Figurant au quatrième rang des facteurs de risques de décès, l'obésité et le surpoids sont associés de nombreuses maladies. Une nouvelle étude montre que les jeunes gens ayant un IMC élevé durant leur adolescence encourent un risque trois à quatre fois plus élevé de développer certains types de cancer à l'âge adulte. Les auteurs soulignent l'urgence d'inverser la tendance. De son côté, l'OMS prévoit que l'obésité devancera le tabagisme en tant que « facteur de risque évitable » dans les années à venir. 


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    Le surpoids et l'obésité comptent parmi les facteurs de risque associés à de nombreuses maladies chroniques, mais une étude révèle qu'ils pourraient jouer un rôle dans le développement de 17 cancers, et ce, dès la fin de l'adolescence. Exclusivement menés auprès d'hommes, ces travaux témoignent de l'importance de mener de nouvelles actions pour lutter contre la sédentarité alors que les cas d'obésité ne cessent d'augmenter à travers le monde.

    « Près de deux tiers des adultes et un enfant sur trois de la région européenne de l'OMS souffrent de surpoids ou d’obésité, et ces taux continuent d'augmenter », a alerté l'Organisation mondiale de la SantéOrganisation mondiale de la Santé (OMS) dans un rapport présenté en 2022. L'autorité allant jusqu'à prévenir que « l'obésité pourrait détrôner le tabagisme comme principal risque de cancer évitable » dans les prochaines décennies, estimant à treize le nombre de cancers liés à l'obésité. Un problème de santé publique majeur que l'instance mondiale entend prévenir en instaurant « des environnements sains ». Autrement dit, qui passe par la lutte contre la sédentarité, notamment induite par l'avènement des écrans, par une alimentation saine et équilibrée, et une hausse de l'activité physiquephysique.

    Des cancers qui touchent tous les organes 

    Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l'Université de Göteborg vient confirmer le rôle de l'obésité, et plus globalement d'un indice de masse corporelleindice de masse corporelle (IMC) élevé, sur la santé, et notamment sur le risque de cancer. Les analyses portent sur pas moins de 1,4 million d'hommes ayant réalisé l'examen de conscription entre 1968 et 2005, alors qu'ils étaient âgés de 16 à 25 ans, dont près de 80 000 ont développé un cancer au cours d'un suivi moyen de 31 ans. Publiées dans la revue Obesity, ces recherches suggèrent qu'un IMC élevé à l'âge de 18 ans, à la fin de l'adolescence donc, serait lié à un risque accru de plusieurs cancers à l'âge adulte, davantage que le fait d'avoir une mauvaise condition physique à ce jeune âge.

      L'obésité chez l'adolescent, outre la dégradation de la qualité de la vie qu'elle occasionne, est aussi un facteur de risque de développer un cancer à l'âge adulte. D'où l'importance de miser sur la prévention et d'endiguer cette épidémie en mettant en place des environnements sains. © Africa Studio, Adobe Stock
      L'obésité chez l'adolescent, outre la dégradation de la qualité de la vie qu'elle occasionne, est aussi un facteur de risque de développer un cancer à l'âge adulte. D'où l'importance de miser sur la prévention et d'endiguer cette épidémie en mettant en place des environnements sains. © Africa Studio, Adobe Stock

    « Le surpoids et l'obésité à un jeune âge semblent augmenter le risque de développer un cancer, et nous voyons cette association dans presque tous les organes. Si l'on considère la tendance alarmante de la hausse de l'obésité dans l'enfance et l'adolescence, cette étude renforce la nécessité de déployer des ressources importantes pour inverser cette tendance », explique Aron Onerup de l'Université de Göteborg, et principal auteur de l'étude, dans un communiqué.

    Au cours de ces travaux, les chercheurs ont observé un risque plus élevé de cancers du poumoncancers du poumon, de la tête, du cou, du cerveaucerveau, de la thyroïdethyroïde, de l'œsophageœsophage, de l'estomacestomac, du pancréaspancréas, du foiefoie, du côloncôlon, du rectumrectum, du reinrein, de la vessievessie, mais aussi du mélanomemélanome, de la leucémieleucémie, du myélomemyélome et du lymphomelymphome chez les participants avec un IMC élevé à l'âge de 18 ans en moyenne. Notons qu'un IMC supérieur à 25 a été considéré comme élevé -- incluant le surpoids et l'obésité.

    À l'avenir, plus d'un cas sur deux de cancers pourrait être lié à un IMC élevé

    Les chercheurs précisent que cette association était d'autant plus forte pour les cancers de l'œsophage, de l'estomac, et du rein, faisant état d'un risque trois à quatre fois plus élevé pour les hommes en situation d'obésité à l'âge de 18 ans. Il faut toutefois noter qu'un IMC considéré comme normal, à savoir compris entre 20 et 22,4, a également était associé à un risque élevé de cancers de la tête, du cou, de l'œsophage, de l'estomac, du pancréas, du foie, du rein, du mélanome, et du lymphome non hodgkinien.

    Un constat étonnant que les scientifiques expliquent par le fait que « la définition actuelle du poids normal peut s'appliquer principalement aux adultes plus âgés, alors que le poids optimal d'un jeune adulte se situe probablement dans une fourchette inférieure ». Quant au cancer de la prostatecancer de la prostate, le risque était plus élevé chez les participants qui n'étaient ni en surpoids, ni obèses.

