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Roland  Salesse

Roland Salesse

Ingénieur agronome - Docteur ès Sciences

Je regrette toujours de n'avoir pas plus de temps pour visiter le site de Futura-Sciences. Même en étant scientifique, j'y apprends pleins de choses. Comme je travaille beaucoup pour la vulgarisation scientifique, j'apprécie la clarté et la réactivité de ce site, que je consulte souvent en dehors de mon propre champ de compétences. C'est un plaisir de vous dédicacer mon livre.

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Biographie

Roland Salesse, Ingénieur AgronomeIngénieur Agronome, Docteur ès Sciences
Chargé de mission à la Culture Scientifique
Centre INRA de Jouy-en-Josas, Unité de Neurobiologie de l'OlfactionOlfaction, bat 440, 78350 Jouy-en-Josas Cedex.

Recruté à l'INRA en 1971, Roland Salesse a travaillé pendant la première partie de sa carrière sur la réponse des gonadesgonades aux hormoneshormones hypophysaires (LHLH, FSHFSH) qui président à la gamétogenèse.

Après avoir rejoint le Centre INRA de Jouy-en-Josas, Roland Salesse a créé, au tournant des années 2000, l'unité de Neurobiologie de l'Olfaction, qu'il a dirigée jusqu'en 2009. Cette unité travaille sur les mécanismes de la génération du message olfactif dans la cavité nasale et sur la modulationmodulation du message olfactif par l'état physiologique de l'animal, par exemple par l'état de faim ou de satiété. Les principaux résultats montrent que cette modulation s'exerce dès le niveau périphérique, et pas seulement central. Les études sur les récepteurs débouchent sur la conception de nouveaux neznez-bioélectroniques, associant récepteurs olfactifs biologiques et électronique-informatique de détection. Les applicationsapplications potentielles vont du diagnosticdiagnostic médical à la surveillance environnementale.

Depuis 2009, Roland Salesse s'est intéressé au champ de la création artistique olfactive. A travers un programme de recherche financé par l'ANR (programme "Kôdô", qui s'est terminé en mai 2014), il a travaillé sur la création de spectacles de théâtre olfactif, tant du côté des créateurs (comédiens, metteur en scène, parfumeursparfumeurs) que sur le côté technique (techniques d'odorisation) et sur la réceptionréception par le public (enquêtes, interviews). Ces travaux suggèrent des conditions d'acceptabilité des "œuvres parfumées" pour le public. Le colloque final du programme Kôdô, organisé en mai 2014 à La Sorbonne (co-organisateur) a rassemblé un groupe scientifique et artistique autour de l'odorat qui permettra d'ouvrir de nouveaux champs des applications olfactives au croisement des sciences, des arts et de l'industrie.

Roland Salesse vient d'éditer un livre scientifique de référence sur l'odorat (Odorat et Goût, Ed Quae, 2012) et un autre pour le grand public (Faut-il sentir bon pour séduire ?, Ed Quae, 2015).

En effet, Roland Salesse s'est toujours intéressé à la culture scientifique. Il participe à plusieurs entreprises de médiation : il est secrétaire de l'association S-Cube (association de culture scientifique du Plateau de Saclay ; ) ; il est coordinateur national de la Semaine du Cerveau pour la Société des Neurosciences et membre du comité CNRS qui prépare les journées annuellesannuelles "CNRS-Jeunes" au Futuroscope .

Bibliographie sélectionnée :

- Loosfelt, H., M. Misrahi, et al. (1989). "Cloning and sequencing of porcine LH-hCG receptor cDNA : variants lacking transmembrane domain." Science 245(4917): 525-528.

- Hou, Y., N. Jaffrezic-Renault, et al. (2007). "A novel detection strategy for odorant molecules based on controlled bioengineering of rat olfactory receptor i7." Biosensensors & Bioelectronics. 22(7): 1550-1555.

- Lacroix, M. C., K. Badonnel, et al. (2008). "Expression of insulin system in the olfactory epithelium : first approaches of role and regulation." Journal of Neuroendocrinology. 20(10): 1176-1190.

- Salesse, R. et Gervais, R. (Ed scientifiques, 2012). "Odorat et goût : De la neurobiologie des sens chimiques aux applications. Quae, Versailles-Paris, 539 p.

- Salesse, R. (2015). "Faut-il sentir bon pour séduire ?". Quae, Versailles-Paris, 200 p.

- Salesse, R. et Domisseck, S. (2015). "Techniques d'odorisation dans les arts vivants". A paraître dans "L'art olfactif contemporain", Ed C. Jaquet, Les Classiques Garnier, Paris.

- Domisseck, S. et Salesse, R. (2015). " Le spectateur olfactif : la réception de la pièce « les Parfums de l'âme » par le public". A paraître dans "L'art olfactif contemporain", Ed C. Jaquet, Les Classiques Garnier, Paris.

