A partir de 2000, une surveillance active de l'ESB (1) est mise en place en France, grâce à des tests réalisés à l'abattoir et à l'équarrissage. Elle complète la surveillance clinique et donne une mesure fidèle du nombre de cas d'ESB sur le territoire national. Le dispositif est complet et national depuis juillet 2001. Des chercheurs de l'INRA et de l'AFSSA ont analysé l'évolution de l'épizootie (2) d'ESB en France et la distribution spatiale de la maladie, étudiant notamment l'efficacité des mesures de lutte mises en place.

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    Evolution de l'ESB, maladie de la vache folle, chez les bovins

    Evolution de l'ESB, maladie de la vache folle, chez les bovins

    S'il est actuellement trop tôt pour analyser l'impact de la dernière mesure prise en 2000 (interdiction totale des farines et de certains dérivés d'origine animale en alimentation animale), compte tenu de la longue incubation de la maladie, il est en revanche possible d'analyser l'effet de la sécurisation des farines animales en 1996.

    L'ampleur de l'épizootie avant la mise en place des tests rapides

    Les données de surveillance de l'ESB en France sont fragmentaires jusqu'en 2000. La surveillance clinique, utilisée seule jusqu'alors, ne détectait qu'une faible proportion des cas. L'estimation de l'ampleur de l'épizootieépizootie d'ESB à cette période repose pour l'essentiel sur des modèles mathématiques bâtis sur les données disponibles et un certain nombre d'hypothèses. Ils estiment en milliers le nombre total d'animaux infectés, un niveau d'infection élevé vers la fin des années 1980, conduisant à une vaguevague de cas cliniques non totalement détectée au milieu des années 1990, puis une seconde vague d'infections au cours de la période 1992-1996, de moindre ampleur que la première, dont on détecte actuellement les cas (5 à 8 ans plus tard).

    L'efficacité des mesures de contrôle mises en place en 1996

    La surveillance de l'ESB repose depuis 2000 sur la clinique et les tests rapides pratiqués à l'abattoir et à l'équarrissage. Ces données permettent de connaître la tendance actuelle de l'épizootie dans les différentes cohortes de naissance, à partir de modèles logistiques ajustés sur le type de production, le test utilisé et l'âge des animaux. Deux études ont été menées, l'une sur les animaux morts ou euthanasiés dans le Grand Ouest (Basse Normandie, Bretagne, Pays de la Loire) de 2000 à 2002, l'autre sur les animaux abattus en 2001 et 2002 sur la France entière. Les résultats montrent un pic de l'épizootie pour la cohorte de naissance 94-95 suivi d'une forte baisse du risque : division du risque par deux pour la cohorte 95-96, puis division par cinq pour la cohorte 96-97. En se basant sur un âge moyen de un an lors de la contamination, le début de la chute du risque ESB correspondrait de fait à la mise en place des mesures de retrait des cadavres et abats à risque, de la fabrication des farines de viande et d'os en juin 1996.

    Les zones les plus à risque sur le territoire national

    La répartition spatiale des cas d'ESB a été analysée en prenant en compte la démographie bovine et le type de production. Les cartes de risque ont été établies. Les résultats montrent que le risque ESB n'est pas géographiquement aléatoire, à la fois pour les cas d'ESB NAIF (3) et super NAIF (nés entre juillet 1996 et décembre 2000). Les zones géographiques à risque pour ces deux catégories sont approximativement les mêmes ; néanmoins, la zone à plus fort risque est la Bretagne pour les cas NAIF, alors que ce sont les Pays de la Loire pour les cas super NAIF, ce qui tend à montrer que le risque ESB a été maîtrisé plus précocement en Bretagne que dans d'autres régions.

    La relation spatiale observée entre la densité en porcs et volailles et le risque ESB pour les bovins NAIF

    L'analyse spatiale des 467 cas d'ESB NAIF détectés entre Juillet 2001 et Décembre 2003 en France a été réalisée et mise en relation avec la densité en porcs et la densité en volailles, toutes productions confondues. Le nombre de cas d'ESB a été modélisé, tenant compte notamment de la densité en bovins, de la distinction entre élevage bovin laitier et bovin allaitant. Le résultat majeur de cette étude est que la densité en porcs est liée statistiquement au risque ESB chez les bovins, avec une augmentation moyenne du risque ESB de 2,4% pour 10 000 porcs (4). Les résultats obtenus sont en faveur de l'hypothèse de contaminations croisées entre aliments pour monogastriques et aliments pour bovins comme source de contamination des cas NAIF en France. L'analyse des données relatives aux fabricants d'aliments du bétail est primordiale pour approfondir cette question.

    Les données existantes sont encore fragmentaires pour avoir des assurances quant aux sources d'infection à l'origine des cas résiduels d'ESB. Par ailleurs, le recul est insuffisant pour juger de l'impact des mesures d'interdiction totale de l'utilisation des FVO (5) et de certaines graisses animales en alimentation animale datant de fin 2000. L'analyse de cet impact devrait éclairer sur les sources résiduelles d'infection. En effet, la persistance de cas d'ESB nés après 2000 et pour lesquels on pourrait exclure une transmission maternelle serait l'indicateur de sources d'infection ni alimentaires ni maternelles. Aussi le suivi précis de l'évolution de l'épizootie d'ESB en France reste-t-il encore à l'ordre du jour.

    Les principales mesures prises en France pour lutter contre l'Encéphalopathie Spongiforme Bovine (ESB)

    1990 : interdiction des farines de viande et d'os (FVO) dans l'alimentation des bovins, qui succédait à l'interdiction d'importation des FVO britanniques en 1989,

    juin 1996 : suppression des cadavres et abats à risque pour la fabrication des FVO destinées à l'alimentation des autres animaux (porcins, volailles, etc.),

    fin 2000 : interdiction totale de l'utilisation des FVO et de certains dérivés d'origine animale en alimentation de tous les animaux destinés à la consommation humaine.

    Malgré ces mesures successives, il est apparu des bovins atteints d'ESB nés après les mesures de 1990, dénommés NAIF (Nés Après l'Interdiction des Farines de viande et d'os), au nombre de 816 au 1er octobre 2004 et d'autres nés après les mesures de 1996, dénommés Super NAIF, au nombre de 95 à la même date.

    (1) ESB : Encéphalopathie Spongiforme BovineEncéphalopathie Spongiforme Bovine
    (2) Épizootie : maladie qui frappe simultanément un grand nombre d'animaux de même espèceespèce ou d'espèces différentes
    (3) NAIF : Nés Après l'Interdiction des Farines de viande et d'os
    (4) A titre illustratif, des départements comme les Côtes d'Armor ou le Finistère comptent respectivement 2,8 et 2,7 millions de porcs, ce qui représente un risque ESB multiplié par 6 ou 7 par rapport à un département sans production porcine
    (5) FVO : Farines de Viande et d'Os