean-Pierre Luminet nous parle des ondes gravitationnelles. © Du Big Bang au Vivant, YouTube

    Une coalescence de deux trous noirs ?

    D'après le journal Science, Gabriela González a fini par sortir de son silence avec une déclaration qui, en substance, ne change pas ce qu'elle avait déjà dit l'année dernière. Le run 1 étant encore en cours, les analyses des données se poursuivent et les membres de Ligo n'en diront donc pas plus, que ce soit pour confirmer ou infirmer la rumeur. Il est certainement bien trop tôt. La prudence des chercheurs se comprend à la lumière de deux malheureuses affaires, celle des neutrinos transluminiques du Cern et celle de la détection des ondes gravitationnelles du Big BangBig Bang par la collaboration Bicep2. Dans les deux cas, la découverte a finalement été réfutée par une analyse plus soigneuse des expériences et des données recueillies.

    Une chose au moins est certaine, si les physiciensphysiciens ont bien détecté pour la première fois de façon directe des ondes gravitationnelles, il ne peut pas s'agir de celles du Big Bang. L'instrument Advanced Ligo, en effet, de par sa sensibilité et la bande de fréquencesbande de fréquences des ondes qu'il mesure, ne peut détecter que des collisions de systèmes binairessystèmes binaires de deux étoiles à neutrons, d'un trou noirtrou noir et d'une étoile à neutrons ou encore de deux trous noirs.

    Selon Lubos Motl, le signal qu'aurait mis en évidence Advanced Ligo pourrait bien être celui de la coalescencecoalescence de deux trous noirs. Si tel est le cas, nous serions au seuil d'une véritable astronomie gravitationnelle permettant enfin de tester de façon approfondie la théorie des trous noirs et de vérifier qu'ils sont bien décrits par la théorie de la relativité généralerelativité générale. Il serait passionnant de découvrir que ce n'est pas le cas.

    Avant de s'enthousiasmer, il est sans doute prudent d'attendre une véritable publication des membres de la collaboration Ligo. N'oublions pas non plus que la détection directe d'ondes gravitationnelles est très difficile et que l'obtention d'un vrai signal aurait sans doute plus de poids si l'équivalent européen de Ligo, Advanced Virgo, annonçait lui aussi la même observation. Il va probablement falloir attendre encore quelques mois avant de connaître le fin mot de cette affaire...