au sommaire


    Pierre Miossec, professeur d'immunologie clinique, est responsable de l'équipe de recherche « Immunogénomique et inflammationinflammation » à l'hôpital Édouard-Herriot de Lyon. Il est un expert de la prise en charge des malades atteints de polyarthrite rhumatoïde et de la recherche sur cette maladie.

    Que sait-on de la polyarthrite rhumatoïde actuellement ?

    Pierre Miossec : La polyarthrite rhumatoïde est un rhumatisme inflammatoire chronique dont la conséquence est la destruction de l'os et du cartilagecartilage. Le caractère inflammatoire, la chronicité et la destruction sont liés. La réaction immunitaire touche la membrane synovialemembrane synoviale. Pour des raisons inconnues, des cellules immunitaires migrent, attirées à cet endroit, et elles conduisent à des phénomènes d'interactions cellulaires. Ces interactions impliquent des molécules solubles, les cytokinescytokines. La réaction immunitaire entraîne localement plus d'inflammation, la libération d'enzymes et la destruction de la matrice de l'articulationarticulation (cartilage et os). C'est la production de ces cytokines inflammatoires qui, par un système de cascade, conduit à la libération de l'activité enzymatiqueenzymatique.

    Quels sont les traitements futurs de la polyarthrite rhumatoïde ? © Videodoctor, Shutterstock

    Quels sont les traitements futurs de la polyarthrite rhumatoïde ? © Videodoctor, Shutterstock

    Quels progrès récents ont été réalisés par la recherche ?

    Pierre Miossec : Dans les années 2000, il a été démontré que les cytokines sont impliquées dans les maladies inflammatoires. En bloquant une cytokine, le TNF, on observe une amélioration de l'état des malades. Il existe trois inhibiteurs du TNF que l'on donne en traitement de fond. Cependant, ce traitement a une limite : il est suspensif, c'est-à-dire que, si on l'arrête, la maladie repart (ceci est dû au caractère chronique de celle-ci). Chez les malades, il existe une prolifération des synoviocytes (des fibroblastesfibroblastes de la membrane synoviale), d'où le gonflement observé. Un autre phénomène favorise la chronicité : lors des contacts cellulaires, la survie des cellules est augmentée, ou plutôt leur mort par apoptoseapoptose est inhibée. Les fibroblastes meurent moins et donc maintiennent la maladie.

    Quelles sont les autres avancées de la recherche en matière thérapeutique ?

    Pierre Miossec : Parmi les cibles thérapeutiques, il y a les lymphocyteslymphocytes B. Si on détruit les lymphocytes B, le malade va mieux. Le lymphocyte B est en interaction avec d'autres cellules. Si on supprime ces interactions cellulaires, il n'y a plus de cascade enzymatique. On peut aussi agir sur les interactions entre cellules et empêcher les cellules de parler entre elles. Ce sont des thérapeutiques utilisées depuis 2 ou 3 ans.

    D'autres cytokines que le TNF peuvent être ciblées, comme l'IL-6 (interleukineinterleukine 6), qui est une cytokine inflammatoire proche du TNF. À Lyon, nous avons été précurseurs pour montrer le rôle de l'IL-17 produite par une sous-population de lymphocytes T, les lymphocytes Th-17. Cette nouvelle cytokine pourrait être une cible intéressante.

    Quels sont les projets à plus long terme ?

    Pierre Miossec : En développement plus lointain, il faudra examiner la chronicité de la maladie. Des approches en cours ciblent le défaut d'apoptose des fibroblastes.

    L'utilisation de la thérapie géniquethérapie génique en application locale est envisagée : on pourrait injecter un gènegène grâce à un vecteur viral, pour induire la mort des cellules. Une autre piste est d'induire la réparation du cartilage articulairecartilage articulaire. Chez les malades, il existe une inhibitioninhibition de la réparation, donc il faut inhiber cette inhibition !

    Que dire des causes de la polyarthrite rhumatoïde ?

    Pierre Miossec : On sait que la maladie touche plus les femmes que les hommes, qu'il existe des facteurs génétiquesgénétiques et hormonaux, mais on ne peut pas apporter de réponse sur les causes du démarrage de la maladie. Les gènes du CMHCMH ressortent clairement parmi les gènes impliqués, d'autres ont été mis en évidence avec une contribution plus faible. La part génétique n'interviendrait que pour un tiers dans la compréhension de la maladie.

    Propos recueillis le 8 janvier 2009 par M.-C. Jacquier.