Les célèbres anti-inflammatoires non stéroïdiens ibuprofène et diclofénac, très utilisés contre l’arthrite, augmenteraient de manière significative les risques d’attaques cardiaques chez les patients les consommant à haute dose et à long terme. Ils seraient aussi dangereux que le Vioxx, un autre anti-inflammatoire interdit en 2004 à cause des complications cardiovasculaires qu’il entraînait.

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    Le cœur et les vaisseaux sanguins peuvent pâtir d'une consommation forte d'ibuprofène ou de diclofénac sur une longue période. Il faut donc bien se renseigner sur l'utilisation de ces médicaments. © Gordon Museum, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le cœur et les vaisseaux sanguins peuvent pâtir d'une consommation forte d'ibuprofène ou de diclofénac sur une longue période. Il faut donc bien se renseigner sur l'utilisation de ces médicaments. © Gordon Museum, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    On en a déjà retiré du marché pour les mêmes raisons. En 2004, les laboratoires Merck stoppaient la fabrication de leur médicament anti-inflammatoire Vioxx sur fond de polémique, du fait de risques cardiaques avérés pour les patients. Ce 30 mai dans The Lancet, des chercheurs britanniques démontrent que l'ibuprofène et le diclofénac, deux principes actifs de nombreux médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), sont tout aussi dangereux s'ils sont pris à haute dose et sur le long terme.

    Bien que des études aient déjà montré les risques que ces médicaments pouvaient engendrer sur le système cardiovasculaire, les chercheurs de l'université d’Oxford désiraient cette fois réaliser une analyse plus fine de la situation, afin d'estimer précisément les dangers encourus. Ils ont entrepris une méta-analyse à partir de 639 essais et plus de 353.000 personnes.

    Selon leurs calculs, sur un millier personnes à risque modéré de trouble cardiovasculaire, on compte sur une année en moyenne huit crises cardiaquescrises cardiaques. Ce chiffre s'élève à 11 pour les consommateurs à haute dose d'ibuprofène (2,5 g par jour) ou de diclofénac (150 mg par jour), et l'un de ces trois cas supplémentaires connaît une issue fatale. De même, ces quantités font passer de 3 à 7 sur 1.000 le nombre de cas d'insuffisances cardiaques. Les risques d'ulcères à l’estomac sont également plus que doublés.

    Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont nombreux, mais beaucoup comportent du diclofénac ou de l'ibuprofène. Moins on en utilise, et mieux on entretient notre santé cardiovasculaire. © Phoenix Dark-Night, Flickr, cc by nc sa 2.0

    Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont nombreux, mais beaucoup comportent du diclofénac ou de l'ibuprofène. Moins on en utilise, et mieux on entretient notre santé cardiovasculaire. © Phoenix Dark-Night, Flickr, cc by nc sa 2.0

    Diclofénac et ibuprofène : des dangers uniquement à haute dose

    Or, ces deux AINS sont très fréquemment prescrits, notamment contre les douleursdouleurs des différentes maladies arthritiques. Au Royaume-Uni par exemple, ces troubles articulaires concernent sept millions de personnes. À cette échelle, une consommation à haute dose d'ibuprofène ou de diclofénac entraînerait potentiellement 21.000 crises cardiaques supplémentaires, parmi lesquelles 3.000 conduisent à la mort. Des chiffres qui prennent alors une toute autre ampleur !

    Par cette étude, les auteurs précisent vouloir fournir des informations aux patients, de manière à ce qu'ils puissent participer à la décision de poursuivre ou de changer de médicament. Ils invitent toutes les personnes traitées de manière chronique avec l'un ou l'autre de ces AINS à consulter leur médecin, pour discuter de la suite à donner. À chacun d'estimer si le jeu en vaut la chandelle, car leur efficacité contre les douleurs n'est quant à elle absolument pas remise en question.

    D'autre part, ils insistent bien sur le fait que leurs résultats valent pour une consommation à long terme et à haute dose. Pour un traitement ponctuel ou avec des quantités limitées, ces médicaments ne représentent pas de danger.

    Soulager le cœur avec des alternatives

    Une telle recherche soulève évidemment des questions. S'il faut les remplacer, que faire ? Des alternatives plus sûres mais aussi efficaces demandent à être trouvées. Le naproxène pourrait en profiter. Ce principe actif n'engendre pas les effets secondaires indésirables constatés avec l'ibuprofène et le diclofénac sur le système cardiovasculaire, selon l'étude (mais il reste malgré tout impliqué dans des troubles gastriques et rénaux).

    Or, n'oublions pas qu'insister sur la préventionprévention dans le domaine des problèmes cardiaques est essentiel. En effet, le tabagisme ou l'obésitéobésité constituent des facteurs de risquefacteurs de risque importants pour les maladies cardiovasculaires. Stopper la cigarette, avoir une hygiène de vie saine et contrôler régulièrement sa tension artérielletension artérielle permet de diminuer bien plus efficacement les risques de crise cardiaque ou d'AVC, que l'arrêt des traitements anti-inflammatoires.

    Si l'on devait trouver une moralité à cette étude, celle-ci pourrait être que les médicaments les plus puissants sont rarement dénués d'effets secondaires. Un mal pour un bien donc. Il s'agit finalement d'un arbitrage que chaque patient doit faire avec son médecin, afin d'adopter la stratégie la mieux adaptée. Mais pour cela, il faut absolument disposer de tous les éléments d'information.