Nous n'avons pas fini d'être surpris par la capacité des organismes à s'adapter aux conditions de vie les plus difficiles. La Nature fait vraiment bien les choses y compris dans le noir abyssal…

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    Kaiko, le sous-marinsous-marin commandé à distance, qui s'était perdu en mer lors d'une mission en mai 2003, fait parler de lui à titre posthume grâce à l'équipe de chercheurs dirigée par Hiroshi Kitazato du Centre Japonais des Sciences et Techniques de la Mer (JAMSTEC) basé à Yokosuka. Sa descente au cœur de ChallengerChallenger Deep dans l'illustre fosse des Mariannes à l'ouest du Pacifique s'est en effet soldée par une découverte phénoménale... En effet, on apprend aujourd'hui que les échantillons de sédimentssédiments remontés par Kaiko contenaient 432 foraminifèresforaminifères vivants.

    Incroyable. Par -11000 mètres, et à une pressionpression 1090 fois plus importante qu'en surface, des organismes vivent et se reproduisent tranquillement sans être le moins du monde gênés par les contraintes de telles profondeurs ! Les foraminifères sont des êtres unicellulaires microscopiques appartenant au zooplanctonzooplancton, à la base de la chaîne alimentaire marine donc. Ils sont très répandus dans les 100 premiers mètres de tous les océans du globe. Sensibles aux conditions environnementales (salinitésalinité, températures, etc.), ce sont d'excellents indicateurs pour les scientifiques qui travaillent sur le climatclimat du passé, ou qui veulent dater des couches de sédiments.

    Allant de surprise en surprise, Kitazato explique dans la revue Science qu'il s'agit d'allogromiides, autrement dit de foraminifères au squelette -ou test- souple qui constituent seulement de 5 à 20% des communautés les plus proches de la surface, et qu'ils seraient, selon les premiers résultats des analyses ADN, semblables aux premières formes de vie apparues sur Terre. La plupart des foraminifères ont un test rigide composé de carbonate de calciumcarbonate de calcium (CaCO3) qui les protége.

    Mais à une certaine profondeur, l'utilisation de ce matériaumatériau tant utilisé par de très nombreux organismes marins devient impossible : à un seuil appelé niveau de compensation des carbonates ou CCDCCD, le CaCO3 se dissocie sous forme de Ca2+ et HCO3-. Voilà pourquoi ces allogromiides des grands fonds ne parviennent plus à fabriquer de test calcairecalcaire. Ce qui ne les a pas empêché au cours des temps géologiques (l'apparition de la fosse des Mariannes étant estimée à environ -6 à -9 millions d'années) de s'adapter aux modifications de leur environnement, et de prospérer en toute sérénité dans ces conditions extrêmes !