Des malades du Sida co-infectés par un autre virus, proche de celui de l'hépatite mais inoffensif, connaissent un taux de survie nettement plus élevé. De nouveaux résultats viennent confirmer de vieux soupçons et pourraient tracer une piste vers de futures thérapies.

au sommaire


    Image en microscopie électronique du virus VIH.

    Image en microscopie électronique du virus VIH.

    Il s'appelle GB Virus type C, alias GBV-C. Génétiquement proche du virus de l'hépatite, ce flavivirus a longtemps été injustement suspecté d'être pathogène (on parlait d'hépatite G). Non seulement, il ne provoque aucune maladie connue mais il pourrait aussi protéger contre le virus du VIHVIH du SidaSida.

    L'idée n'est pas nouvelle : depuis 1998, six études avaient pointé le fait troublant que des patients présentant une survie plus longue que la moyenne étaient plus souvent porteurs du GBV-C. Ces résultats préliminaires ont laissé les chercheurs sceptiques.

    Ces travaux, qui ne prenaient en effet pas en compte les périodes d'incubation des deux virus, ne permettaient pas de conclure formellement à un lien entre la co-infection et la meilleure résistancerésistance à la maladie. Et, surtout, personne n'avait jamais observé une pareille influence d'un virus sur un autre. Une infection qui en complique une autre, les médecins connaissent cela depuis des lustres, mais un virus qui inhibe la prolifération d'un autre, voilà qui serait complètement nouveau !

    Mais aujourd'hui, le doute ne semble plus permis. Dans le numéro du 4 mars de la revue New England Journal of Medicine, une équipe de chercheurs détaillent leur étude menée sur des échantillons sanguins provenant d'un groupe de patients masculins atteints du Sida et médicalement suivis en permanence depuis 1984, dans le cadre de la Multicenter AIDS Cohort Study. Dix-huit mois après l'infection par le virus VIH du Sida, la présence de GBV-C ne change rien au taux de survie des patients. Mais au bout de six années, la différence est étonnante : 75 % de survivants chez les malades abritant GBV-C contre 39 % chez les autres. Pire, les patients porteurs de GBV-C au moment de l'infection mais chez qui ce virus salvateur disparaît voient leur taux de mortalité multiplié par près de 6 !

    Reste à expliquer ce phénomène. Les scientifiques n'ont que des hypothèses. On sait que le GBV-C se développe dans une certaine famille de lymphocyteslymphocytes, les CD4+, décimés par le HIV. Le GBV-C pourrait n'être pour rien dans l'augmentation du taux de survie constaté : ce serait, au contraire, parce que, pour une autre raison, certains patients résistent mieux au HIV que les CD4+ seraient chez eux plus nombreux, offrant une possibilité de développement pour GBV-C.
    Mais il se peut aussi que ce dernier exerce effectivement une action inconnue réduisant la prolifération du VIH : compétition entre virus ou production d'une moléculemolécule.
    Voilà en tout cas, du pain sur la planche pour la recherche sur le Sida.