Face à la résistance croissante de certaines bactéries provoquant des infections nosocomiales, les scientifiques envisagent d’utiliser les grands moyens : séquencer leur génome pour remonter à la source et endiguer l’épidémie. Une méthode qui a déjà fait ses preuves…

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    Klebsiella pneumoniae est une entérobactérie causant, comme son nom l'indique, des pneumonies. Elle est très pathogène et entraîne la mort dans un cas sur deux. © Janice Carr, CDC, DP

    Klebsiella pneumoniae est une entérobactérie causant, comme son nom l'indique, des pneumonies. Elle est très pathogène et entraîne la mort dans un cas sur deux. © Janice Carr, CDC, DP

    Depuis quelques années, les infections nosocomiales à bactéries multirésistantes (BMR) inquiètent les responsables de la santé publique de nombreux pays, dont la France. Pour des médecins américains, la maîtrise de ce type d'épidémie passerait par une technique innovante : le séquençage du génome des bactéries. Autrement dit, l'analyse détaillée de leur ADN. Ils ont testé grandeur nature leur stratégie. Les résultats parus dans Science Translational Medicine semblent prometteurs.

    En 2011, une épidémie à Klebsiella pneumoniaeKlebsiella pneumoniae a tué 10 patients - sur 17 infectés - en quelques semaines, dans un hôpital new-yorkais. Sitôt les premiers cas signalés, les traditionnelles mesures de contrôle (isolement des patients, étude de la localisation des lits...) « n'ont fourni aucun indice sur la manière dont se propageait la bactérie », explique Tara Palmore des National Institutes of Health (NIH).

    Le séquençage de l'ADN bactérien nécessite moins de temps que pour l'ADN d'un eucaryote car il est beaucoup plus court. Il se compose par exemple de 6 millions de paires de bases pour <em>Klebsiella pneumoniae</em> tandis qu'il est de 3,2 milliards pour l'être humain. © Peter Artymiuk, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le séquençage de l'ADN bactérien nécessite moins de temps que pour l'ADN d'un eucaryote car il est beaucoup plus court. Il se compose par exemple de 6 millions de paires de bases pour Klebsiella pneumoniae tandis qu'il est de 3,2 milliards pour l'être humain. © Peter Artymiuk, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0 

    L’ADN pour remonter les traces de la bactérie

    Une équipe de chercheurs dirigée par Evan Snitkin du National Human Genome Institute de Bethesda (Maryland) a tenté une approche innovante : le séquençage du génome entier de la bactérie. Laquelle a été prélevée sur chacun des patients.

    L'objectif était de mettre en évidence les changements survenus au niveau de l'ADNADN de la bactérie, à mesure qu'elle se multipliait. Dans le cas présent, les scientifiques sont parvenus à mettre en évidence « quelques-uns des 6 millions de nucléotidesnucléotides du génome de K. pneumonae [qui] changent ».

    Au terme de ce travail minutieux, ils sont ainsi remontés à la première victime. Il s'agissait d'un homme de 43 ans, sorti de l'hôpital trois semaines plus tôt. Le parcours  de la bactérie a ensuite été reconstitué, d'un malade à un autre. Les chercheurs ont même lié l'une des infections à la contaminationcontamination d'un ventilateur, nettoyé par la suite. Selon eux, à l'avenir, « le séquençage de génome en temps réel de ce type de bactérie pourrait devenir un outil de choix pour améliorer le contrôle des épidémies nosocomiales ».