En diminuant l’expression d’un seul gène, des chercheurs ont réussi l’exploit d’améliorer l’espérance de vie de souris. En prenant de l’âge, les rongeurs conservent un bon équilibre et une mémoire en pleine forme. Cependant, leurs os s’affaiblissent plus vite et ils sont plus sensibles aux infections que les autres. L'élixir de jouvence est encore loin.

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    Quelle est la clef de la longévité ? Cette question passionne les scientifiques depuis de nombreuses années. Il est bien connu que l'environnement et le mode de vie sont des facteurs clés pour une meilleure santé et une vie plus longue. D'ailleurs, selon les médecins, manger sainement et pratiquer un sport régulièrement permettrait d'atteindre sans trop de difficultés les 80 ans.

    Le patrimoine génétique est également déterminant. Au cours des années, les chercheurs ont identifié plusieurs gènes qui facilitent les chances de parvenir à un âge canonique. L'un d'entre eux code pour une protéine appelée mTor, pour mammalian target of rapamycin, soit en français cible de la rapamycine chez les mammifèresmammifères, parce qu'elle est inhibée par cet antibiotique naturel isolé pour la première fois dans les sols de l'île de Pâques. Ce composé, également appelé sirolimus, est utilisé aujourd'hui pour réduire les rejets de greffes et dans le traitement de certains cancerscancers.

    En 1975, la rapamycine fut découverte sur l’île de Pâques, Rapa Nui en polynésien. Cet antibiotique inhibe la protéine mTOR qui intervientdans la croissance et la survie de la cellule. © Wikimedia Commons, DP

    En 1975, la rapamycine fut découverte sur l’île de Pâques, Rapa Nui en polynésien. Cet antibiotique inhibe la protéine mTOR qui intervient dans la croissance et la survie de la cellule. © Wikimedia Commons, DP

    La protéine mTor participe à de nombreuses fonctions essentielles et est connue pour intervenir sur la croissance et la durée de vie des cellules. En diminuant l'activité de cette enzymeenzyme, les scientifiques ont pu augmenter la longévité de différents organismes comme Saccharomyces cerevisiaeSaccharomyces cerevisiae (une levurelevure unicellulaire), Caenorhabditis elegansCaenorhabditis elegans (un ver) et Drosophila melanogaster (la mouche du vinaigremouche du vinaigre). Plusieurs études ont également mis en évidence l'effet positif d'un traitement par la rapamycine sur l'espérance de vie de souris.

    Une espérance de vie 20 % plus longue

    Des chercheurs du National Institutes of Health (NIH) se sont à nouveau penchés sur le rôle de mTor chez les souris. Ils ont fabriqué des animaux transgéniques possédant une protéine mTor quatre fois moins active que celle des animaux originels. Grâce à cette manipulation, ils ont pu accroître la duréedurée de vie des rongeursrongeurs de 20 % en moyenne. Si l'on transpose ce résultat chez l'Homme, cela reviendrait à vivre environ 16 ans de plus ! Ces expériences sont présentées dans la revue Cell report.

    En analysant les souris mutantes de plus près, les chercheurs ont montré qu'elles possédaient moins de marqueurs biologiques associés au vieillissement dans le cerveaucerveau. Comparées aux souris normales, elles ont brillé dans les tests d'équilibre et dans les labyrinthes ce qui suggère qu'elles bénéficient d'une mémoire plus efficace et d'une meilleure coordination. D'autre part, elles possèdent une massemasse musculaire plus importante et ont une position plus fermement soutenue que les autres. En moyenne, leur espérance de vieespérance de vie est de 28 mois chez les mâles et de 31,5 mois chez les femelles alors que chez les souris non mutées elle est de 22,9 pour les mâles et de 26,5 mois pour les femelles.

    Des effets négatifs non négligeables

    La modification de l'activité de mTor n'est pourtant pas sans conséquences néfastes. Les mutants présentent une activité métabolique normale mais sont plus petits que les autres souris par exemple. De plus, leur masse osseuse se détériore plus rapidement avec l'âge et ils sont plus sensibles aux infections ce qui suggèrent une altération plus marquée de leurs fonctions immunitaires.

    « Cette étude montre que le vieillissement n'est pas un phénomène uniforme, explique l'auteur principal de l'étude Toren Finkel. Il existerait plutôt des horloges biologiques dans chaque organe, contrôlées différemment. » La pilule miracle contre le vieillissement n'est donc pas pour tout de suite et de nombreux mécanismes restent à élucider avant sa fabrication.