La maladie d'Alzheimer, la plus répandue des affections neurodégénératives, est aussi la plus mal connue. Car si toutes les étapes, ce que le Dr Dubois appelle la "cascade biologique" sont identifiées, la cause de son apparition reste une énigme. Avec, en corollaire, la difficulté de la diagnostiquer précocement.

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    A droite, IRM d'un cerveau sain. A gauche, cerveau atteint de la maladie d'Alzheimer. Crédit NASA.

    A droite, IRM d'un cerveau sain. A gauche, cerveau atteint de la maladie d'Alzheimer. Crédit NASA.

    Or il existe aujourd'hui, selon le Dr Bruno Dubois, directeur de recherche à l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), un faisceau de preuves qui indiquent que les processus d'altération du cerveau sont en marche, et dont l'identification met à profit des moyens d'investigation médicale qui n'existaient pas il y a peu, comme l'imagerie par résonance magnétiqueimagerie par résonance magnétique nucléaire ou IRM, et la tomographie par émission de positonstomographie par émission de positons ou TEP. La mise en corrélation de ces examens avec des tests de mémoire spécifiques peut aujourd'hui permettre d'établir un diagnostic beaucoup plus précoce.

    Alors que les critères actuellement utilisés remontent à 1984 et n'en permettent la détection qu'au niveau du seuil de la démence, que le corps médical définit comme la perte d'autonomieautonomie, une mise en évidence plus précoce permettrait une prise en charge plus rapide, condition indispensable à l'applicationapplication des futurs traitements médicamenteux ou immunologiques qui apparaissent à l'horizon et qui permettraient enfin de retarder, et peut-être même de stopper l'enchaînement aujourd'hui irréversible des lésions cérébrales dont l'ensemble constitue la maladie d'Alzheimer.

    Selon le Dr Dubois, le premier critère de l'apparition de la maladie est la présence d'un trouble de la mémoire épisodique, qui compromet le processus de mémorisation d'une expérience, "à la graver sur le disque durdisque dur", selon ses propres termes. Mais la difficulté de poser un diagnostic sûr provient de ce que si la maladie d'Alzheimer touche 5 % de la population âgée de plus de 65 ans, la moitié des plus de 50 ans souffrent de troubles de la mémorisation pour d'autres causes plus bénignes. D'où l'importance d'associer cette observation à d'autres indices, que la médecine moderne permet aujourd'hui de découvrir.

    Parmi ces critères, on retiendra :

    • La mise en évidence par IRM de l'atrophieatrophie de l'hippocampehippocampe ;
    • La détection d'un taux anormal de biomarqueurs dans le liquide cérébrospinalliquide cérébrospinal (peptide amyloïde, protéine tauprotéine tau) ;
    • Une réduction du métabolismemétabolisme au niveau des régions temporale et pariétale du cerveau (démontré par imagerie fonctionnelle).

    Faute de ces observations, la détection de la maladie d'Alzheimer intervenait jusqu'ici alors que les processus de dégénérescence du tissu cérébral étaient déjà significativement avancés et avaient entraîné des lésions irréversibles. Une plus grande précocité de diagnostic était la condition indispensable à l'application des futurs moyens thérapeutiques dont on entrevoit aujourd'hui les possibilités, et qui permettront bientôt de stopper, voire guérir cette affection terriblement invalidante.

    Les travaux du Dr Dubois, fruit de deux années de recherches qui ont réuni des spécialistes de six nationalités différentes, ont été publiés dans le dernier numéro de la revue The Lancet Neurology.