Les somnifères pourraient bien augmenter les risques de mort précoce. C’est ce qui ressort d’une étude montrant qu’à petites doses, les probabilités sont déjà significatives. Mais les auteurs invitent malgré tout à prendre avec prudence leurs résultats.

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    Les somnifères, ou hypnotiques, médicaments très prisés par les Français puisqu'ils en sont les plus gros consommateurs au monde, permettent de trouver le sommeil. Un risque de mort précoce a été associé à leur consommation. Reste à savoir si ce sont les molécules en elles-mêmes qui sont dangereuses ou si les maladies qui provoquent les insomnies ne peuvent pas être associées au cancer. © Entheta, Wikipédia, DP

    Les somnifères, ou hypnotiques, médicaments très prisés par les Français puisqu'ils en sont les plus gros consommateurs au monde, permettent de trouver le sommeil. Un risque de mort précoce a été associé à leur consommation. Reste à savoir si ce sont les molécules en elles-mêmes qui sont dangereuses ou si les maladies qui provoquent les insomnies ne peuvent pas être associées au cancer. © Entheta, Wikipédia, DP

    Une étude américaine rapporte que les hypnotiques induiraient une augmentation de la mortalité : même pris très occasionnellement, ils augmenteraient le risque de mort précoce et de cancers. Utilisés pour induire ou maintenir le sommeil, ces médicaments font figure de blockbusters et les Français en sont des utilisateurs intensifs.

    Publié par le British Medical Journal Open, le travail de Daniel Kripke et ses collaborateurs a été mené sur 10.500 volontaires âgés en moyenne de 54 ans. Ils ont été suivis durant deux ans et demi, période au cours de laquelle ils ont pu recourir - régulièrement ou occasionnellement - à un ou des médicaments hypnotiques : des benzodiazépines ou d'autres somnifères tels que le zolpidem, l'eszopiclone ou le zaleplon, mais aussi des barbituriques ou des sédatifs antihistaminiques. Il existe, on le voit, une très large variété de médicaments pour dormir...

    Cet important groupe de patients a été comparé à une seconde cohorte, composée de 23.500 sujets ne prenant aucun médicament pour dormir. Ces volontaires présentaient les mêmes caractéristiques d'âge, de sexe et d'hygiène de vie que la population étudiée. Leur état de santé, leur poids et leur origine ethnique ont également été pris en compte. La seule différence entre les deux groupes résidait donc dans la consommation de médicaments hypnotiques.

    Les troubles du sommeil ont des répercussions sur la santé, parmi lesquelles le manque de concentration ou des risques accrus d'accidents. Mais prendre des médicaments pour dormir peut également avoir son lot de conséquences. © Phovoir

    Les troubles du sommeil ont des répercussions sur la santé, parmi lesquelles le manque de concentration ou des risques accrus d'accidents. Mais prendre des médicaments pour dormir peut également avoir son lot de conséquences. © Phovoir

    Un lien entre prise de somnifères et mortalité du cancer

    « À partir de (seulement, NDLRNDLR) 18 prises de ces médicaments sur une année, le risque de décès prématuré est multiplié par 3,5 » soulignent les auteurs. Il augmenterait avec la quantité d'hypnotiques consommés. En effet, entre 18 et 132 prises par an, le risque de décès serait quadruplé voire quintuplé au-delà de ce chiffre. Les utilisateurs d'hypnotiques à hautes doses verraient également leur risque de cancers - tous types confondus - accru de 35 %.

    Ces résultats, toutefois, doivent être interprétés avec prudence. Les auteurs eux-mêmes font valoir que leurs travaux n'indiquent en aucun cas « un lien de cause à effet » entre la prise d'hypnotiques et l'augmentation des risques.

    Neurologue et directeur du laboratoire du sommeil au CHU de Montpellier, Yves Dauvilliers partage cette prudence. Il regrette notamment que « les auteurs ne précisent pas la pathologiepathologie sous-jacente ayant conduit à la prise de traitements, une insomnieinsomnie primaire, une insomnie avec dépression, une insomnie avec anxiété.... Qu'en est-il de la somnolencesomnolence associée ? Ces éléments sont majeurs pourtant pour préciser la responsabilité respective des médicaments ». Reste de plus à déterminer dans ce travail les causes de mortalité chez les sujets exposés aux hypnotiques !

    À ses yeuxyeux, ces résultats « constituent néanmoins un argument supplémentaire pour réévaluer régulièrement le rapport bénéfice/risque de ces moléculesmolécules dans la prise en charge des troubles chroniques du sommeil ».