Parmi les initiatives les plus audacieuses envisagées pour dévier la trajectoire d’un astéroïde fonçant droit sur la Terre, oubliez l’arme nucléaire pour le réduire en morceaux ou le dévier, oubliez également l’idée de le doter d’ailes pour utiliser le vent solaire voire de se servir d'un remorqueur gravitationnel. Pensez plutôt à… de la peinture. Et blanche de préférence.

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    Apophis est un géocroiseur, c'est-à-dire que sa trajectoire autour du Soleil l'amène fréquemment à croiser celle de la Terre. À ce titre il est potentiellement dangereux, du fait que la moindre perturbation gravitationnelle pourrait l'amener sur une trajectoire de collision avec la Terre. © Esa

    Apophis est un géocroiseur, c'est-à-dire que sa trajectoire autour du Soleil l'amène fréquemment à croiser celle de la Terre. À ce titre il est potentiellement dangereux, du fait que la moindre perturbation gravitationnelle pourrait l'amener sur une trajectoire de collision avec la Terre. © Esa

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    Si l'on se fie à Jean-Pierre Luminet, directeur de recherches au CNRS et astrophysicienastrophysicien à l'Observatoire de Paris, la Terre pourrait être en 2029 et 2036 la cible de l'astéroïde Apophis, découvert en 2004. Si pour ses deux prochains survolssurvols le risque de collision peut être écarté, en 2029 il passera tout de même à environ 42.000 km de notre planète, il n'est pas exclu qu'à l'avenir il emprunte une trajectoire de collision. Avec ses 300 m de diamètre et une masse d'environ 27 millions de tonnes, le contact risque d'être fatal.

    Ce risque de collision est pris très au sérieux par les agences spatiales, le Bureau des Affaires spatiales de l'Onu ou encore des organisations non gouvernementales comme le Space Generation Advisory Council qui sollicite des solutions créatives aux problèmes en relation avec l'espace de la part des étudiants et jeunes professionnels du secteur spatial. Cette année, cette ONG a mis sur pied un challenge dont le but était de trouver de nouvelles solutions pour dévier sans risque un objet proche de la Terre, comme un astéroïde.

    En retour, les scientifiques ont proposé une large variété de méthodes. Et celle qui a remporté la Move an Asteroide Technical Paper Competition de 2012 est la proposition de Sung Wook Peak, un étudiant diplômé du département d'aéronautique et d'astronautique du MIT qui travaille sur une sorte de paintball spatial.


    Scénario de mission envisagé par Sung Wook Peak pour repeindre l'astéroïde Apophis ! © Massachusetts Institute of Technology/YouTube

    Un petit coup de peinture sur les astéroïdes

    Sung Wook Peak veut tirer profit de l'effet Yarkovsky, du nom de son découvreur, Ivan Osipovich Yarkovsky. Cet ingénieur, à la fin du XIXe siècle, avait démontré que la trajectoire d'un petit corps en orbite autour du Soleil peut être modifiée par le rayonnement thermique provoqué par l'échauffement dû au rayonnement solairerayonnement solaire. Si le corps tourne sur lui-même, l'émissionémission de chaleurchaleur (sous forme de photonsphotons) intervient un peu après l'échauffement, induisant une minuscule poussée dans une direction quelconque.

    D'où la proposition de l'étudiant du MIT de modifier le pouvoir de réflexion d'un astéroïdeastéroïde dangereux... en lui donnant un coup de peinture. L'idée n'est pas aussi saugrenue qu'elle y paraît. Il s'agirait d'augmenter la réflectivité ou l'albédoalbédo en recouvrant l'astéroïde d'une fine couche de peinture de couleur blanche. Typiquement, les astéroïdes sont des objets plus ou moins sombres en raison de leur composition qui a tendance à absorber la lumièrelumière.

    Dans sa proposition, le jeune chercheur utilise l'astéroïde Apophis comme cas d'étude théorique. Selon lui, 5 tonnes de peinture seraient nécessaires pour recouvrir cet astéroïde et il suffirait de lancer la peinture, sous forme de boulettes, en deux phases, depuis un satellite proche de l'astéroïde.

    L'effet Yarkovskyeffet Yarkovsky est très faible mais une pichenette peut suffire à modifier l'orbite d'un petit corps de telle sorte que, des années plus tard, la collision avec la Terre soit évitée. Ainsi, pour dévier la trajectoire d'Apophis en 2029, environ 20 ans seraient nécessaires pour que la pressionpression des radiations solaires produise son effet pour modifier la trajectoire de l'astéroïde et l'amène suffisamment loin de la Terre lors de son prochain passage. Autrement dit, si l'on veut éviter le survol très rapproché de 2036, il ne nous reste que 7 ans pour préparer ces 5 tonnes de peinture et repeindre Apophis...