C’est terminé pour le chasseur de planètes Corot. Ce télescope spatial, à la zen attitude, a été mis hors service. Pendant les sept ans qu’il a fonctionné, il a fourni aux astrophysiciens des données sur la structure et l’évolution des étoiles, leur agencement dans la Galaxie ainsi que le cortège de planètes qui les entoure. Jean Schneider, qui en 1988 a l'idée de combiner sismologie et transits planétaires sur une même mission, nous brosse un rapide bilan de la mission Corot.

au sommaire


    Le télescope Corot construit autour d'une plateforme Proteus (le cube sur lequel est installé le télescope afocal Corotel), dans l'usine cannoise de Thales Alenia Space. © Thales Alenia Space, Studio Bazile

    Le télescope Corot construit autour d'une plateforme Proteus (le cube sur lequel est installé le télescope afocal Corotel), dans l'usine cannoise de Thales Alenia Space. © Thales Alenia Space, Studio Bazile

    Après plus de sept années d'activité en orbite, le satellite Corot (pour Convection, Rotation & Transits planétairesTransits planétaires) a été éteint. Pilotées par les équipes techniques du Centre spatial de Toulouse, les opérations de retrait de service du satellite, démarrées en décembre 2013, se sont terminées le 17 juin 2014 avec l'envoi d'une ultime télécommande. Elles sont nécessaires afin de réduire au maximum la durée de retour dans l'atmosphèreatmosphère de CorotCorot, conformément à la loi française sur les Opérations spatiales (LOS). Corot devrait retomber sur Terre en 2048.

    Construit par Thales Alenia Space, sous la maîtrise d'œuvre du Cnes, ce satellite a été lancé en décembre 2006 pour observer les vibrations des étoiles (la sismologiesismologie stellaire) et rechercher des planètes extrasolairesplanètes extrasolaires par la méthode des transits. Souvent présenté comme un satellite zen, Corot a la particularité d'observer durant de long mois des champs d'étoiles de manière pratiquement ininterrompue et surtout en ne bougeant pas de ses cibles. Cela permet une précision sans précédent des mesures des variations de la lumière émise par les étoiles observées. Il s'agit en cela d'une première mondiale qui a été suivi par Kepler et qui prépare le terrain aux missions futures qui s'inspireront vraisemblablement de cette stratégie d'observation.

    Dans le domaine de la sismologie stellaire, Corot a permis la découverte de vibrationsvibrations de type solaire dans les géantes rouges, des étoiles en fin de vie, en montrant comment ce type de mesures conduit à leur massemasse, leur rayon et leur âge. On retiendra qu'en mesurant les fréquencesfréquences et les amplitudes des vibrations des étoiles avec une précision inédite, il a ouvert un nouveau domaine. Les modes de vibration des étoiles fournissent un diagnosticdiagnostic unique sur la structure, le fonctionnement et l'âge de chaque astreastre. Un résultat majeur qui, combiné à la mesure des positions et des vitessesvitesses avec GaiaGaia, éclairera l'histoire et l'avenir de ces régions lointaines de la Voie lactéeVoie lactée.

    Pour ce qui concerne les planètes, Futura-Sciences a interrogé Jean Schneider, spécialiste français des exoplanètes, membre de l'équipe scientifiques de Corot et qui a créé l'Encyclopédie des planètes extrasolaires.

    À ce jour, ce satellite a « révélé 37 planètes et une centaine d'autres candidates sont toujours en cours d'analyse ». Ce faible nombre de planètes découvertes est le seul, petit, regret de la mission. « Les astronomesastronomes en attendaient davantage. » En s'appuyant sur le nombre d'étoiles observées, la proportion d'étoiles avec une planète et la probabilité géométrique que la planète transite son étoile, au « plus d'une centaine de Jupiter chaudsJupiter chauds, au lieu de ces 37 exoplanètes, étaient attendus ».

