Est-ce un espoir pour l’infertilité masculine ? Du sperme fonctionnel a pu être obtenu à partir de cellules souches embryonnaires. Cela se passe chez la souris et il y a encore un long chemin à parcourir avant de savoir si la technique est transposable chez l'Homme.

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    Des scientifiques japonais ont annoncé vendredi avoir pour la première fois réussi à recréer des spermatozoïdes fonctionnels à partir de cellules souches embryonnaires d'une souris, une avancée susceptible d'aider un jour à combattre la stérilité humaine. Les spermatozoïdes ont été utilisés pour féconder des ovules et le résultat a donné de « jeunes souriceaux en pleine santé qui ont grandi pour devenir des souris mâles et femelles tout à fait fertiles », explique l'étude menée par ces scientifiques de l'université de Kyoto et parue dans l'édition en ligne de la revue américaine spécialisée Cell. Mais cette technologie ne pourrait pas être utilisée sur les êtres humains avant une décennie, précisent les auteurs.

    L'expérience n'en reste pas moins enthousiasmante car elle fait tomber ce qui constituait l'un des principaux obstacles en biologie : recréer du sperme à partir de cellules embryonnaires, connues sous le nom de cellules souches primordiales, qui pourra ensuite devenir fonctionnel. Une autre équipe japonaise avait cette année réussi à obtenir des spermatozoïdes fonctionnels, chez la souris également, mais les chercheurs étaient partis de cellules prélevées dans les testicules d'un embryon mâle, et encore différenciées. Ces cellules appartenaient donc à la lignée germinalelignée germinale, celle qui conduit aux spermatozoïdes ou aux ovules et qui, durant l'embryogénèse, se sépare très tôt de la lignée somatiquesomatique, laquelle produira toutes les autres cellules du corps.

    Les chercheurs ont prélevé des cellules souches embryonnaires au tout début de l’embryogénèse, au niveau de la masse cellulaire interne (<em>ICM</em>). Avec elles (<em>ESCs</em>) et avec des cellules souches induites (<em>iPSCs</em>), ils ont en culture obtenu des cellules ressemblant aux cellules de l’épiblaste embryonnaire (<em>Epiblast-like cells</em>) puis des cellules semblables aux cellules germinales primordiales (<em>PGC-like-cell</em>, <em>PGCLCs</em>). Transplantées dans les testicules d’une souris mâle, elles ont produit par spermatogénèse des spermatozoïdes fonctionnels. © Katsuhiko Hayashi <em>et al.</em>/<em>Cell</em>

    Les chercheurs ont prélevé des cellules souches embryonnaires au tout début de l’embryogénèse, au niveau de la masse cellulaire interne (ICM). Avec elles (ESCs) et avec des cellules souches induites (iPSCs), ils ont en culture obtenu des cellules ressemblant aux cellules de l’épiblaste embryonnaire (Epiblast-like cells) puis des cellules semblables aux cellules germinales primordiales (PGC-like-cell, PGCLCs). Transplantées dans les testicules d’une souris mâle, elles ont produit par spermatogénèse des spermatozoïdes fonctionnels. © Katsuhiko Hayashi et al./Cell

    Spermatogénèse naturelle

    Cette fois, l'équipe de Kyoto a commencé par prélever des cellules souches sur un embryon très jeune. À partir de celles-ci et de cellules souches induites, les chercheurs ont obtenu des cellules semblables aux cellules germinales (primordial germ cell-like cells, PGCLC). « Il s'agit de la première étude à faire état d'une génération de cellules germinalescellules germinales pleinement fonctionnelles issues de cellules (souches embryonnaires) ES », a insisté l'auteur de l'étude, Mitinori Saitou, professeur au département d'anatomieanatomie et de biologie cellulairebiologie cellulaire de l'université de Kyoto, dans un mail à l'AFP. De précédents travaux avaient déjà permis d'obtenir des cellules germinales, en l'occurrence des ovocytes, à partir de cellules souches. Aux États-Unis, une équipe avait elle aussi obtenu du spermesperme fonctionnel et même à une descendance, encore une fois chez la souris, mais au prix de manipulations complexes, aboutissant à des souriceaux dont on pouvait dire qu'ils avaient deux pères.

    Les chercheurs ont utilisé pour leur expérience des souris qui étaient dans l'incapacité de produire du sperme normal. Ils leur ont injecté ces cellules souches PGCLC. Après maturation dans les testicules selon une spermatogénèse naturelle, elles « ont produit du sperme à l'aspect normal, qui a ensuite été utilisé pour féconder, avec succès, des ovules », commente l'étude. L'équipe de chercheurs va continuer de travailler sur cette technique et sur les effets observés sur les générations successives de souris mâles et femelles.