Les fossiles des premières naines blanches à avoir explosé dans notre Univers ont parlé. Ces étoiles-là n’étaient pas aussi massives que les astronomes le pensaient. Un résultat qui contraint les chercheurs à considérer le mécanisme à l’origine des supernovae de type Ia comme un mécanisme évolutif.


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    Dans la grande famille des étoiles, il existe deux catégories de naines blanches. Certaines explosent en supernovaesupernovae dites de type Ia. D'autres terminent plus tranquillement leur vie. Et c'est en étudiant les « fossilesfossiles » de quelques-unes de ces étoiles que des astronomes de Caltech (États-Unis) viennent de découvrir que, très tôt dans l'Univers, les naines blanches pouvaient exploser malgré une masse relativement réduite.

    Rappelons qu'en fin de vie, la plupart des étoiles se transforment en naine blanche. Leur masse entière se retrouve alors confinée dans un volume comparable à celui qu'occupe la Terre. Les chercheurs ne savent pas exactement pourquoi ensuite, certaines explosent en supernovae de type Ia. Au début du XXe siècle, Subrahmanyan ChandrasekharSubrahmanyan Chandrasekhar a calculé que pour en arriver à l'explosion, une naine blanche devait peser au moins 1,4 fois la masse de notre SoleilSoleil. Ce qui n'explique pas pourquoi certaines étoiles moins massives semblent pouvoir exploser elles aussi.

    D'autant que les astronomesastronomes peinent à étudier les supernovae de type Ia et les naines blanches qui en sont à l'origine, car elles disparaissent au bout de quelques mois seulement. Alors, ils s'appuient sur une technique baptisée archéologie galactique. Elle consiste à rechercher les signatures chimiques d'explosions anciennes dans de nouvelles étoiles.

    Ici, une supernova de type Ia. © Zwicky Transient Facility
    Ici, une supernova de type Ia. © Zwicky Transient Facility

    Un rapport à la masse qui évolue au fil du temps

    Une naine blanche qui explose, en effet, disperse dans l'espace des éléments lourds tels que du nickelnickel ou du ferfer. Et plus l'étoile d'origine est massive, plus elle forme d'éléments lourds qui s'intègreront aux étoiles qui se formeront ensuite elles-mêmes dans la région. Ainsi des étoiles riches en nickel, par exemple, sont la marque de prédécesseurs particulièrement massifs.

    Les premières naines blanches n'étaient pas très massives.

    À l'aide du télescopetélescope KeckKeck II (Hawaï), les astronomes ont étudié d'anciennes galaxiesgalaxies. Ils ont découvert, dans la plupart de leurs étoiles, une teneur en nickel relativement faible. De quoi conclure que les naines blanches initiales n'étaient pas très massives. Les chercheurs ont par ailleurs constaté que dans les galaxies plus récentes, la teneur en nickel est plus élevée. Suggérant que plus le temps passe, plus les naines blanches explosent alors qu'elles sont massives.

    Par quel processus ? Les chercheurs l'ignorent toujours. Mais ils espèrent en apprendre plus en étudiant ensuite, de la même manière, les teneurs en manganèsemanganèse. Car le manganèse est encore plus sensible à la masse de l'étoile qui le produit. De quoi donc, espèrent-ils, préciser un peu plus les évolutions de masses critiques chez les naines blanches.


    La masse des premières étoiles de l'Univers remise en question

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco, paru le 05/08/2008

    La formation des premières étoiles de l'Univers est une énigme qui fascine les astrophysiciensastrophysiciens. Une équipe de chercheurs japonais et américains vient de réaliser une nouvelle simulation numériquesimulation numérique qui suggère que les premières étoiles étaient beaucoup moins massives que ce que l'on croyait, peut-être 1% de la masse du Soleil seulement.

    La chronologie supposée de l'Univers, de la recombinaison jusqu'à nos jours avec les âges sombres (<em>dark ages</em>). © Caltech
    La chronologie supposée de l'Univers, de la recombinaison jusqu'à nos jours avec les âges sombres (dark ages). © Caltech

    Dans l'Univers actuel, la présence d'éléments lourds comme le siliciumsilicium et le carbonecarbone, et surtout de poussières constituées à partir d'eux, sont des ingrédients essentiels pour la formation des étoiles. En effet, lorsqu'un nuagenuage de gazgaz se contracte il s'échauffe. L'énergie thermiqueénergie thermique ainsi acquise aux dépens de son énergie gravitationnelle va finir pas s'opposer à l'effondrementeffondrement du nuage pour former, d'abord une proto-étoileproto-étoile, et ensuite une étoile lorsque les réactions thermonucléaires s'enclencheront.