    Ce flux lumineux reçu de l'étoile Corot 7 pendant le transit de Corot 7-b illustre la méthode du transit pour détecter une planète autour de son étoile. Elle consiste à déceler l'ombre de l'objet passant devant son étoile en mesurant les infimes variations de la luminosité de cette dernière. © Cnes

    Ce flux lumineux reçu de l'étoile Corot 7 pendant le transit de Corot 7-b illustre la méthode du transit pour détecter une planète autour de son étoile. Elle consiste à déceler l'ombre de l'objet passant devant son étoile en mesurant les infimes variations de la luminosité de cette dernière. © Cnes

    Corot a trouvé moins d'exoplanètes que prévu

    Pour expliquer cette pêchepêche infructueuse, l'équipe de Corot a quelque mal à trouver une cause qui fasse consensus parmi tous ses membres. Cependant, Jean Schneider se hasarde à quelques explications, qui n'engagent que lui. Ce faible nombre pourrait s'expliquer par le fait que « moins d'étoiles ont été observées en raison de la complexité des champs stellaires et de l'activité stellaire de certaines étoiles ». À cela, poursuit-il, s'ajoutent de « petites instabilités du système de détection et la difficulté qu'ont les astronomes à obtenir du temps d'observation depuis des télescopestélescopes terrestres pour confirmer la centaine de candidats encore en lice ».

    Certes, Corot n'a découvert qu'un petit nombre de planètes mais certaines sont remarquables. Si l'on ne devait en retenir qu'une, pour un grand nombre de personnes la principale découverte serait Corot-7b, « la première planète rocheuse confirmée, toute proche de son étoile, avec une densité et une composition proches de celles de la Terre ». À l'époque, cette découverte a eu beaucoup de retentissement car c'était la « première preuve du caractère rocheux d'une planète ».

    On doit également à Corot la découverte de la première planète tempérée de période proche de 100 jours (Corot-9b). À l'avenir, des observations spectroscopiques au sol et avec le futur observatoire spatial James Webb devraient préciser le caractère tempéré de son atmosphère. Autre planète surprenante, Corot-3b. Vingt fois plus massif que Jupiter, cet objet est considéré intermédiaire entre une planète et une étoile. Toutefois, pour Jean Schneider, cette affirmation est hasardeuse. En effet, explique-t-il, elle est basée sur un ancien crédo, « fortement remis en question (et j'approuve cette remise en question) » selon lequel un objet de plus de 13 fois la masse de Jupiter n'est plus une planète. Or, la frontière planète-naine brune est floue et se situe plutôt, selon lui, autour de 25 à 30 masses de Jupiter. Enfin, on citera également Corot-24 b, c, le premier système planétaire avec deux petites planètespetites planètes.

    L'exoplanète Corot-3b semble intermédiaire entre une planète et une naine brune. Mais sa vraie nature reste sujette à débat. © Cnes

    L'exoplanète Corot-3b semble intermédiaire entre une planète et une naine brune. Mais sa vraie nature reste sujette à débat. © Cnes

    De nombreuses autres planètes à découvrir

    Ce retrait du service du satellite ne signifie pas que c'est la fin du programme Corot. Comme le souligne Jean Schneider, « plusieurs années seront nécessaires aux astronomes pour analyser toutes les données » acquises par ce télescope spatialtélescope spatial. Les données transmises par Corot sont si riches et si nombreuses qu'il reste « de nombreuses découvertes à y faire », tant dans le domaine de la sismologie stellaire que dans celui des exoplanètes.

    Enfin, comme le souligne le Cnes dans son communiqué de fin de mission, Corot a joué les pionniers et ouvert la voie à de nombreuses missions spatiales qui continueront à traquer des planètes ressemblant à la Terre. On citera Kepler, de la NasaNasa, qui utilise également la méthode du transit et qui reste en activité malgré la panne de deux de ses quatre roues à réaction. La Nasa lui a déjà trouvé un successeur et sélectionné la mission Tess (2017).

    Côté européen, l'expertise de l'équipe Corot lui a permis de proposer à l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne la mission Plato, qui a été sélectionnée et sera lancée à l'horizon 2024. Ce n'est pas la seule mission dédiée aux exoplanètes. L'Esa a également sélectionné le projet suisse Cheops d'étude de planètes extrasolaires connues. Ce satellite sera lancé en 2017.

    Enfin, l'observatoire spatial James Webb (successeur d'Hubble) et Gaia seront également utilisés pour observer les exoplanètes déjà découvertes, afin de mieux les caractériser et aider les astronomes à déterminer la nature des candidats incertains.