au sommaire


    Il semble donc que persiste chez les mammifèresmammifères, y compris Homo sapiensHomo sapiens, un potentiel régénératif bien plus important qu'on ne le craignait. En cela, l'homme peut-il être plutôt comparé à l'hydre ou à la salamandre?

    En d'autres termes, ces cellules souchescellules souches somatiquessomatiques, que Catherine Verfaillie appelle les progéniteurs adultes multipotents, pré-existent-ils, comme chez les plathelminthesplathelminthes ou les hydres, ou sont-ils engendrés en réponse à des stimulus régénératifs?

    En fait, il n'est à ce jour pas possible de répondre à cette question, encore que je ferais bien le pari que notre ressemblance avec la salamandre l'emporte sur celle avec l'hydre. S'il en est bien ainsi, l'on peut craindre que les progrès escomptés dans la maîtrise de ce processus ne permettent pas aisément de transformer la décapitation en un processus réversibleréversible. Mon sentiment vient des conditions dans lesquelles apparaissent les MAPC (multipotent adult progenitor cells) de Catherine Verfaillie. Ce n'est qu'après environ 4 semaines de mise en culture de cellules indistinguables des progéniteurs mésenchymateux, et environ 25 doublements, qu'apparaissent ces cellules aux étonnantes capacités. Ce phénomène est à rapprocher de la dé-différenciation à l'origine de la constitution du blastèmeblastème régénératif des amphibiensamphibiens, structure dans laquelle les progéniteurs mésenchymateux semblent justement jouer un rôle essentiel.

    Au total, il apparaît que nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements de cette exploration des phénomènes persistants de régénération chez les mammifères, l'homme en particulier. Les questions fondamentales et pratiques restent innombrables. Quel rôle jouent, en physiologie et en pathologiepathologie, ces cellules souches somatiques multipotentes ? Pré-existentelles, ou bien sont-elles engendrées par un processus de dé-différenciation à partir d'une population de type mésenchymateux? Leur nombre potentiel - ou bien la capacité de les obtenir à partir d'une population mésenchymateuse - décroît-il au cours de la vie? Dans ce cas, ce phénomène intervient-il dans la sénescencesénescence?

    Serait-il en pratique possible d'isoler de telles cellules chez des adultes malades, et de les utiliser chez eux à des fins de médecine régénératrice? Ou bien, la préparation de telles populations à des fins thérapeutiques étant longue et difficile, de plus en plus incertaine à mesure que vieillissent les donneurs, faudra-t-il envisager d'en garder en réserve à partir de prélèvements systématiques effectués précocement dans la vie?

    Les quelques observations selon lesquelles de telles cellules pourraient répondre à des signaux en provenance des tissus lésés afin de s'y domicilier et de les régénérer seront-elles confirmées, et dans ce cas ce phénomène sera-t-il généralisable à tous les organes?

    Quel sera, dans l'avenir, le champ des maladies accessibles à la thérapie cellulairethérapie cellulaire régénératrice, et quelle part respective joueront alors les cellules souches embryonnairescellules souches embryonnaires et les cellules souches somatiques multipotentes ?

    Autant de questions auxquelles nous ne pourrons apporter de réponses que progressivement. En attendant, les informations acquises permettent déjà d'affirmer que nous avons, en quelques années, changé de paradigmeKuhn T. The structure of scientific revolutions. Chicago: Chicago University Press, 1962. en ce qui concerne notre vision de la différenciation cellulaire et de sa plasticité; et aussi, que ce nouveau paradigme élargit considérablement les perspectives de la thérapie cellulaire et fonde l'espoir de l'émergenceémergence d'une véritable médecine régénératrice.