En analysant la lumière d’un quasar avec le télescope Hubble, une équipe d’astrophysiciens américains revisite une seconde période de ré-ionisation intense dans l’histoire du cosmos : celle de l’hélium. Causée par le rayonnement des quasars, elle serait intervenue il y a plus de 11,3 milliards d’années.

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    Un schéma montrant les grandes ères de l'univers depuis la recombinaison, juste après le Big Bang et avant le début des Âges sombres (Dark Ages). La ré-ionisation de l'hélium se produit pendant l'ère où les quasars sont les plus nombreux et les plus actifs. © Nasa, Esa, A. Feild

    Un schéma montrant les grandes ères de l'univers depuis la recombinaison, juste après le Big Bang et avant le début des Âges sombres (Dark Ages). La ré-ionisation de l'hélium se produit pendant l'ère où les quasars sont les plus nombreux et les plus actifs. © Nasa, Esa, A. Feild

    Environ 380.000 ans après la « naissance » de l'univers observable, un événement s'est produit dans le cosmoscosmos, que l'on nomme la recombinaison. Celle-ci correspond à la formation des premiers atomes neutres, essentiellement d'hydrogène et d'hélium. Ce phénomène n'est pas instantané et a même duré plus de 100.000 ans. Mais la date donnée représente approximativement la période où la majorité des quanta de lumière, qui constituent aujourd'hui le rayonnement fossile, ont pu commencer à voyager dans le cosmos, presque sans entrer en collision avec des particules de matièrematière. L'universunivers observable était alors devenu transparenttransparent.

    Paradoxalement, c'est aussi le début des « Âges sombresÂges sombres ». Aucune étoileétoile n'existe encore et il faudra des centaines de millions d'années avant que ne commence la période dite de la « Renaissance cosmique ». À ce moment, les premières étoiles et les premiers trous noirs supermassifstrous noirs supermassifs sont devenus suffisamment nombreux pour illuminer le cosmos, et surtout, ré-ioniser une partie de l'hydrogène et de l'hélium. En plus d'une phase intense de formation d'étoiles, les collisions et fusionfusion entre galaxiesgalaxies deviennent nombreuses et alimentent en gazgaz les quasars qui deviennent sans cesse plus nombreux et lumineux. C'est le début de l'ère des quasarsquasars.

    COS, le meilleur spectrographe spatial à ce jour

    En utilisant le Cosmic Origins Spectrograph (COS) équipant HubbleHubble, le cosmologiste Michael Shull et ses collègues de l'université du Colorado viennent de faire une découverte intéressante (une vidéo en anglais présente le COS, le meilleur spectrographespectrographe ayant jamais volé dans l'espace). Ils ont pour cela analysé la lumière provenant du quasar HE 2347−4342 et l'influence de la matière intergalactique sur le spectrespectre de cette lumière.

    Ils en ont conclu que pendant plusieurs centaines de millions d'années, entre -11,3 et -11,7 milliards d'années, le rayonnement ultravioletultraviolet des quasars était alors particulièrement intense. Il aurait inhibé fortement la formation des galaxies nainesgalaxies naines et surtout aurait ré-ionisé à nouveau les atomes d'hélium, produisant des He+2 à partir des He+ déjà existants.

    Des contraintes sur l'histoire primitive de l'univers observable

    Le gaz intergalactique de matière normale était alors trop chaud, passant d'une température d'environ 10.000 kelvinskelvins à plus de 22.000 kelvins, pour qu'il puisse s'effondrer en formant des galaxies naines. Et le gaz contenu dans celles déjà existantes aurait été grandement soufflé par l'activité des quasars. Plus tard, la température chutant à nouveau, le processus de formation des galaxies naines a pu reprendre.

    Ce genre d'observations sur le milieu intergalactique est important en ce qu'il fournit des informations qui contraignent les différents modèles de ré-ionisationionisation de l'univers et donc l'évolution du milieu intergalactique, des étoiles et des galaxies pendant les premiers milliards d'années du cosmos observable. Ces observations s'ajoutent à celles remarquablement intéressantes faites dernièrement par Fermi et qui, elles, soutiennent l'idée qu'il y a bel et bien un champ magnétique intergalactique à l'échelle cosmologique.