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métier

Ma spécialité scientifique est la biologie cellulaire et moléculaire. La cellule reste pour moi l'élément le plus fascinant : c'est l'unité de base du vivant, à une échelle intermédiaire (microscopique) entre l'organisme entier (macroscopique) et les molécules (à l'échelle nanométrique). La cellule intègre des milliers de molécules dont elle maîtrise l'organisation et le fonctionnement pour sa propre maintenance, sa reproduction et son intégration dans l'organisme. Grâce à la connaissance de la cellule, j'ai pu passer de l'étude de la reproduction chez les animaux à l'étude de l'odorat. J'ai changé de cellule mais j'ai gardé les mêmes concepts et les mêmes méthodes.
Vers l'an 2000, ma nouvelle cellule d'intérêt est donc devenue le neurone olfactif. Il s'agit bien d'un neurone, c'est-à-dire d'une cellule nerveuse. Les neurones olfactifs ont la particularité de porter des molécules spécialisées, les récepteurs olfactifs. Ces récepteurs sont capables de reconnaître des molécules odorantes portées par l'air qu'on respire. Cette reconnaissance entraîne une activation du neurone, qui transforme le message chimique odorant en un influx nerveux compréhensible par le cerveau. Le message nerveux est ensuite envoyé du nez vers le bulbe olfactif, première étape du traitement du signal par le cerveau. Ensuite, le message olfactif est susceptible de réveiller des mémoires et des émotions, avant même d'arriver à la conscience. Les neurones olfactifs (il y en a des millions dans notre nez) possèdent également une propriété presque unique pour des neurones : ils sont capables de se régénérer à partir de cellules-souches. Or, on sait que les cellules-souches suscitent de nombreux espoirs pour la thérapie cellulaire et, dans notre cas, pour la régénération nerveuse.
Mais, s'il existe tant de recherches passionnantes, nous sommes aussi contraints par le temps et les moyens de choisir quelques sujets de recherches précis. Avec mes collègues, nous avons donc travaillé sur deux aspects : 1) comment les récepteurs olfactifs distinguent-ils des centaines de milliers de molécules odorantes les unes des autres ? et 2) comment l'état nutritionnel de l'animal module-t-il le message olfactif ? Parmi les débouchés les plus prometteurs du premier thème figurent les nez bioélectroniques. En effet, l'odorat des mammifères est un analyseur chimique fantastique qui permet de détecter toutes les odeurs possibles et de les distinguer les unes des autres. Une des applications que nous visons est le diagnostic médical à distance. Grâce à des nez bioélectroniques ultra-miniaturisés, on pourrait déceler de façon très précoce, rien qu'en "sentant" l'haleine d'une personne, les signes avant-coureurs d'une maladie ou au contraire suivre la convalescence. De nombreux résultats très récents montrent que beaucoup de maladies (y compris cancers) ont des profils olfactifs spécifiques. De plus, comparés aux dispositifs actuels de diagnostic, ces nez bioélectroniques seraient d'un coût unitaire très faible, de quoi renflouer le trou de la sécurité sociale.
Le 2e thème s'intéresse à une situation que nous connaissons tous : pourquoi, avant d'avoir mangé, les odeurs alimentaires me paraissent-elles appétissantes, attractives et pourquoi, après manger, ne m'intéressent-elles plus, voire m'indisposent ? Nous avons montré que, parmi les hormones qui contrôlent la prise alimentaire (tout le monde connaît l'insuline, c'est une de ces hormones), celles qui "ouvrent l'appétit" augmentent le signal olfactif et celles qui "coupent l'appétit" (comme l'insuline), diminuent au contraire l'intensité du message. Mais nous souhaitons aller plus loin en posant la question inverse : est-ce que certains odorants peuvent "ouvrir" ou "couper" l'appétit ? En effet, les troubles métaboliques qui font trop manger (obésité) et qui conduisent à des pathologies graves (diabètes, maladies cardio-vasculaires) et ceux qui empêchent de manger (anorexie) coûtent cher en terme de santé publique. Si l'on pouvait intervenir par "olfactothérapie", on disposerait d'un moyen thérapeutique simple, indolore, non invasif et peu coûteux. Enfin, ces dernières années –privilège de la fin de carrière- je me suis éloigné de la biologie cellulaire pour me rapprocher des sciences humaines en étudiant la création olfactive au théâtre. Cela peut paraître anecdotique mais, si le théâtre privilégie la vue et l'ouïe, les comédiens sont fascinés par le pouvoir émotionnel des odeurs et quelques tentatives de "théâtre olfactif" ont eu lieu, dont j'ai analysé certaines. En association avec des philosophes et des artistes, avec des parfumeurs et des "odoriseurs", j'ai pu examiner les différents systèmes de diffusion d'odeur, dont quelques-uns peuvent être adaptés au théâtre. J'ai pu observer la démarche de création d'une pièce de théâtre odorisée, depuis les ateliers olfactifs destinés à motiver les comédiens jusqu'aux représentations en vraie grandeur. J'ai pu aussi enquêter auprès des spectateurs, surpris de découvrir qu'ils pouvaient "comprendre" le message olfactif délivré par la pièce.
Finalement, j'ai tiré deux livres de mon expérience : l'un destiné à un public spécialisé (Odorat et goût) et l'autre tourné vers le grand public, où j'aborde non seulement la physiologie animale, mais aussi d'autres facettes olfactives : l'histoire, l'ethnologie, la création artistique, la médecine (Faut-il sentir bon pour séduire ?).