    Il faut donc paradoxalement l'existence de mécanismes de refroidissement pour permettre à la température et à la densité de monter suffisamment pour que ces différents stades de l'évolution stellaire puissent se produire. Ce sont justement ces poussières qui en s'échauffant et en rayonnant une partie de l'énergie thermique dans l'infrarougeinfrarouge vont permettre, au final, la formation des étoiles.

    Pour quiconque connaît un peu d'astrophysiqueastrophysique, notamment la théorie de la nucléosynthèsenucléosynthèse, il est clair que l'on est confronté au dilemme de l'œuf et de la poule, car les éléments lourds ont été synthétisés dans l'Univers après le Big BangBig Bang par les étoiles !

    Le problème devient encore plus aigu lorsque l'on sait que les récentes mesures des quantités d'éléments lourds dans l'Univers, seulement un milliard d'années après sa naissance, indiquent qu'il y en avait déjà beaucoup, plus que prévu initialement. Il faut donc non seulement trouver un mécanisme de formation des premières étoiles en l'absence de poussières mais aussi que ce dernier produise rapidement des étoiles massives pour synthétiser très tôt dans l'histoire de l'Univers des éléments lourds. Rappelons que dans les premières centaines de millions d'années de l'histoire du cosmoscosmos, il n'y avait que de l'hydrogènehydrogène et de l'héliumhélium avec des traces infimes de deutérium et de lithiumlithium 7.

    Les solutions du problème : la matière noire et l'hydrogène moléculaire

    Enfin, pas tout à fait, il devait aussi y avoir la mystérieuse matière noire qui est une composante majeure de la matièrematière du cosmos. N'étant justement pas couplée au champ électromagnétiquechamp électromagnétique, elle a pu amorcer sa concentration en grandes structures malgré la pression de radiationpression de radiation qui existait alors dans l'Univers primordial et qui s'opposait à la formation de grumeaux de matière.

    On en est donc venu à penser que les premières étoiles avaient dû commencer à naître dans les premiers amas de matière noirematière noire puisque ces derniers sont devenus plus denses que la matière normale et ont servi de germesgermes de nucléationnucléation pour les galaxies.

    Reste le problème de la barrière thermique avec la nécessité de dissiper de la chaleur par le rayonnement.

    Il se trouve que de l'hydrogène moléculaire existait en relative grande quantité juste après la formation des premiers atomesatomes, 380.000 ans après le « début » de l'Univers observable. Ce gaz peut justement servir d'agent de refroidissement efficace et ce n'est que plus tard, lorsque les premières étoiles et les premiers quasarsquasars auront par leur rayonnement énergétique provoqué la réionisation partielle de l'Univers, que le taux d'hydrogène moléculaire aura baissé.

    Les simulations numériques précédentes prenant en compte la matière noire, l'hydrogène moléculaire et le spectrespectre des fluctuations de densité de l'Univers après la recombinaisonrecombinaison et l'émissionémission du rayonnement fossilerayonnement fossile, avaient conduit à la formation d'étoiles dépassant la centaine de masses solaires et que l'on avait appelées des étoiles de population IIIpopulation III.

    Naoki Yoshida et ses collègues ont réalisé une nouvelle simulation plus précise que les précédentes et ils viennent de publier les résultats de cette dernière dans Science. Ils trouvent un premier stade de proto-étoiles apparues très tôt dans l'histoire de l'Univers, et là encore dans des amas de matière noire, mais avec des masses de l'ordre de 1% seulement de la masse du Soleil. Ces dernières sont alors à l'origine de la formation des étoiles massives qui synthétiseront rapidement les éléments lourds, comme le fer, détectés autour des premiers quasars. Bien que faiblement massives, elles ont en effet servi de germes de nucléation pour l'apparition des étoiles massives selon cette simulation.

    Il reste encore du travail pour comprendre vraiment comment sont apparues les premières étoiles mais surtout, tant que des données observationnelles de ce qui s'est passé pendant les âges sombresâges sombres ne seront pas là, tout ce travail ne restera que des spéculations théoriques et numériques.