La sonde martienne Phoenix s’est définitivement tue, cinq mois après son arrivée sur la Planète rouge, sans avoir jamais cessé de transmettre un imposant flux de données qu’il va maintenant falloir analyser en détails.

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    Paysage martien vu par Phoenix le 7 octobre 2008, déjà recouvert par le givre. La couleur rouge brique ambiante a disparu… Crédit Nasa

    Paysage martien vu par Phoenix le 7 octobre 2008, déjà recouvert par le givre. La couleur rouge brique ambiante a disparu… Crédit Nasa

    Pour la Nasa, cette extinction de voix définitive n'était pas une surprise puisque PhoenixPhoenix était conçue pour une durée de fonctionnement de 90 jours. Il n'était de plus pas question pour la petite sonde de courtiser un record de longévité à l'instar de ses deux grandes sœurs Spirit et OpportunityOpportunity, qui ont prolongé leur espérance de vieespérance de vie à - au moins - près de cinq années (en janvier 2009). Car à la différence de ces deux explorateurs, arrivés en zone équatoriale, Phoenix subit en permanence les rigueurs d’un hiver polaire, avec une température qui descend à présent à -95°C.

    Courbe des températures du site d’atterrissage de Phoenix jusqu’au 28 septembre 2008. Crédit Nasa

    Courbe des températures du site d’atterrissage de Phoenix jusqu’au 28 septembre 2008. Crédit Nasa

    Si les deux rovers peuvent aussi s'abriter en adoptant un angle d'inclinaison favorable pour leurs panneaux solaires durant le long hiverhiver martien, Phoenix, la dernière sonde statique de la Nasa, ne possède pas cette faculté. Depuis le 2 novembre, la quantité d'énergieénergie solaire convertie en électricité mise au service des instruments essentiels de la sonde a franchi un seuil critique, ne permettant plus de compenser le débitdébit des batteries. Dès lors, Phoenix, en panne de courant, a cessé d'émettre et ne peut répondre aux signaux, qu'elle ne reçoit d'ailleurs plus.

    « Nous déclarons la fin des activités de Phoenix », a annoncé laconiquement Barry Goldstein, responsable du projet pour la Nasa, lors d'une conférence de presse organisée lundi 10 novembre, après avoir vainement tenté de reprendre contact avec la sonde et être resté à l'écoute, sans résultat.

    Phoenix est mort, vive Phoenix !

    Mais pour les scientifiques, le travail ne fait que commencer... Les instruments de la sonde étaient conçus pour accomplir un maximum d'expériences durant un temps très limité, imposé par la date butoir de la mission, et la plupart des résultats emmagasinés commencent à peine à être examinés. L'analyse de la riche moisson scientifique qu'elle aura permis de récolter ne fait que commencer, et cela durera quelques années.

    Lieu d’atterrissage de Phoenix près du pôle nord martien. Crédit Nasa

    Lieu d’atterrissage de Phoenix près du pôle nord martien. Crédit Nasa

    « Phoenix nous a déjà surpris et je suis sûr que nous allons encore retirer plus de choses étonnantes dans ce trésor de données au cours des prochaines années », prédit Peter Smith, responsable scientifique du projet Phoenix pour le compte de l'Université d'Arizona.

    De nombreux résultats, attendus et inattendus

    L'un des tout premiers objectifs de la mission, la découverte d’eau, a été réalisé. Si l'orbiteur américain Mars OdysseyMars Odyssey avait été le premier à démontrer la présence d'eau gelée au pôle nord de Mars, Phoenix l'a touchée de son doigt mécanique, et même goûtée.

    Dès son atterrissage, une des premières tâches de la sonde était d'examiner son environnement afin de détecter, visuellement, de telles traces d'humidité. En vain... jusqu'à ce que les techniciens poussent la curiosité de regarder sous les pieds de l'engin. Et là, surprise ! Des plaques de glace apparaissaient nettement, sous la couche de poussière chassée par les rétro-fuséesfusées.

    Dépôts de glace sous la sonde. Crédit Nasa

    Dépôts de glace sous la sonde. Crédit Nasa

    La pelle du bras robotisé de Phoenix ne pouvant atteindre cet endroit, une première tranchée était creusée à proximité, mettant en évidence ce qui apparaissait comme de la glace. En quelques jours, celle-ci se sublimait, confirmant sa nature avant même que les premières analyses soient effectuées.

    L'examen visuel du sol ne constituant qu'un préliminaire, Phoenix a ensuite passé la main à d'autres instruments, dont certains opéraient pour la première fois en dehors de la Terre, qui ont pu procéder à diverses analyses sous de nombreuses manipulations, l'une consistant à chauffer les échantillons à mille degrés.

    Une faible alcalinité du sol a été découverte, ainsi que des dépôts de sel et de perchlorates. « La découverte de perchlorates était totalement inattendue », affirme Peter Smith, ajoutant que ce composé peut agir en tant que source d'énergie potentielleénergie potentielle pour des micro-organismesmicro-organismes. Du calcairecalcaire est aussi présent, signe de la présence d'eau en abondance dans le passé.

    L’éclairage LED modulable du bras robotisé de Phoenix. Crédit Nasa

    L’éclairage LED modulable du bras robotisé de Phoenix. Crédit Nasa

    Habitable ou non ?

    « Et cela conduit à la grande question : avons-nous démontré que Mars est habitable ? », interroge Peter Smith. S'il est encore prématuré de répondre par l'affirmative, le travail de l'équipe de recherche consiste à présent à affiner les modèles et déterminer si oui ou non, l'environnement martien était susceptible de fournir à la vie toutes les conditions nécessaires à son éclosion dans le passé. Et, pourquoi pas, à avoir fait parvenir certains organismes jusqu'à notre époque, peut-être dans les zones humideszones humides sous la surface.

    Une seule chose est certaine : les prochains atterrisseurs emporteront des instruments de détection biologiques mis au point sur la base des constatations effectuées par Phoenix, dont la courte mission, si elle fut l'une des moins spectaculaires de la conquête martienne, fut aussi la plus fructueuse car elle ouvre désormais la voie à une véritable recherche efficace de la vie sur Mars.

    Les premiers atterrisseurs, les VikingViking de 1976, n'auraient pas détecter un troupeau d'éléphants passant à proximité de la sonde. Les prochains rovers, en ciblant leurs recherches avec précision, devraient être capables de détecter des microbes martiens, si toutefois ils existent.