Une nouvelle analyse de la météorite d’Allende confirme ce dont on se doutait depuis un certain temps. Les premiers astéroïdes pouvaient posséder un cœur métallique fondu générant un champ magnétique tout en conservant une enveloppe non différenciée de type chondritique. Il faut donc revoir la théorie de la formation des planètes.

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    Il y a déjà quelque temps, Benjamin Weiss avait analysé à l'aide d'un magnétomètre supraconducteur, sensible aux très faibles champs magnétiques rémanentsrémanents, des échantillons d'angrite, une achondrite basaltiquebasaltique. Il y avait découvert avec ses collègues les traces de champs magnétiques fossilisés. L'application des méthodes de datation isotopique avait montré que l'on était en présence d'un des plus vieux objets du Système solaireSystème solaire et qu'il devait faire partie d'un petit corps céleste d'une taille d'environ 100 kilomètres. Or, en appliquant à cette angrite les méthodes du paléomagnétismepaléomagnétisme, Weiss avait découvert que le planétésimal dont elle provenait devait posséder un champ magnétique dont l'intensité devait être comprise entre 20 et 40 % de celui de la Terre aujourd'hui.

    Il fallait en conclure que des planétésimaux pouvaient être partiellement fondus et recélaient des noyaux liquidesliquides composés de ferfer et de nickelnickel où une dynamodynamo autoexcitatrice, comme celles que l'on simule sur Terre avec l'expérience VKS, devait fonctionner. Ainsi, ces corps, loin d'être homogènes, devaient déjà ressembler à des planètes avec croûtecroûte, manteaumanteau et noyau.

    En analysant aujourd'hui une chondritechondrite carbonée similaire à celle du lac Tagish, la célèbre météoritemétéorite d'Allende, c'est aujourd'hui Linda Elkins-Tanton et ses collègues qui arrivent à une conclusion similaire pour le corps parent dont est issue cette chondrite.

    Après s'être brisée en milliers de fragments dans l'atmosphère, la météorite Allende s'est disséminée dans tout le Chihuahua, au Mexique, en 1969. Elle contient certains des plus anciens minéraux formés dans le Système solaire. © Brian Mason, <em>Smithsonian Institution</em>

    Après s'être brisée en milliers de fragments dans l'atmosphère, la météorite Allende s'est disséminée dans tout le Chihuahua, au Mexique, en 1969. Elle contient certains des plus anciens minéraux formés dans le Système solaire. © Brian Mason, Smithsonian Institution

    Toutefois, les observations montrent cette fois-ci que, contrairement à ce que l'on croyait, l'analogue de la différenciation planétaire ne s'est pas produite dans la totalité du corps parent. Une couche de matériaumatériau chondritique, très primitif et non différencié devait bel et bien entourer une région interne différenciée.

    L'orientation des minérauxminéraux magnétiques et la datation de la mise en place de la magnétisation de ces derniers avec des isotopesisotopes du xénonxénon ont prouvé que cette dernière s'était produite sur quelques millions d'années et ne résultait pas de champs magnétiques présents dans le disque protoplanétairedisque protoplanétaire. C'est une conclusion qui découle conjointement des mesures faites et d'une simulation de l'évolution du corps parent de la météorite d'Allende.

    Une clé pour comprendre l'origine des océans

    Les chercheurs en concluent que les astéroïdes primitifs devaient présenter une large gamme de structures avec des corps partiellement ou totalement différenciés. Ce changement de paradigme a des conséquences intéressantes pour l'apparition de la vie sur Terre et même pour l'exobiologie. En effet, l'existence de planétésimaux non complètement différenciés implique que de l'eau devait être contenue dans les régions froides constituées de matériaux chondritiques. Ce qui veut dire qu'il faut revoir à la hausse l'apport du précieux liquide lors de la phase primitive de la formation de la Terre. L'eau des océans pourrait provenir directement de ces derniers et ne pas avoir été apportée plus tard par les comètescomètes. En outre, on peut penser maintenant aussi que dans le cas de la formation des exoplanètesexoplanètes, un apport d'eau formant des océans pour des exoterresexoterres est plus facile qu'on ne l'imaginait, augmentant d'autant les chances pour la vie de se développer ailleurs dans la Voie lactéeVoie lactée.

    Comme on l'a vu récemment avec les comètes, notre vision des premiers instants de la formation du Système solaire ne cesse de s'enrichir et de se complexifier.