    « Dans 30 ans, les chercheurs s'attendent à une augmentation de la proportion de cas de cancer liés au surpoids et à l'obésité chez les jeunes, calculée sur la base du surpoids et de l'obésité chez les hommes de 18 ans en Suède aujourd'hui. Pour le cancer de l'estomaccancer de l'estomac, la proportion passe à 32 % et pour le cancer de l'œsophage à 37 %. Compte tenu de la prévalenceprévalence actuelle du surpoids et de l'obésité chez les jeunes aux États-Unis, plus d'un cas sur deux de ces cancers pourrait être lié à un IMC élevé à la fin de l'adolescence dans 30 ans », conclut l'étude.


    L'obésité des adolescents augmenterait leur risque de cancer à l'âge adulte

    Article de Julien Hernandez, publié le 9 février 2020

    L'obésité à l'adolescence pourrait être un facteur de risque dans le développement de cancer à l'âge adulte, selon une récente étude prospective. 

    Ce n'est plus un secret pour personne : l'obésité est un facteur de risque du cancer. Par les changements métaboliques et la sédentarité qu'elle induit, c'est un véritable lien causal qui unit ces deux variables. Cependant, on connaît moins l'impact d'une obésité transitoire à l'adolescence sur le risque de cancer à l'âge adulte. Est-ce également un facteur de risque ? Une nouvelle étude d'observation publiée dans le journal médical The Lancet vient nous en apprendre un peu plus à ce sujet. 

    Un risque existant mais modéré

    Dans cette étude, les chercheurs partent de l'hypothèse qu'une obésité à l'adolescence peut accroître l'incidenceincidence des taux de cancer à la quarantaine. Entre 1967 et 2010, plus de deux millions de participants israéliens ont été examinés pour les besoins de l'étude. Un peu plus de 100.000 d'entre eux ont été exclus conformément aux critères d'exclusion ou à cause de la perte du suivi, durant l'étude. Sur les patients restants, l'analyse statistique montre une augmentation du risque relatif (par rapport au risque « normal » dans la population générale) de 26 % en moyenne (la vraie valeur est comprise entre 18 à 35 %) chez les hommes. Chez les femmes, aucune association n'a été trouvée à cause, selon les scientifiques, de deux associations inverses avec le cancer du seincancer du sein et le cancer cervical. En excluant ces cancers, le risque relatif est de 27 % (la vraie valeur est comprise entre 13 et 44 %) pour tous les autres.

    Si l'obésité était très importante, le risque relatif de cancer chez les deux sexes était d'autant plus augmenté (le chiffre est indisponible dans le résumé de l'étude) après 10 ans. Les auteurs concluent que la prévalence croissante de l'obésité chez les adolescents et l'association possible entre celle-ci et l'incidence du cancer pourraient accroître la charge des futurs cancers liés à l'obésité. De là, découle l'importance de miser sur la préventionprévention.

    Les nudges (« <em>suggestions indirectes qui peuvent, sans forcer, influencer les motivations, les incitations et la prise de décision des groupes et des individus, au moins de manière aussi efficace sinon plus efficacement que l'instruction directe, la législation ou l'exécution »</em>) pourraient nous être utiles pour trouver des solutions à la pandémie actuelle d'obésité. © T.L.Furrer, Adobe Stock
    Les nudges (« suggestions indirectes qui peuvent, sans forcer, influencer les motivations, les incitations et la prise de décision des groupes et des individus, au moins de manière aussi efficace sinon plus efficacement que l'instruction directe, la législation ou l'exécution ») pourraient nous être utiles pour trouver des solutions à la pandémie actuelle d'obésité. © T.L.Furrer, Adobe Stock

    De l'importance de la prévention

    Une récente étude allemande va dans le même sens : l'obésité à l'adolescence accroît le risque de maladies cardiaques et de cancers à l'âge adulte. Dès lors, même si en médecine la prévention ne suffit pas, elle constitue un levier d'action éminemment important. Cependant, plusieurs problèmes apparaissent. Si on connaît la plupart des comportements à adopter pour prévenir les maladies (ne pas fumer, boire peu d'alcoolalcool, faire du sport, manger équilibré et garder un poids sain, comme nous le rappelle une récente étude du British Medical Journal parue récemment), on est loin d'être performant dans le fait de faire adopter lesdits comportements aux individus. C'est pourtant le nouveau défi majeur de la santé publique. Par ailleurs, les nudges (« suggestions indirectes qui peuvent, sans forcer, influencer les motivations, les incitations et la prise de décision des groupes et des individus, au moins de manière aussi efficace sinon plus efficacement que l'instruction directe, la législation ou l'exécution ») pourraient nous être utiles à trouver des solutions à ces problèmes. En fait, ils s'intéressent déjà aux problématiques de santé publique et d'obésité.

    Néanmoins, c'est un problème complexe mêlant des enjeux sanitaires, économiques et politiques. En effet, dans nos systèmes politiques, hormis les déterminants biologiques, psychologiques et neurologiques qui nous poussent à trop manger (et mal manger), cette pandémiepandémie résulte aussi d'un problème de production, de disponibilité et d'environnement alimentaire. De plus, les mêmes systèmes politiques aiment à déresponsabiliser les personnes de leur propre santé. Même si la sacro-sainte volonté n'est clairement suffisante pour guérir d'une maladie telle que l'obésité, peut-être que (et c'est bien là une hypothèse) rendre aux individus un peu de la responsabilité de leur propre santé (les faire se sentir plus concerné, en somme) aurait des effets bénéfiques ?