Des chercheurs viennent de montrer que certains anticorps très performants, les bNAb, peuvent reconnaître les cellules infectées par le virus du sida (VIH) et entraîner leur destruction par le système immunitaire. Cette découverte permet de mieux comprendre le mécanisme d’action de ces anticorps particuliers qui sont en cours d’essai clinique.

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    Le Sida est une maladie infectieuse causée par le VIH (virus de l'immunodéficience humaine). On estime que 1,2 million de personnes en sont décédées l'année dernière et que près de 35 millions sont aujourd'hui infectées par le virus, plaçant le Sida en tête des maladies infectieuses les plus meurtrières au monde (OMS, 2015). Pour combattre cette maladie, des traitements antirétroviraux existent mais, faute de moyens, seulement 16 millions de personnes y ont eu accès en 2015. De plus, le virus n'est pas complètement éliminé par ces traitements : il peut se multiplier à bas bruit et constituer ce qu'on appelle un réservoir viral. En cas d'interruption du traitement, ce réservoir peut être la source d'une nouvelle multiplication virale dans l'organisme, même après de nombreuses années de thérapie. Il est donc important de mieux comprendre les mécanismes qui régulent sa formation et de déterminer des stratégies pour l'éliminer.

    Chez certains patients infectés, des anticorps particuliers ont été identifiés pour leur capacité à bloquer la réplicationréplication de très nombreuses souches de VIH-1VIH-1. Ces anticorps dits « neutralisants à large spectrespectre », ou bNAb, agissent de façon complémentaire, comme l'ont démontré les chercheurs de l'équipe d'OlivierOlivier Schwartz de l'unité « Virus et immunitéimmunité » (Institut Pasteur/CNRS), cofinancée par le Vaccine Research Institute (VRI) et le groupe « Réponse humorale aux pathogènespathogènes » (Institut Pasteur/CNRS), dirigé par Hugo Mouquet, en collaboration avec l'équipe d'Olivier Lambotte, Hôpital Bicêtre. Les résultats ont été publiés le 3 mars 2016 dans Nature communications.

    Lymphocytes infectés par le VIH-1. Les particules virales (en jaune) bourgeonnent à la surface d’une cellule infectée. Image réalisée en microscopique électronique à balayage. © Olivier Schwartz et l’Ultrapole de l’Institut Pasteur

    Lymphocytes infectés par le VIH-1. Les particules virales (en jaune) bourgeonnent à la surface d’une cellule infectée. Image réalisée en microscopique électronique à balayage. © Olivier Schwartz et l’Ultrapole de l’Institut Pasteur

    Les bNAb sont prometteurs pour l'immunothérapie

    Tout d'abord, les bNAb neutralisent la propagation du virus, et notamment son passage de cellule à cellule. Mais ils sont également capables, pour les plus efficaces d'entre eux, de reconnaître directement celles qui sont infectées et d'entraîner leur destruction par les Natural Killer (NK), cellules du système immunitaire chargées d'éliminer celles qui sont anormales. Pour cela, les bNAb peuvent reconnaître différentes parties de l'enveloppe virale exposées à la surface des cellules humaines.

    Les scientifiques ont observé que l'exposition de ces différentes parties de l'enveloppe est très variable à la surface des cellules infectées, et dépend de la souche de VIH, modulant donc la réponse des cellules immunitaires. Ils ont observé que la combinaison de différents bNAb permet d'augmenter leur efficacité pour recruter des cellules NK.

    Enfin, les chercheurs ont montré que les cellules provenant du réservoir viral de patients sont également reconnues par les bNAb, à des niveaux généralement suffisants pour entraîner leur élimination.

    « Ce travail représente une étape importante dans la compréhension du mécanisme d'action des anticorps neutralisants à large spectre. Il définit les paramètres contrôlant les capacités de ces anticorps à recruter des cellules immunitaires et conforte l'idée qu'ils pourraient réduire le réservoir chez les patients infectés par le VIH », explique Olivier Schwartz.

    La caractérisation de ces anticorps bNAb est importante pour différentes raisons. La façon dont ils reconnaissent l'enveloppe virale donne en effet des informations précieuses pour la conception de candidats vaccins. De plus, il a déjà été démontré qu'ils peuvent être utilisés chez l'Homme. Les plus efficaces sont actuellement en cours d'essai cliniqueessai clinique aux États-Unis pour leur faculté à abaisser significativement la charge viralecharge virale pendant 28 jours. Ces immunothérapiesimmunothérapies représentent donc de nouvelles stratégies thérapeutiques ou préventives prometteuses.